Damas a catégoriquement rejeté lundi un nouveau plan arabe pour un règlement de la crise en Syrie prévoyant un transfert de pouvoirs de Bashar al-Assad à son adjoint et un gouvernement d’union nationale.
Les Comités locaux de coordination (LCC), qui organisent la mobilisation sur le terrain, ont eux aussi dénoncé l’initiative de la Ligue arabe, qui donne selon eux "un nouveau délai au régime pour poursuivre la répression" en Syrie, secouée depuis 10 mois par un mouvement de contestation sans précédent.
Le plan appelle Assad à déléguer "des prérogatives au vice-président pour traiter avec un gouvernement d’union nationale" appelé à être "formé dans les deux mois", selon un communiqué final lu par le ministre des Affaires étrangères du Qatar, cheikh Hamad ben Jassem ben Jabr al-Thani, après une réunion ministérielle au Caire de près de cinq heures.
Ce cabinet devra être "présidé par une personnalité de consensus. Sa mission sera d’appliquer le plan arabe et de préparer des élections législatives et présidentielle pluralistes et libres sous supervision arabe et internationale", ajoute le plan.
La Ligue demande au "gouvernement et à tous les courants de l’opposition d’engager un dialogue sérieux sous l’égide de la Ligue arabe dans un délai ne dépassant pas les deux semaines" pour pouvoir former ce gouvernement.
Cheikh Hamad a estimé que l’initiative "visait à un départ du régime syrien de manière pacifique". "Si cette initiative n’est pas mise en oeuvre, nous irons au Conseil de sécurité", a-t-il averti, en appelant de nouveau à "l’arrêt de toutes les formes de violences", à la libération des détenus et à éliminer toute "présence armée dans la rue".
La mention du "départ du régime" ne figure néanmoins pas dans le texte final arabe.
Tôt lundi, le régime syrien a catégoriquement rejeté ce nouveau plan, le qualifiant d’"ingérence flagrante dans ses affaires intérieures", selon un responsable cité par la télévision officielle syrienne.
"La Syrie rejette les décisions prises à son encontre en dehors du plan du travail arabe et considère que celles-ci portent atteinte à sa souveraineté nationale", selon ce responsable, qui a précisé que le plan était une "violation flagrante" de la charte de la Ligue arabe.
Cheikh Hamad a précisé que la Ligue allait "informer l’ONU de l’ensemble des résolutions (...) en vue de leur approbation". Le secrétaire général de la Ligue, Nabil el-Arabi expliqué que la demande d’appui de l’ONU visait à "donner plus de poids" à l’initiative.
Parallèlement, les ministres de la Ligue ont décidé de prolonger sa mission d’observation dans le pays, malgré les critiques, notamment de l’opposition syrienne, contre son incapacité à faire cesser l’effusion de sang.
Selon l’ONU, plus de 5.400 personnes ont perdu la vie en dix mois de révolte et de répression en Syrie dont plusieurs centaines depuis le début de la mission arabe.
La Ligue a décidé d’augmenter le nombre d’observateurs, tout en demandant au régime de "faciliter leur travail".
Les observateurs ont été déployés le 26 décembre après l’accord donné par le pouvoir à Damas à un protocole régissant leur mission, qui prévoit un arrêt des violences, le retrait des chars des villes et le déplacement libre des médias étrangers. Mais aucune des clauses n’a été respectée.
Des divergences sont d’ailleurs apparues durant la réunion arabe dimanche, l’Arabie saoudite ayant décidé de retirer ses observateurs, en arguant du non-respect par le régime des clauses du précédent plan arabe.
L’appel arabe à un soutien de l’ONU a été favorablement accueilli par le chef du Conseil national syrien (CNS), le plus important groupe de l’opposition, Burhan Ghaliun, qui a cependant affirmé que "toute transition en Syrie devra être précédée d’une annonce de départ de monsieur Assad".
Le CNS réclame le transfert du dossier à l’ONU et veut désormais une saisine de la Cour pénale internationale (CPI). Il demande aussi l’imposition d’un "embargo aérien" à la Syrie et la création de "zones sûres en vue de l’acheminement de l’aide humanitaire".
Pour leur part, les LCC, qui représentent les militants sur le terrain, ont estimé que la Ligue arabe avait "échoué encore une fois à adopter une solution qui répond aux attentes des Syriens".
"Sa nouvelle initiative donne au régime un nouveau délai pour poursuivre la répression et une couverture pour mater la révolte", ont-ils affirmé. "Les Syriens n’accepteront pas une solution qui ne comporte pas un changement radical du régime répressif et corrompu", ont martelé les LCC, en appelant la Ligue arabe à "reconnaître son échec".
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