Washington et Paris ont réclamé dimanche de "vraies" négociations sur
une transition politique en Syrie, et ont rejeté la "ligne rouge" de
Damas sur le sort de Bashar, à la veille de nouvelles
discussions à Genève de l'ONU avec le régime et l'opposition.
Européens et Américains, qui étaient réunis dimanche à Paris, ont
également insisté sur le respect du cessez-le-feu et l'acheminement de
l'aide humanitaire pour garantir des négociations "crédibles", alors que
la guerre, qui a fait plus de 270.000 morts et des millions de
réfugiés, va entrer dans sa sixième année.
"Toutes les parties doivent respecter la cessation des hostilités,
coopérer dans la livraison d'aide humanitaire, et respecter le processus
de négociations visant à parvenir à une transition politique. Si le
régime et ses alliés pensent qu'ils peuvent tester les limites (...) ils
se trompent", a déclaré le secrétaire d'Etat américain John Kerry à
l'issue d'une rencontre avec ses homologues français, allemand,
britannique, italien et de l'Union européenne.
Il a également fustigé les propos tenus la veille par son homologue
syrien Walid Mouallem, qui a catégoriquement exclu de discuter à Genève
du sort du président Bashar al-Assad, une question qualifiée de "ligne
rouge".
M. Mouallem "essaye clairement de faire dérailler le processus", a
dénoncé M. Kerry, rejoint par son homologue français Jean-Marc Ayrault
qui a évoqué des "provocations".
"Il y a urgence de mettre en oeuvre une vraie transition politique.
C'est cela qui sera au coeur des négociations à Genève", a souligné M.
Ayrault, répétant qu'un "retour au statu quo ante" devait être exclu.
"Il faut que les choses changent", a-t-il dit.
Les négociations de Genève doivent aborder pour la première fois de
manière concrète l'avenir du pays, après un premier round qui avait
échoué en janvier à Genève, en raison de l'intensification des raids
russes et de l'aggravation de la situation humanitaire.
Ces nouvelles négociations, même si elles s'annoncent "difficiles", s'ouvrent dans une atmosphère radicalement différente.
Une trêve, initiée par les Etats-Unis et la Russie et entrée en vigueur
le 27 février entre régime et rebelles en Syrie, tient bon malgré des
violations, et l'ONU avec ses partenaires ont pu apporter de l'aide à
près de 250.000 personnes vivant dans des zones assiégées, une
assistance réclamée par l'opposition.
"Toute violation, même sporadique, de la cessation des hostilités, met
en danger le processus", a souligné John Kerry, appelant une nouvelle
fois les alliés russe et iranien de Damas à user de leur influence pour
faire respecter la trêve.
Le négociateur en chef du régime de Damas, Bachar al-Jaafari, a débarqué
dimanche matin à Genève pour cette nouvelle session de près de deux
semaines au Palais des Nations de l'ONU.
Le chef de la délégation de l'opposition, le chef rebelle salafiste
Mohammed Allouche, était lui présent depuis la veille en compagnie
d'autres membres du Haut comité des négociations (HCN), qui rassemble
les groupes clés de l'opposition.
L'émissaire spécial de l'ONU Staffan de Mistura a détaillé l'ordre du
jour des discussions: un nouveau gouvernement incluant toutes les
tendances, une nouvelle Constitution et l'organisation d'élections
législatives et présidentielle sous l'égide de l'ONU d'ici 18 mois.
Mais pour Joshua Landis, directeur des études sur le Moyen-Orient de
l'Université d'Oklahoma, cet agenda "n'est pas réaliste, car (Bashar) al-Assad est plus fort que jamais et ne va pas quitter
son poste".
Le fossé entre régime et opposition est abyssal avec en premier lieu le
sort de Bashar, dont les troupes ont enregistré de nombreux succès
face aux rebelles, avec l'aide militaire de l'allié russe.
Le HCN insiste sur la "constitution d'un corps transitoire doté de tous
les pouvoirs exécutifs" et dans lequel M. Assad "n'a pas sa place".
"Nous considérons que la période de transition doit débuter avec la
chute ou la mort de Bashar al-Assad", a déclaré à deux agences de
presse, dont l'AFP, le chef rebelle salafiste Mohammed Allouche.
Mais pour le régime, il est hors de question de discuter de la
présidentielle ou du sort de Bashar, réélu en 2014 en pleine guerre pour
un nouveau septennat.
Le régime a aussi une tout autre interprétation que l'opposition sur
l'autorité transitoire. Pour lui, il s'agit d'un simple remaniement
ministériel avec un "gouvernement d'unité", c'est-à-dire élargi à des
opposants mais toujours placé sous l'autorité de Bashar comme le
prévoit la Constitution actuelle.
Ce nouveau gouvernement, selon M. Mouallem, désignera un comité pour
"rédiger une nouvelle constitution ou amender l'actuelle". Le texte sera
ensuite soumis à référendum.
De nouveaux combats ont opposé dans la nuit de samedi à dimanche le
Front Al-Nosra (branche syrienne d'Al-Qaïda), et d'autres groupes
jihadistes à des rebelles dans le nord-ouest, faisant au moins six
morts.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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