"On me traite de tous les noms, franc-tireur, cowboy... mais cela n'a
pas d'importance": Moti Kahana, milliardaire israélo-américain veut
"sauver" les juifs en danger du Moyen-Orient et n'a que faire des
critiques sur ses méthodes.
Issu d'une famille juive en partie décimée dans les pogroms en Roumanie
durant la Deuxième Guerre mondiale, ce "self-made man" de 48 ans s'est
fait une spécialité de relocaliser, le plus souvent vers Israël, les
juifs qu'il pense en danger dans une région en proie aux tumultes et aux
haines religieuses.
Le problème est qu'Israël n'est pas toujours prêt à les accueillir et
que certains d'entre eux n'ont jamais demandé à être "secourus".
Pour ses admirateurs, Moti Kahana, qui a bâti sa fortune aux Etats-Unis,
est un anticonformiste qui ne craint pas de transgresser les règles.
Pour ses détracteurs, c'est un homme dangereux jouant avec la vie des
gens.
"Je ne kidnappe pas les gens. Je ne leur dis même pas qu'ils doivent
aller en Israël", se défend l'homme au crâne dégarni lors d'un entretien
avec l'AFP à Jérusalem.
Moti Kahana a fait la une des journaux fin 2015 en expliquant avoir exfiltré trois des derniers juifs de Syrie.
Les trois femmes, une mère et ses deux filles qui vivaient dans la ville
d'Alep ravagée par la guerre, ne savaient rien de l'opération jusqu'à
ce que des hommes de main ne les fassent monter dans un minibus, avec le
mari et les trois enfants de l'une d'elles. Moti Kahana affirme avoir
agi à la demande du fils d'une des femmes, installé à New York.
Des dizaines de milliers de juifs vivaient en Syrie avant la Deuxième
Guerre mondiale. La plupart ont quitté le pays par vagues successives.
La loi israélienne dite du retour permet à tout juif de la diaspora
ayant au moins un grand-parent juif d'immigrer en Israël et d'en devenir
citoyen.
Mais seules deux des juives d'Alep ont pu entrer en Israël, qui a refusé
un visa à la troisième au motif qu'elle s'était convertie à l'islam en
épousant un musulman. Elle a dû rentrer dans la Syrie en guerre avec son
mari et ses trois enfants.
Leur sort fait l'objet de bien des spéculations. M. Kahana assure qu'ils
sont sains et saufs. Mais l'Agence juive, organisme semi-gouvernemental
israélien chargé d'organiser l'immigration des juifs, l'accuse de les
avoir abandonnés avec légèreté et le qualifie de "franc-tireur
proclamé".
Beaucoup s'interrogent sur les raisons pour lesquelles le millionnaire consacre autant de temps et d'argent à cette cause.
Moti Kahana, qui revendique d'autres opérations d'exfiltration de juifs
d'Iran ou du Yémen, affirme avoir dépensé 2,2 millions de dollars (deux
millions d'euros) en cinq ans, dont une bonne part pour aider des
réfugiés non-juifs de Syrie.
Jusqu'en 2011, il était un homme d'affaires à succès et sans histoire.
Né à Jérusalem de parents juifs roumains ayant immigré après la Deuxième
Guerre mondiale, il part aux Etats-Unis à 20 ans et y fait fortune dans
la location de voitures.
"Personne ne louait aux conducteurs de moins de 21 ans, donc j'ai décidé
de le faire", explique l'homme d'affaires, qui vit avec sa femme et
leurs trois enfants dans le New Jersey sur la côte est.
En 2009, il vend l'affaire à une grande société de location de voitures pour des millions de dollars.
Quand en 2011 la guerre civile éclate en Syrie, aux frontières d'Israël,
il est ému et se rappelle le destin d'une partie de sa famille
massacrée durant l'Holocauste en Roumanie. "Je croyais que le monde ne
laisserait pas une chose pareille se reproduire", dit-il.
Son aide, initialement prodiguée à tous les réfugiés sans distinction, se concentre ensuite sur les juifs.
Il affirme avoir, avec le soutien d'alliés arabes locaux, réussi à
relocaliser des dizaines de juifs à travers le Moyen-Orient, dont vingt
de Syrie.
L'Agence juive lui reproche d'avoir "induit en erreur des gens pendant trop longtemps et de jouer avec leur vie".
"Ce n'est pas une façon de procéder que nous recommandons, pour peser
nos mots. Il ferait mieux d'arrêter de mettre des vies en danger pour sa
propre gloriole", ajoute le porte-parole de l'organisation Yigal
Palmor.
Moti Kahana dit ne pas prétendre faire le travail de l'Agence, qui,
souligne-t-il, a aidé ses parents à quitter la Roumanie. Il est
intervenu à Alep "parce que personne d'autre ne l'avait fait".
L'Agence juive pourrait toutefois être bientôt débarrassée de lui: "J'ai
dépensé tout mon argent", assure Moti Kahana. "C'est fini pour moi. Je
vais peut-être devoir reprendre les affaires très bientôt".
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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