mercredi 20 avril 2016

Syrie: Les pourparlers de paix bloqués à Genève

Réunion d'une délégation de l'opposition syrienne en présence de l'envoyé de l'Onu Ramzy Ezzeldin Ramzy (4e G) le 19 avril 2016 à Genève. (Afp)
 
Les principaux responsables de l'opposition syrienne ont commencé à quitter à Genève où se déroulent les négociations de paix.
Ils jugent "inacceptable" de poursuivre les pourparlers avec le régime de Damas qu'ils accusent de massacrer des civils.
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), au moins 44 civils ont été tués mardi dans des frappes vraisemblablement menées par l'aviation syrienne sur deux marchés dans la province d'Idleb (nord-ouest), contrôlée par le Front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, qui est exclu, comme le groupe Etat islamique (EI), de la trêve entrée en vigueur fin février entre régime et rebelles.
Réagissant à ces attaques, parmi les plus sanglantes depuis le début du cessez-le-feu, l'opposition syrienne, rassemblée au sein du Haut comité des négociations (HCN), a condamné des "massacres". "Viser des marchés populaires bondés de civils représente une escalade dangereuse", a-t-elle affirmé dans un communiqué.
Il s'agit d'une "preuve supplémentaire du bien-fondé (...) du choix du HCN de suspendre sa participation aux pourparlers" de Genève, a-t-elle ajouté.
Les principaux responsables de l'opposition ont commencé à quitter Genève en ne laissant sur place qu'une équipe "technique", a annoncé mardi le coordinateur général du HCN, Riad Hijab. "Certains collègues du HCN sont partis hier, d'autres partent aujourd'hui ou vont quitter Genève d'ici à vendredi", a-t-il précisé.
Le deuxième round de négociations, qui a débuté le 13 avril, devrait en principe s'achever vendredi.
L'émissaire spécial de l'ONU pour la Syrie Staffan de Mistura doit s'entretenir mercredi avec la délégation du régime à Genève.
M. Hijab a par ailleurs demandé au Conseil de sécurité de l'ONU de "reconsidérer" l'accord de trêve. "Il faut qu'il y ait des observateurs internationaux sur le terrain et que l'ONU constate les violations et demande des comptes aux coupables", a-t-il dit.
Il a également reproché aux Américains d'avoir mis fin aux livraisons d'armes aux rebelles alors que les Russes ont eux continué à soutenir l'armée syrienne.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a pour sa part fustigé le comportement "capricieux" du HCN, estimant que les négociations n'étaient "pas gelées" malgré le départ de représentants de l'opposition.
"Il y a (...) des protagonistes sur la scène internationale qui rêvent de renverser le régime par la force, qui font tout, y compris en sapant les négociations de Genève. Il me semble que les Etats-Unis, la France sont résolument opposés à ces tentatives", a-t-il dit lors d'une conférence de presse avec son homologue français Jean-Marc Ayrault.
La diplomatie américaine a quant à elle jugé que les négociations de paix intersyriennes n'étaient pas mortes et vanté une baisse de 70% des violences en Syrie, malgré le blocage manifeste des pourparlers à Genève et les massacres sur des marchés imputé au régime de Damas.
"Personne n'a jamais pensé que cette semaine à Genève pourrait être l'aboutissement de tout le processus politique", a défendu le porte-parole de la diplomatie américaine John Kirby.
Les Etats-Unis et la Russie sont les parrains de la cessation des hostilités en Syrie, en vigueur en principe depuis le 27 février, entre les forces armées du régime et celles des groupes d'opposition. Washington et Moscou sont aussi les artisans de discussions indirectes sur une éventuelle transition politique péniblement amorcées à Genève entre Damas et des opposants, sous l'égide de l'ONU.
Pour Karim Bitar, directeur de recherches à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), "l'opposition semble être parvenue à la conclusion que ces négociations n'étaient qu'un écran de fumée permettant au régime de continuer à consolider son assise".
De son côté, le régime s'est dit prêt à discuter de la création d'un gouvernement de coalition avec l'opposition mais pas du sort de Bashar al-Assad, a déclaré mardi à l'AFP Bachar al-Jaafari, le négociateur en chef de Damas. "Ce n'est pas dans nos compétences, ni dans nos prérogatives, de discuter du sort du président Bashar al-Assad", a-t-il dit.
Le sort du président syrien reste la principale pierre d'achoppement dans les négociations.
L'opposition insiste pour la constitution d'un "organisme de transition" doté des pouvoirs exécutifs et dont serait exclu Bashar al-Assad, tandis que le régime veut un "gouvernement de coalition" avec l'opposition sous l'autorité du président.
En cinq ans, la guerre en Syrie a fait plus de 270.000 morts et obligé plus de la moitié de la population à quitter ses foyers, plusieurs millions de Syriens se réfugiant à l'étranger.

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