Des soldats israéliens visitent le Mur des Lamentations à Jérusalem, le 12 avril 2016 (Afp)
Devant le Mur des Lamentations à Jérusalem, fidèles et touristes sont soumis à une stricte séparation des sexes, et l'annonce de la création d'un espace mixte de prière bute sur une forte opposition, même au sein du gouvernement.
La perspective d'une troisième zone -mixte-, qui écorne le monopole des ultra-orthodoxes, a déclenché un vif débat en Israël, un pays où la frontière entre le religieux et le politique est souvent poreuse.
Le sujet se trouve aujourd'hui au coeur d'une bataille politique, un test pour la coalition gouvernementale dirigée par Benjamin Netanyahu qui comprend des partis ultra-orthodoxes.
Batya Kallus, une militante de l'association "Les femmes du mur", se bat depuis des années pour une égalité des sexes sur ce lieu de prière historique.
"Cet endroit est un lieu religieux symbolique pour les Israéliens et pour les juifs, mais malheureusement c'est un lieu où les femmes sont exclues d'activités religieuses", déplore cette femme de 59 ans.
Le mur occidental ou des Lamentations est un vestige du Temple détruit en 70 par les Romains. L'Esplanade des Mosquées sur lequel se situait ce Temple est le lieu le plus sacré du judaïsme mais la prière y étant interdite pour les juifs, le mur est devenu l'endroit le plus sacré devant lequel ils peuvent prier.
Des militants et réformateurs réclament depuis des années un espace de prière mixte devant ce mur, alors que pour l'orthodoxie juive qui contrôle le lieu, la mixité dans un lieu de prières est totalement interdite.
Les femmes ne peuvent pas diriger de prières mais le groupe de Mme Kallus le fait dans l'enceinte des femmes depuis plus de 20 ans, au grand dam des orthodoxes.
Après des années de lutte politique et juridique, sans oublier le harcèlement dont les "Femmes du mur" ont été victimes, un compromis avait été apparemment trouvé en janvier.
Approuvé par le gouvernement dans une décision qualifiée d'historique, un plan de construction d'un espace mixte avait été décidé par les autorités au sud de l'actuel lieu de prières.
Malgré de longues négociations, ce compromis a rapidement été attaqué par les partis ultra-orthodoxes faisant partie du gouvernement de Netanyahu, mettant en péril l'avenir de la coalition.
"Il y a un statu quo sur cette question depuis des années et nous voulons le préserver", a affirmé à l'AFP Yaakov Litzman, le ministre de la Santé, à la tête du parti ultra-orthodoxe Judaïsme unifié de la Torah.
"Nous n'accepterons aucun compromis", a-t-il ajouté.
La discorde entre réformateurs et ultra-orthodoxes dépasse la question des prières sur le lieu saint. Le judaïsme ultra-orthodoxe est opposé à donner toute reconnaissance religieuse aux mouvements conservateurs et réformateurs juifs, minoritaires en Israël mais très nombreux aux Etats-Unis.
Pour ces derniers, il faut faciliter les questions de conversion, mariage et divorce qui sont sous le contrôle unique du judaïsme ultra-orthodoxe en Israël.
Face à la fronde des ultra-orthodoxes, des efforts sont mis en oeuvre pour arriver à un nouveau compromis, le Premier ministre Netanyahu ayant chargé son chef de cabinet David Sharan de trouver une solution d'ici deux mois.
Malgré leurs discours publics, les partis ultra-orthodoxes veulent trouver un accord afin d'éviter une bataille juridique ou comme par le passé, ils pourraient sortir perdants sur des questions essentielles pour eux, estime Shouki Friedman, qui dirige le Centre pour la religion, la nation et l'Etat à l'Institut pour la démocratie en Israël.
Il semble peu probable qu'ils abandonnent leur place dans l'un des gouvernements les plus à droite de l'histoire d'Israël reposant sur une fragile coalition de partis religieux et nationalistes, affirme l'expert.
Pour les "Femmes du mur", pas question de renégocier l'accord.
Et le 24 avril, elles prévoient un nouveau coup de force: la première bénédiction sacerdotale féminine et publique devant le Mur des Lamentations, une tradition toujours réservée aux hommes.
Pour Mme Kallus, la séparation entre femmes et hommes sur ce lieu de prière n'est qu'une discrimination parmi d'autres.
"C'est une exclusion symbolique, d'autres formes d'exclusions sont elles plus importantes mais moins visibles", affirme-t-elle à l'AFP.
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