Le
président américain Barack Obama et le roi saoudien Salman lors d'une
rencontre à Ryad en Arabie Saoudite, le 20 avril 2016. (Afp)
Barack Obama a entamé mercredi ce qui devrait être sa dernière visite en Arabie Saoudite, un allié historique des Etats-Unis qui n'a pas digéré l'ouverture de Washington vers Téhéran.
Arrivé en début d'après-midi à Ryad, capitale du riche royaume pétrolier, le président américain devait avoir un tête-à-tête avec le roi Salmane, âgé de 80 ans, avant de participer jeudi à un sommet avec les six pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG).
L'arrivée de M. Obama n'a pas été retransmise en direct à la télévision nationale, contrairement à ce qui fut le cas lors de sa dernière visite en janvier 2015.
Les décisions de l'administration Obama - du refus d'intervenir en Syrie contre le régime de Bashar al-Assad aux négociations sur le nucléaire avec l'Iran, grand rival chiite - ont ulcéré les monarchies sunnites.
"Même si la visite est présentée comme l'occasion de renforcer l'alliance, elle montrera surtout à quel point Washington et Ryad se sont éloignés au cours des huit années écoulées", estime Simon Henderson du Washington Institute for Near East Policy.
"Pour Obama, le problème central au Moyen-Orient est la lutte contre le groupe Etat islamique. Pour la dynastie des Al-Saoud, c'est l'Iran", résume-t-il dans une tribune publiée dans Foreign Policy.
A ceux qui prédisent une visite d'adieux se résumant à une simple photo de famille, la Maison Blanche rappelle la solidité d'une alliance qui remonte à Franklin Roosevelt, et met l'accent sur les efforts conjoints contre les jihadistes en Irak comme en Syrie.
"La relation a toujours été complexe (...) mais il existe un socle de coopération sur des intérêts communs, en particulier l'antiterrorisme", assure Ben Rhodes, proche conseiller de M. Obama.
Les monarchies attendent un renforcement de l'aide militaire américaine -- déjà très élevée -- mais aussi un coup de pouce pour lutter contre les cyber-attaques déstabilisatrices. Elles redoutent en particulier que Téhéran apporte un soutien aux dissidents afin de fragiliser leurs régimes.
Les monarchies sunnites espèrent aussi que le président américain, qui quittera le pouvoir en janvier 2017, articulera un discours ferme vis-à-vis de Téhéran.
Dans un article publié mi-mars dans le magazine The Atlantic, M. Obama rejetait l'approche consistant à dire que "l'Iran est la source de tous les problèmes". Et appelait ses "amis" saoudiens à trouver un moyen de partager leur voisinage avec Téhéran. La formulation est très mal passée à Ryad.
Un autre sujet sensible, source de tensions récurrentes, a refait surface à l'approche de ce voyage présidentiel: le possible rôle de l'Arabie Saoudite, ou de certains de ses responsables, dans les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis (15 des 19 pirates de l'air étaient Saoudiens).
Des élus républicains comme démocrates du Sénat ont rédigé un projet de loi qui permettrait de traduire ces derniers devant des tribunaux américains.
"Si l'Arabie Saoudite est impliquée dans le terrorisme, bien sûr qu'ils devraient pouvoir être jugés", a estimé le sénateur démocrate Chuck Schumer.
A la veille de son départ, M. Obama est monté au créneau pour expliquer combien il était "opposé" à ce texte. "Si nous rendons possible le fait d'attaquer en justice d'autres pays, alors nous ouvrons la voie à ce que des individus d'autres pays lancent en permanence des actions en justice contre les Etats-Unis", a-t-il mis en garde.
L'exécutif américain espère que les discussions se concentreront d'abord sur la lutte contre Daesh qui a subi de sérieux revers en Irak, et sur les moyens de mettre un terme aux conflits qui déchirent la région.
Mais en Syrie comme au Yémen, les timides efforts de paix ont montré leur extrême fragilité au cours des dernières 48 heures.
Dans une lettre ouverte à Barack Obama, Amnesty International lui demande de placer la question des droits de l'Homme au coeur des discussions, déplorant que les voix discordantes au sein des monarchies du Golfe soient systématiquement "étouffées" sous couvert de sécurité nationale.
"Faire taire ces voix - défenseurs des droits de l'Homme, militants, journalistes, figures de l'opposition - est devenu la routine", déplore l'ONG.
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