vendredi 12 septembre 2014

Syrie: à Alep, la rentrée scolaire s'est faite dans les abris

L'école a repris dans les quartiers contrôlés par les rebelles à Alep mais les cours ont lieu dans des pièces souterraines, à l'abri des bombardements incessants de l'armée de l'air syrienne.
Les écoliers quittent la lumière du jour pour rejoindre une cave en bas d'un escalier obscur. Là, plusieurs dizaines d'enfants, garçons et filles de différents âges, sont entassés sur des bancs derrière 15 tables.
Dans la salle, la peinture blanche est écaillée, il n'y a aucun des ornements habituels d'une classe.
Les écoliers doivent se partager cahiers, crayons et stylos, mais malgré tout ils entonnent en choeur et avec enthousiasme une chanson et suivent avec attention ce que leur professeur, M. Abdallah, écrit au tableau.
"Les enfants étudient au sous-sol à cause des bombes. Aux étages au-dessus, l'école est bien équipée, mais l'intensité des bombardements nous a contraint de faire cours dans la cave", explique M. Abdallah.
"C'est dur pour eux. On sent qu'ils sont sous pression lorsqu'ils descendent au sous-sol, nous essayons de les distraire pour améliorer leur moral", souligne le jeune maître.
Durant les récréations, les enfants grimpent les escaliers pour respirer à l'extérieur, malgré les risques. Les avions et hélicoptères de l'armée survolent souvent le secteur, tirent des roquettes ou lâchent de manière aveugle des barils d'explosifs meurtriers.
"Nous jouons un peu pour nous distraire car nous restons longtemps enfermés sous terre", confie Jaafar, coiffé d'une capuche grise, tandis que ses camarades sautillent autour de lui. "Mais, il est impossible de rester longtemps au grand jour car nous avons peur qu'un avion nous bombarde", déplore-t-il.
Sur l'aire de récréation, deux jeunes filles tournent en rond en se tenant les deux mains. Une fillette, chemise rouge et sandales bleues, fait rebondir un ballon. Une autre, coiffée d'un foulard, saute à la corde pendant qu'un garçon, avec un sac à dos vert, applaudit. D'autres enfants courent.
Des milliers d'enfants ont péri durant le conflit en Syrie, qui dure depuis plus de trois ans. Un très grand nombre ont été déplacés à cause des combats opposant les rebelles aux forces gouvernementales.
Alep (nord) est l'une des zones les plus ravagées par la guerre. Les raids y ont anéanti la majeure partie de ce qui était auparavant la capitale économique de la Syrie.
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), près de 3000 personnes ont péri à Alep depuis le début de l'année, dont 800 enfants.
La scolarité est erratique et rares sont ceux qui peuvent suivre un cursus normal. Des enfants d'âges différents s'entassant pour suivre les mêmes leçons.
Mona, une institutrice, constate que beaucoup de choses ont changé depuis qu'elle a commencé à enseigner avant le début de la révolte en mars 2011.
"Nous avons été contraints de prendre des édifices qui n'étaient pas adaptés à l'habitation et nous les avons transformés en écoles. Les élèves souffrent car ils manquent de place pour jouer, les classes se déroulent dans une atmosphère de peur et le quartier est souvent bombardé".
Régulièrement, les enfants s'absentent durant des semaines. A leur retour, ils expliquent que leur maison a été la cible de bombardements ou de raids.
"Ils nous disent: +Mon secteur a été visé par des tirs. Ma maison a été détruite et mon frère est mort+. Les écoliers sont les plus grandes victimes de cette révolution", dit-elle.
Selon un récent rapport de l'ONU, le système éducatif en Syrie est au bord du gouffre avec plus de la moitié des enfants d'âge scolaire (51,8%) n'allant plus à l'école. Cette proportion atteint plus de 90% à Raqa et Alep et 68% dans le Damas rural.
À la fin de 2013, 4.000 écoles étaient hors service parce qu'elles étaient détruites, endommagées ou accueillaient des personnes déplacées.

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