Le Premier ministre Mohamed Basindawa a démissionné après que les
rebelles chiites ont pris le contrôle du siège du gouvernement. Depuis
quelques jours les combats s'intensifient au Yémen. Après avoir paralysé
l'aéroport de Sanaa, les insurgés chiites avaient attaqué la télévision
d'État. Les autorités yéménites avaient alors décrété un couvre-feu
nocturne samedi dans le nord de la capitale en proie à des combats
meurtriers entre rebelles chiites et combattants sunnites. Le président
Abd Rabbo Mansour Hadi, cité par les médias, a qualifié de "tentative de
coup d'État" l'offensive des rebelles d'Ansaruallah à Sanaa où les
heurts avec les combattants du parti al-Islah épaulés par l'armée ont
fait depuis jeudi des dizaines de morts dans les deux camps et une
vingtaine de morts civils.
Ces événements font suite à une intensification des heurts qui se
poursuivaient samedi soir entre les rebelles du groupe d'Ansarullah et
les combattants sunnites malgré les efforts de l'ONU pour une trêve. Les
combats ont provoqué la suspension depuis vendredi des vols des
compagnies étrangères à l'aéroport de Sanaa, ainsi que la fermeture des
écoles jusqu'à nouvel ordre et des universités jusqu'à la mi-octobre. Le
plus grand marché de la capitale, le souk Ali Mohsen, est fermé depuis
trois jours, ce qui commence à affecter l'approvisionnement en fruits et
légumes, selon les habitants restés terrés chez eux.
Durant les combats, le campus d'une université a été touché par des
obus, de même qu'un hôpital. Le siège de la télévision publique, situé
dans la zone des combats, a été de nouveau samedi soir la cible de tirs,
provoquant la suspension pendant une heure des émissions des trois
chaînes de la télévision.
Les animateurs de ces stations ont indiqué à l'antenne qu'ils étaient la
cible de tirs nourris des rebelles. Ils ont appelé à l'aide en
indiquant que plusieurs employés avaient été blessés et que les rebelles
empêchaient les secours de les évacuer. Une partie du siège de
l'audiovisuel public a pris feu, selon des témoins. La reprise des
émissions s'est faite d'un autre siège des télévisions publiques, selon
des responsables. M. Hadi a, lors d'une rencontre avec des ambassadeurs
arabes, vu dans les tirs contre le siège de la télévision publique, qui
avait interrompu également vendredi brièvement ses émissions, et
d'autres installations publiques, l'illustration d'une "tentative de
coup d'État". Depuis plus d'un mois, les rebelles qui contrôlent la
région de Saada (nord) campent avec leurs partisans dans et autour de la
capitale pour réclamer l'éviction du gouvernement accusé de corruption,
un droit de regard sur la nomination des ministres et un accès à la
mer.
Soupçonnés de vouloir élargir leur zone d'influence dans le futur État
fédéral qui doit compter six provinces, les rebelles - dits Houthis -
apparaissent plus que jamais décidés à en découdre avec leur rival
d'Al-Islah qu'ils accusent d'avoir tenté de s'implanter dans leur fief, à
Saada. Ils cherchent aussi à capitaliser sur leur succès militaire pour
obtenir satisfaction complète à leurs demandes auprès du pouvoir qui
semble incapable, du moins pour le moment, à contenir leur offensive.
Les rebelles avaient rejeté en août une proposition du président Hadi
portant sur la nomination d'un nouveau Premier ministre et la réduction
d'une augmentation controversée des prix du carburant, deux de leurs
principales revendications.
L'émissaire de l'ONU, Jamal Benomar, qui négocie un cessez-le-feu, a
regagné vendredi soir Sanaa en provenance de Saada sans être parvenu à
obtenir un accord de trêve. "J'ai tenté de réduire l'écart entre les
deux parties et on est tombé d'accord sur un nombre de points pouvant
servir de base à un accord" de cessez-le-feu, a dit M. Benomar après
trois jours de discussions avec le chef de la rébellion, Abdel Malek
al-Houthi. Aucune indication n'a été donnée sur d'éventuelles nouvelles
négociations.
Le Yémen est englué dans la crise depuis le départ en février 2012 de
l'ancien président Ali Abdallah Saleh, après onze mois de contestations
de rue. Pays très pauvre de la Péninsule arabique, il fait aussi face à
l'agitation de séparatistes dans le Sud et à des violences endémiques
provoquées par al-Qaida. Les houthis sont issus du zaïdisme, une branche
du chiisme majoritaire dans le nord du Yémen, alors qu'à l'échelle
nationale, les sunnites sont prédominants.
(21-09-2014)
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