Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a cherché samedi à rallier
l'Egypte à la "guerre" que les Etats-Unis ont déclarée aux jihadistes de
l'Etat islamique (EI) qui sévissent en Irak et en Syrie.
Il y a peu de chances que l'influente armée égyptienne prenne part à
des opérations militaires de la coalition internationale que M. Kerry
est chargé de bâtir, mais Washington entretient depuis 35 ans une
relation militaire stratégique avec son allié, mastodonte du monde
arabe.
En visite au Caire, le chef de la diplomatie américaine a jugé que
l'Egypte était en "première ligne" dans la lutte "anti-terroriste", au
terme d'un marathon diplomatique qui l'a conduit à Bagdad, Amman, Jeddah
(Arabie saoudite) et Ankara.
M.
Kerry bouclait une mission régionale destinée à engranger les soutiens
pour cette coalition mondiale destinée, selon le président américain
Barack Obama, à "affaiblir" puis à "détruire" l'EI.
Après un entretien avec le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi,
John Kerry a souligné le rôle essentiel que pourrait jouer l'Egypte dans
le combat contre ces ultra-radicaux armés sunnites qui occupent des
parties de l'Irak et de la Syrie et se livrent à de multiples exactions.
"En tant que capitale intellectuelle et culturelle du monde musulman,
l'Egypte a un rôle crucial à jouer, en dénonçant l'idéologie que (l'EI)
diffuse", a déclaré M. Kerry lors d'une conférence de presse. Il a
insisté sur l'importance de la prestigieuse institution de l'islam
sunnite, Al-Azhar.
Washington souhaiterait en fait que les institutions religieuses
égyptiennes "se prononcent contre l'EI et en parlent dans les prêches du
vendredi" dans les mosquées, a expliqué un diplomate américain.
Dans son offensive diplomatique, John Kerry avait obtenu jeudi à Jeddah
l'engagement, éventuellement militaire, de dix pays arabes, dont
l'Arabie saoudite. Le Caire ne devrait en revanche pas jouer de rôle
militaire actif.
Mais M. Kerry a voulu flatter son allié.
Il l'a jugé "en première ligne dans la lutte contre le terrorisme, en
particulier contre les groupes extrémistes dans le Sinaï", en allusion
aux attaques d'organisations s'inspirant d'Al-Qaïda contre les forces de
sécurité dans cette péninsule de l'est égyptien.
Pour
aider l'Egypte dans cette "lutte anti-terroriste", le secrétaire d'Etat
a confirmé la livraison de dix hélicoptères de combat Apache. Le
dossier était bloqué depuis des mois en raison des "inquiétudes" de
Washington sur le mauvais bilan en matière de droits de l'homme du
pouvoir du président Sissi.
John Kerry avait été moins productif avec la Turquie. Il avait tenté
vendredi de convaincre Ankara de participer militairement à la
coalition, mais les Turcs redoutent de mettre en péril la vie de leurs
49 ressortissants retenus par les jihadistes dans le nord de l'Irak.
Après de longues hésitations, le président Obama, poussé à agir après la
décapitation par l'EI de deux journalistes américains enlevés en Syrie,
a exposé le 10 septembre sa stratégie contre l'EI. Il a annoncé une
extension de la campagne aérienne américaine en Irak, où 1.600
militaires américains seront déployés au total pour appuyer les forces
armées irakiennes, en termes d'équipements, de formation et de
renseignement.
M. Obama s'est aussi dit prêt à frapper l'EI en Syrie et s'est engagé à
doper l'aide militaire aux rebelles syriens modérés qui combattent à la
fois l'EI et le régime de Damas. Selon une ONG, ce dernier est en passe
de perdre au profit des rebelles le contrôle d'une deuxième province du
pays, celle de Qouneitra sur la partie du Golan non occupée par Israël.
Dans cette "guerre" contre l'EI, comme l'a formulé la Maison Blanche, le
général à la retraite John Allen, homme-clé des conflits en Irak et en
Afghanistan, a été chargé de coordonner la coalition.
Une première ébauche de cette alliance se dessinera lundi à Paris où se
tient une conférence internationale sur l'Irak et sur la lutte contre le
groupe extrémiste sunnite.
Arrivé
samedi soir à Paris, M. Kerry participera à cette réunion qui devrait
permettre à chacun de la vingtaine de pays présents "d'être beaucoup
plus précis sur ce qu'il peut ou veut faire" contre l'EI, a expliqué un
diplomate français
Allié du régime syrien, l'Iran, qui n'y a pas été invité, a affirmé
qu'il ne souhaitait de toute façon pas participer à une
"conférence-spectacle". John Kerry s'était opposé à la présence de
Téhéran.
Pour préparer cette conférence, le président français François Hollande
s'était rendu vendredi en Irak, promettant d'aider "encore davantage
militairement" ce pays, dont les troupes mal entraînées ne parviennent
pas à faire face à l'EI et bénéficient de l'aide des combattants kurdes
et chiites et des frappes américaines depuis plus d'un mois.
(14-09-2014 - Avec les agences de presse)
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