Le logiciel de navigation GPS Waze, devenu l'un des symboles de la
réussite israélienne dans le domaine des nouvelles technologies, agace
le maire de Jérusalem. Invoquant des raisons de sécurité, les
gestionnaires de cette application ont récemment modifié ses paramètres
pour faire en sorte que les itinéraires proposés évitent certains
quartiers palestiniens situés à l'est de la ville. Un sacrilège, aux
yeux de nombreux Israéliens qui défendent son caractère indivisible
depuis la «réunification» intervenue à l'issue de la guerre des
Six-Jours (1967). «J'ai prié les dirigeants de Waze de reconfigurer ces
paramètres et de ne pas transformer leur application en instrument
politique», a aussitôt réagi le maire, Nir Barkat.
Mis au point en 2008 par de jeunes entrepreneurs établis au nord de Tel
Aviv, le logiciel a été racheté en 2013 par Google, moyennant un
milliard de dollars, et téléchargé par plus de 70 millions d'usagers à
travers le monde. Dans sa version israélienne, la configuration par
défaut intègre certains réglages propres au contexte local. En
Cisjordanie occupée, les trajets proposés aux automobilistes évitent
ainsi les zones A et B sous contrôle de l'Autorité palestinienne, où les
citoyens israéliens ont interdiction de pénétrer. Les ressortissants
d'autres pays, libres de traverser ces zones, peuvent désactiver la
fonctionnalité.
«La loi, à Jérusalem-Est est-elle la même qu'à Hébron ou à Ramallah?
Ces limitations d'accès n'ont jamais suscité la moindre controverse
jusqu'à ce que les gestionnaires de Waze choisissent, récemment, de les
étendre à certains quartiers palestiniens de Jérusalem-Est. Selon le
quotidien Yediot Ahronot, ils auraient pris cette décision après que des
automobilistes israéliens, guidés vers ces secteurs, indiquent s'y être
sentis en danger. «Nous travaillons en contact avec la police
israélienne», justifie un porte-parole de la société, qui propose
désormais de fastidieux détours aux automobilistes pour éviter de
traverser les quartiers comme Silwan ou Wadi al-Joz, pourtant
limitrophes de la Vieille ville.
Les nouveaux paramètres, sitôt connus, ont provoqué des réactions
outrées au sein du conseil municipal. Arieh King, adjoint en charge de
la sécurité et cheville ouvrière de la colonisation juive dans les
quartiers palestiniens de Jérusalem-Est, a dénoncé une inacceptable
«partition» de la ville. «La loi, à Jérusalem-Est et dans les secteurs
qui bordent la Vieille ville, est-elle la même qu'à Hébron ou à
Ramallah?, interroge-t-il. Et peut-on admettre que la police y détermine
ainsi où des Juifs peuvent, ou ne peuvent pas, se déplacer?»
Cette mini-tempête illustre la fracture qui, 48 ans après sa conquête
par l'Etat hébreu, continue de traverser Jérusalem. L'annexion de sa
partie orientale, décidée de façon unilatérale en 1982, n'a jamais été
reconnue ni pas la majorité de la population palestinienne, ni par la
communauté internationale. Quelque 200 000 Juifs résident aujourd'hui à
Jérusalem-Est, pour l'essentiel dans de vastes quartiers de colonisation
ainsi que dans des enclaves établis au coeur de quartiers arabes. Ces
derniers, sous-équipés et délaissés par les politiques publiques, sont
régulièrement le foyer de tensions entre les habitants les forces de
l'ordre.
(29-08-2015 - Cyrille Louis, Le Figaro)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire