Le président égyptien Abdel Fatah al-Sissi a ratifié dimanche une
loi antiterroriste qui prévoit une amende très lourde pour les
journalistes qui rapporteraient des informations contredisant les
communiqués officiels en cas d'attentats.
Au lendemain de l'assassinat le 29 juin du procureur général
Hicham Barakat dans un attentat spectaculaire, toujours non
revendiqué, M. Sissi avait promis une législation plus dure "pour
lutter contre le terrorisme".
Cet attentat avait été suivi le 1er juillet par une série
d'attaques jihadistes de grande ampleur contre des militaires dans
la péninsule du Sinaï et l'armée avait été ulcérée par la
couverture médiatique de ces attaques.
Elle avait fait état de 21 soldats tués dans ces violences, mais
les médias avaient publié des bilans bien plus lourds, citant des
responsables de la sécurité.
La loi controversée, publiée au journal officiel, instaure une
amende pouvant aller de 200.000 à 500.000 livres égyptiennes
(entre 23.000 et 58.000 euros) pour toute personne diffusant ou
publiant de "fausses" informations sur des attentats ou des
opérations contre des combattants islamistes.
Les détracteurs de la loi estiment que ces amendes pourraient
contraindre des petites publications à fermer, et dissuader les
autres médias de travailler de manière indépendante.
Le gouvernement prévoyait initialement une peine de deux ans de
prison minimum. Il y avait renoncé face à la bronca des
journalistes.
En revanche, une clause a été ajoutée autorisant les tribunaux à
"empêcher les personnes condamnées à exercer leur profession
pendant une période ne pouvant pas excéder un an, si l'infraction
viole les principes de la profession". Le métier de journaliste
n'est pas spécifiquement mentionné.
Cette loi a ravivé la crainte que des journalistes se trouvent au
tribunal en raison de leur travail.
Trois journalistes de la chaîne qatarie Al-Jazeera ont été
condamnés en première instance en 2014 à des peines allant jusqu'à
10 ans de prison pour avoir "diffamé" le pays et soutenu les
Frères musulmans, l'organisation de l'ex-président islamiste
Mohamed Morsi, destitué par l'armée en 2013.
Ils ont obtenu d'être jugés à nouveau. Le verdict est attendu à la
fin du mois.
Selon des responsables du gouvernement, pour qu'un journaliste
soit condamné en vertu de la nouvelle loi, le texte exige que soit
prouvée l'intention de diffuser de fausses informations.
La loi préconise par ailleurs la peine de mort pour les personnes
coupables d'avoir créé, dirigé ou financé une organisation
"terroriste", et la prison pour celles jugées coupables de
promotion du terrorisme.
Depuis la destitution de M. Morsi, les groupes jihadistes ont
multiplié les attentats visant les forces de sécurité.
Les attaques ont tué des centaines de policiers et de soldats,
tandis que plus de 1.400 personnes, en majorité des pro-Morsi, ont
été tuées dans la répression des manifestations de l'opposition.
Des dizaines de milliers d'autres ont été arrêtés dont plusieurs
centaines condamnés à mort dans des procès de masse expéditifs,
qualifiés par l'ONU de "sans précédent dans l'histoire récente" du
monde.
Des dizaines de ces peines ont cependant été annulées par la Cour
de cassation. Egalement condamné à mort en juin, M. Morsi a fait
appel.
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