Alors que Mohammad Allan, détenu administratif depuis plus d’un an,
poursuit la grève de la faim entamée il y a deux deux mois, les
autorités de l’occupation sioniste ont de plus en plus de mal à gérer
son dossier : la division entre « politiques » et « sécuritaires »,
entre libéraux et fascistes, au sein de l’entité coloniale est de
nouveau sur le tapis. Les nombreuses manifestations de solidarité avec
le prisonnier, en Palestine et notamment près de la prison de Ascalan
organisées par les Palestiniens de 48, suscitent la panique dans la rue «
israélienne », panique largement reprise par les journaux sionistes.
Mohammad Allan est devenu le symbole de la lutte des prisonniers
palestiniens en lutte pour leur liberté.
Les prisons sionistes sont en ébullition. Des dizaines de prisonniers
palestiniens ont suivi le mouvement de grève, en solidarité avec
Mohammad Allan, et Shirine Issawi vient de le rejoindre. Les conseils
représentatifs des prisonniers, de plusieurs mouvements de la
résistance, discutent les moyens de développer la lutte. Les autorités
de l’occupation savent d’ores et déjà qu’ils doivent le libérer, car son
martyre, qui peut intervenir à tout moment, risque d’embraser non
seulement les prisons, mais toute la Palestine, et notamment dans la
partie occupée en 48.
La dernière proposition de l’appareil colonial est de déporter Mohammad
Allan, s’il arrêtait son mouvement de grève. « Déporter » ! Le mot est
lâché. Le rêve des sionistes, depuis qu’ils ont envahi le pays, au début
du siècle dernier. Rien que depuis l’Intifada al-Aqsa, en 2000,
l’occupation sioniste a déporté des centaines de Palestiniens : les
valeureux combattants de l’Eglise de la Nativité à Bethlehem (des
Brigades al-Aqsa, du mouvemen Fateh) ont été déportés vers la bande de
Gaza, des pays arabes ou étrangers, en application d’un accord dont
personne n’ose dévoiler les termes. Alors que la presse parlait de 10
ans de déportation, la date prévue pour leur retour est largement
dépassée, certains d’entre eux sont morts en exil, d’autres attendent la
rencontre de leurs familles et leur retour au pays. Mais ni l’Autorité
palestinienne, ni les sionistes, ni le mouvement Fateh, n’ouvrent leur
dossier.
Déportés également, ce sont des prisonniers qui furent libérés suite à
l’accord d’échange en octobre 2011 contre le soldat Shalit. Si certains
furent déportés dans la bande de Gaza, d’autres le furent vers la
Turquie, le Qatar et la Syrie principalement. Déportés également, des
prisonniers qui ont mené la grève de la faim et qui ont « accepté »
leur déportation en échange de leur libération, comme Hana’ Shalabi.
Déportés également, des citoyens palestiniens d’al-Quds, qui luttent
pour rester dans leur ville, mais la fureur de la colonisation et du
nettoyage ethnique bat son plein, et dans l’ordre sioniste, il n’y a pas
de place dans al-Quds pour les députés de la ville, membres du Hamas,
alors qu’ils y sont nés et appartiennent à des familles enracinés dans
la ville, comme il n’y pas de place pour les Maqdissis, ciblés par les
lois coloniales faites sur mesure pour leur déportation.
La déportation ou l’expulsion des Palestiniens hors de Palestine est le
but ultime des sionistes. Cela n’a pas changé depuis le premier congrès
sioniste à la fin du XIXème siècle. Après l’expulsion massive exécutée
en 1947-48 de plus de 700.000 Palestiniens, lors de la création de
l’entité coloniale en 1948, expulsion facilitée par les dizaines de
massacres commis dans les villes et les villages de Palestine, les
sionistes ont poursuivi leur objectif : vider la Palestine de ses
habitants autochtones et s’installer à leur place. Les autorités de
l’occupation ont poursuivi la déportation-expulsion des Palestiniens
depuis cette date, à petites doses, pour ne pas susciter des remous dans
le monde et l’opinion internationale. Ils ont failli commettre une
expulsion massive en 1956, lors de la guerre tripartite, en exécutant le
massacre de Kfar Qassem, en octobre, assassinant de sang-froid des
dizaines de paysans palestiniens, des familles entières qui retournaient
à leur village après une journée de travail dans les champs. Ils
espéraient que le massacre de Kfar Qassem susciterait un départ «
volontaire » des Palestiniens de la région du « Triangle », au centre du
pays, une des trois régions encore peuplée de Palestiniens. Mais les
Palestiniens ont compris et affirment jusqu’à présent : être massacré
plutôt que d’être expulsé et vivre en exil, loin de sa terre et de son
peuple.
C’est également le mot d’ordre des Palestiniens dans leur ensemble. Les
massacres se sont poursuivis, parce que les Palestiniens résistent et
veulent continuer à vivre dans leur pays : les multiples massacres
commis par les sionistes dans la bande de Gaza au cours des dernières
années, les tueries sauvages commises en Cisjordanie, les massacres
commis dans les camps de réfugiés au Liban (camp de Bourj al-Shamali en
1982), et leur destruction (camp de Nabatyeh) relèvent d’un génocide
perpétré sur la longue durée, plutôt qu’un « sociocide » cher aux
chercheurs et académiciens occidentaux et « israéliens », qui réservent
le terme de « génocide » aux juifs, et aux juifs seulement. Pour
l’appareil colonial sioniste et les colons qui ont envahi la Palestine,
l’expulsion-déportation des Palestiniens ferait l’affaire, mais ces
derniers résistent. Non seulement ils ont résisté mais ils ont poursuivi
leur lutte à partir des camps de réfugiés : des massacres organisés et
ciblés les rejetteraient loin du pays et aboliraient l’objectif du
retour qu’ils se sont fixés.
Aujourd’hui, croyant pouvoir stopper la lutte héroïque de Mohammad
Allan, c’est à nouveau sa déportation qu’ils proposent. Mais
apparemment, ils ne savent pas à qui ils ont affaire. Mohammad Allan ne
craint pas le martyre. Sa famille, son mouvement (Mouvement du Jihad
islamique en Palestine) et son peuple ont lancé le défi : la liberté ou
le martyre, c’est la devise de la lutte palestinienne.
Rim al-Khatib
Mardi, 18 août 2015
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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