Les militantes saoudiennes qui réclament le droit de conduire ont décidé
d’éviter la confrontation avec les autorités samedi en poursuivant leur
campagne mais sans faire du 26 octobre une date symbolique comme prévu,
à la suite de pressions intensives du pouvoir.
Plusieurs militantes ont indiqué avoir reçu des appels du ministère de
l’Intérieur leur demandant de ne pas prendre le volant samedi.
Le porte-parole du ministère avait rappelé jeudi qu’il était interdit
pour les femmes de conduire dans le royaume. "Nous appliquerons la loi à
l’égard des personnes qui contreviennent" à cette interdiction,
avait-il prévenu.
"Par précaution et par respect pour les mises en garde du ministère de
l’Intérieur, et afin d’empêcher que la campagne soit exploitée par
d’autres groupes, nous demandons aux femmes de ne pas conduire demain
(samedi) et de changer l’initiative du 26 octobre en campagne ouverte
pour la conduite des femmes", a déclaré à l’AFP une activiste, Najla
Al-Hariri.
"La date était uniquement symbolique. Les femmes ont commencé à conduire
avant le 26 octobre et continueront de le faire après ce jour", a
déclaré pour sa part une autre militante, la blogueuse Eman Nafjan.
Par ironie, certaines militantes ont affiché sur leur compte Twitter le
31 novembre comme nouvelle date de la campagne.
La campagne étant menée via les réseaux sociaux par des femmes et
n’ayant pas de direction apparente, aucune directive claire n’a été
lancée concernant la journée de samedi.
"Comme il est clair que les autorités ne veulent pas de regroupement à
une date déterminée, nous tentons de calmer les choses et de montrer que
la campagne se poursuit, sans date fixe", a expliqué la militante
Mayssa Al-Amoudi.
Mais des femmes pourraient décider de braver l’interdit.
Les organisatrices de la campagne ont souligné depuis le début qu’elles
n’appellent à aucun rassemblement ou manifestation, et qu’elles
demandent aux femmes de prendre individuellement le volant, pour éviter
le précédent de 1990, lorsqu’un groupe de femmes ayant défilé au volant
de voitures à Ryad avaient été arrêtées.
Plus d’une cinquantaine de femmes ont déjà répondu à l’appel au cours
des deux dernières semaines, mettant en ligne des vidéos les montrant au
volant.
Le site de la campagne, oct26driving.com, a été piraté vendredi, selon des militantes.
Une pétition mise en ligne sur ce site en septembre et demandant le
droit des femmes à conduire avait recueilli plus de 16.000 signatures,
avant que le site soit bloqué il y a deux semaines.
Vendredi, le porte-parole du ministère de l’Intérieur, cité par le
quotidien Al-Hayat, a également prévenu que ceux qui soutiennent la
campagne sur les réseaux sociaux s’exposaient à des sanctions allant
jusqu’à cinq ans de prison.
L’Arabie saoudite, royaume ultra-conservateur régi par une stricte
application de la loi islamique, est le seul pays au monde où les femmes
n’ont pas le droit de conduire.
Les femmes ont besoin de l’autorisation d’un tuteur mâle —père, frère ou mari— pour voyager, travailler ou même se marier.
Dans son prêche du vendredi, l’imam de la Grande mosquée de la Mecque,
cheikh Oussama Al-Khayat, a mis en garde contre "les slogans contenant
des revendications pouvant menacer la paix sociale", dans une allusion à
la campagne des femmes.
Pour sa part, Amnesty International a estimé que "les autorités
saoudiennes invoquent le prétexte selon lequel c’est la société qui
impose l’interdiction et affirment que la loi ne fait pas de
discrimination à l’égard des femmes, mais elles continuent à harceler et
intimider les femmes activistes".
Dans un communiqué, l’organisation de défense des droits de l’Homme a
déploré "les coups de téléphone et les menaces sur internet, les
interdictions arbitraires de voyage, et le fait de forcer les activistes
et les membres de leurs familles à signer des engagements à ne pas
conduire", ainsi que "le recours aux médias contrôlés par l’Etat pour
discréditer les activistes".
Le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU a également appelé l’Arabie
saoudite à mettre fin à la discrimination des femmes, parmi d’autres
abus.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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