Russes et Américains, qui soutiennent des camps adverses dans la guerre
en Syrie, sont convenus d'un plan visant à instaurer une trêve dans ce
pays déchiré par cinq ans de guerre, qui pourrait déboucher sur une
coopération militaire contre les rebelles jihadistes.
Au terme d'une journée marathon à Genève vendredi, le secrétaire d'Etat
américain John Kerry et son homologue russe Sergueï Lavrov ont fixé le
début de la trêve à lundi matin. Elle coïncidera avec le début de l'Aïd
el-Adha, la fête musulmane du sacrifice.
"Les Etats-Unis et la Russie annoncent un plan qui, nous l'espérons,
permettra de réduire la violence" et d'ouvrir la voie "à une paix
négociée et à une transition politique en Syrie", a déclaré M. Kerry,
flanqué de M. Lavrov, selon lequel Moscou "a mis au courant le
gouvernement syrien de cet accord et il est prêt à le respecter".
L'accord prouve que Russes et Américains ont pu trouver un terrain
d'entente malgré de profonds différends dans leur approche du conflit
qui a provoqué la mort de plus de 290.000 personnes et la fuite de
millions d'autres depuis mars 2011. Moscou est un allié du régime du dictateur syrien Bashar al-Assad, Washington soutient les rebelles
modérés.
Les deux puissances cherchent à relancer un plan de paix adopté fin 2015
par la communauté internationale et qui comprend un cessez-le-feu
durable, de l'aide humanitaire conséquente et un processus de transition
politique entre le régime syrien et l'opposition modérée.
Or, a détaillé Sergueï Lavrov, le plan russo-américain annoncé vendredi
"permet de mettre en place une coordination efficace pour lutter contre
le terrorisme, avant tout à Alep, et permet de renforcer le
cessez-le-feu. Tout cela crée les conditions pour un retour au processus
politique".
Alep, la grande ville du nord, connaît une situation humanitaire
effroyable. Les quartiers Est de la ville et principal front du conflit,
contrôlés par les rebelles, sont assiégés pour la deuxième fois en deux
mois.
"Il n'y plus rien, ni légumes ni sucre, et tout est cher", a confié à
l'AFP Omar al-Bik, un habitant tentant de faire ses courses dans le souk
d'Al-Hellok, au coeur du quartier de Tariq al-Bab, dans Alep.
A ce propos, John Kerry a réclamé un accès "sans entrave et durable" aux
zones assiégées et difficiles d'accès, y compris Alep, pour l'aide
humanitaire.
S'il a salué l'accord, Staffan de Mistura, l'envoyé spécial de l'ONU, a
dit "attendre de toutes les parties qu'elles facilitent les efforts des
Nations unies visant à livrer de l'aide humanitaire aux populations qui
en ont besoin, y compris celles qui vivent dans les zones assiégées".
"Les Nations unies espèrent que la volonté politique qui a mené à cet accord est durable", a-t-il ajouté.
Un autre volet, militaire celui-ci, est également compris dans l'accord
russo-américain. Si la trêve dure "une semaine", les forces américaines
accepteront de collaborer en Syrie avec l'armée russe, a expliqué John
Kerry, une coopération réclamée de longue date par Moscou et sur
laquelle les deux pays travaillent depuis des mois.
"Les Etats-Unis acceptent de faire un pas supplémentaire car nous
pensons que la Russie et mon collègue (Sergueï Lavrov, ndlr) ont la
capacité de faire pression sur le régime Assad pour mettre fin à ce
conflit et venir à la table des négociations", a-t-il dit.
M. Lavrov a toutefois reconnu qu'il n'était pas en mesure de garantir "à 100%" la réussite de ce nouveau plan.
En pratique, outre la lutte contre l'organisation Etat islamique (EI),
les deux parties sont convenues de renforcer leur action contre toutes
les forces jihadistes, notamment le Front Fateh al-Cham, l'ex-Front
al-Nosra lié à al-Qaïda.
La coopération passera en particulier, si la trêve tient, par un partage
d'informations pour des frappes aériennes, ce à quoi Washington s'était
jusqu'à présent refusé.
M. Lavrov a annoncé la création d'un "centre conjoint" russo-américain
destiné à coordonner ces frappes, "dans lequel des militaires et des
représentants des services secrets russes et américains s'occuperont des
questions pratiques: distinguer les terroristes de l'opposition
modérée".
Mais, dans un communiqué, le Pentagone a souligné que les engagements
inscrits dans l'accord "doivent être totalement respectés avant toute
coopération militaire potentielle".
(10-09-2016)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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