Une haute juridiction palestinienne a décidé jeudi de stopper le
processus pour les premières élections organisées en Cisjordanie et à
Gaza depuis 10 ans, illustrant l'apparente incapacité des factions
rivales à surmonter leur hostilité.
Il n'était pas immédiatement clair s'il s'agissait d'un simple coup d'arrêt, d'un report ou d'une annulation pure et simple.
Les municipales prévues le 8 octobre étaient censées être le premier
scrutin depuis 2006 à se tenir à la fois en Cisjordanie et dans la bande
de Gaza.
Ces deux territoires ne sont pas seulement séparés géographiquement par
Israël, mais aussi politiquement par des années d'animosité entre le
Fatah laïc, force palestinienne dominante dans la Cisjordanie sous
occupation israélienne, et le Hamas islamiste, qui dirige sans partage
Gaza soumise au blocus par Israël.
La consultation était donc très attendue comme un important indicateur
des rapports de force politiques, mais aussi à cause des profondes
incertitudes sur leurs résultats et leurs conséquences.
Cependant les divergences sont si profondes que la tenue effective du
scrutin était dès le départ largement mise en doute, y compris après
l'annonce de la date du 8 octobre et après le début du processus
électoral.
Jeudi à Ramallah, en Cisjordanie, le président de la Cour suprême Hicham
al-Hatou a conforté les pessimistes en ordonnant l'arrêt de ce
processus sans annoncer de nouvelle échéance.
L'avocat Nael Al-Houh a expliqué avoir saisi la Cour suprême pour deux
raisons essentielles, la première étant qu'aucun vote n'était prévu à
Jérusalem, la deuxième que des décisions étaient prises à Gaza en dehors
de l'autorité légitime quant à la validation des candidatures.
Les Palestiniens savaient pertinemment ne pouvoir organiser d'élections à
Jérusalem-Est, la partie orientale de la ville annexée et occupée par
Israël et dont les Palestiniens veulent faire la capitale de l'Etat
auquel ils aspirent. Israël considère tout Jérusalem comme sa capitale
indivisible et n'y reconnaît d'autre autorité que la sienne.
Les derniers jours ont mis en outre en lumière les querelles prévisibles
de compétence entre Ramallah, siège de l'Autorité palestinienne
présidée par Mahmud Abbas et dominée par le Fatah, et la bande de Gaza,
dirigée sans partage par le Hamas.
Un tribunal contrôlé par le Hamas a ainsi annulé cinq listes du Fatah
dans le secteur de Khan Younès (sud de la bande de Gaza) parce "qu'elles
enfreignaient la loi électorale et ne remplissaient pas les conditions
nécessaires", a dit une source judiciaire gazaouie.
Nael Al-Houh a vu dans de telles décisions la preuve d'un système
parallèle inacceptable selon lui. "Il n'y a qu'une seule loi et une
seule autorité judiciaire en Palestine, pas deux".
Le Hamas a jusqu'alors refusé de céder le pouvoir à Gaza, pris en 2007 au prix de combats meurtriers avec le Fatah.
Un an plus tôt, le Hamas remportait les législatives, dernières
élections à s'être tenues conjointement à Gaza et en Cisjordanie. Mais
le groupe considéré comme "terroriste" par Israël, les Etats-Unis ou
l'Union européenne avait été privé de sa victoire.
L'arrêt de la Cour suprême "est une décision politique", a dit à l'AFP
un porte-parole du Hamas à Gaza, Sami Abou Zouhri. "Nous rejetons la
décision d'annuler les élections et nous appelons tout le monde à faire
de même".
Depuis 2007, l'Autorité palestinienne, entité intérimaire créée en 1994,
préfigurant l'appareil d'un futur Etat indépendant, n'exerce plus son
pouvoir, à partir de Ramallah, que sur la Cisjordanie. Le Fatah et le
Hamas restent à couteaux tirés, en dépit des efforts de réconciliation
et la formation, en 2014, d'un gouvernement d'union qui a périclité.
Le Parlement ne siège plus. Le mandat de M. Abbas a expiré en 2009, mais court toujours faute de présidentielle.
En 2012, des municipales avaient été organisées, mais le puissant mouvement islamiste armé Hamas les avait interdites à Gaza.
Ce groupe avait causé la surprise en acceptant de participer aux municipales cette année.
L'organisation de ce scrutin passait pour un pari risqué de la part de
M. Abbas, étant donné le danger d'une victoire du Hamas y compris en
Cisjordanie. Elle avait été largement présentée comme une erreur de
calcul tablant sur une non-participation du Hamas.
Les divisions palestiniennes sont considérées comme un obstacle majeur à
un règlement du conflit avec Israël -la charte du Hamas appelle à la
destruction de l'Etat d'Israël- et au développement des Territoires.
(08-09-2016 - Avec les agences de presse)
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