Des
policiers à l'endroit où un écrivain controversé, Nahed Hattar, a été
assassiné le 25 septembre 2016 devant un tribunal d'Amman (Afp)
Un écrivain jordanien controversé, Nahed Hattar, a été tué par balles dimanche devant un tribunal d'Amman où il était jugé pour avoir publié une caricature considérée comme offensante envers de l'islam, un assassinat qualifié de "crime odieux" par le gouvernement.
Selon une source des services de sécurité, l'assassin est un habitant d'Amman de 49 ans. Il a tiré trois balles sur Hattar au moment où ce dernier montait l'escalier du tribunal à Abdali (centre d'Amman), où il devait comparaître devant les juges.
Touché à la tête, Hattar, 56 ans, est décédé à son arrivée à l'hôpital, selon la même source.
Selon des témoins, l'assassin présumé, un homme barbu, portait une thobe (tunique traditionnelle) de couleur grise. Il a tiré sur la victime avant de se rendre aux policiers présents devant le tribunal.
Le chroniqueur chrétien avait été arrêté le 13 août après avoir partagé sur son compte Facebook une caricature montrant un jihadiste barbu sur un lit au paradis entouré de deux femmes s'adressant à Dieu comme un simple serviteur. Il lui demandait d'apporter un verre de vin, des noix de cajou et l'ordonnant d'emmener quelqu'un pour nettoyer la chambre, avant de lui faire remarquer qu'il devait frapper à la porte avant d'entrer.
La caricature avait pour titre: "Dieu des Dawaech", en allusion aux jihadistes de Daech (acronyme en arabe du groupe Etat islamique).
Hattar a été accusé par les autorités d'"incitation aux dissensions confessionnelles" et d'"insulte" à l'égard de l'islam qui interdit toute représentation de Dieu.
Hattar, un opposant de gauche connu aussi pour son soutien au régime syrien de Bachar al-Assad, avait été libéré début septembre sous caution et le procureur général jordanien avait imposé un black-out sur cette affaire.
Après avoir provoqué un tollé sur les réseaux sociaux, l'écrivain avait supprimé la caricature, dont il n'est pas l'auteur, de son compte.
Hattar avait expliqué sur sa page Facebook que la caricature se moquait des "terroristes et de la manière dont ils imaginent Dieu et le paradis, et qu'elle ne porte en aucun cas atteinte à Dieu".
Le Premier ministre, Hani al-Malki avait ordonné au ministre de l'Intérieur Salam Hammad, de convoquer l'écrivain et d'engager des procédures judiciaires à son encontre après la publication de cette caricature.
Selon un proche de la victime, la famille compte refuser la dépouille de Nahed Hattar, exigeant au préalable que la lumière soit faite sur son assassinat.
Le gouvernement jordanien a dénoncé un "crime odieux" promettant de poursuivre et juger l'assassin.
"La loi sera appliquée fermement sur celui qui a commis ce crime et le gouvernement frappera avec une main de fer toute personne qui osera profiter de ce crime pour répandre un discours de la haine", a déclaré le porte-parole du gouvernement et ministre de l'Information Mohamad Momani.
Les Frères musulmans, la première force d'opposition en Jordanie, et Dar al-Ifta, la plus haute autorité religieuse du pays, ont condamné l'assassinat de Hattar.
"La religion musulmane est innocente de ce crime odieux", a indiqué Dar al-Ifta dans un communiqué, appelant les Jordaniens à l'unité et à combattre "le terrorisme et la sédition".
Son assassinat est intervenu quelques jours après la tenue dans le royaume d'élections législatives, marquées par le retour au Parlement des Frères musulmans.
La Jordanie est membre actif de la coalition internationale conduite par les Etats-Unis, qui combat le groupe EI en Irak et en Syrie.
Le royaume qui craint depuis plusieurs années une contagion de la menace jihadiste sur son territoire, a été le théâtre cet été de deux attentats, l'un contre les services de renseignement (5 morts) et l'autre, revendiqué par Daesh, contre les gardes-frontières (7 morts).
(25-09-2016)
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