Sous la houlette du nouveau chef de gouvernement, la Turquie tend la
main à la Russie et s'efforce de normaliser ses relations diplomatiques
avec Israël, un autre ex-allié, dans le souci de sortir de son
isolement.
Le Premier ministre Binali Yildirim a envoyé récemment des signaux d'une
inflexion de la politique extérieure turque, après avoir remplacé en
mai Ahmet Davutoglu, architecte d'une diplomatie agressive qui, selon
des analystes, a apporté à la Turquie plus d'ennuis que de bénéfices.
Quand M. Davutoglu a été poussé vers la sortie par le président Recep
Tayyip Erdogan, Ankara était plongé dans une crise sans précédent avec
la Russie, avait fortement restreint ses relations avec Israël et
l'Egypte tout en prouvant son impuissance à se débarrasser en Syrie du
régime de Bashar al-Assad.
Aujourd'hui, un rapprochement de la Turquie avec ses voisins régionaux
est d'autant plus crucial que les relations d'Ankara avec l'Union
européenne traversent une zone de fortes turbulences. M. Erdogan a
menacé jeudi d'organiser un référendum pour demander aux Turcs s'ils
souhaitent vraiment un jour faire partie de l'UE.
Pour Soner Cagaptay, directeur du Programme de recherche sur la Turquie
au Washington Institute, la politique extérieure de Davutoglu a fait que
la Turquie s'est retrouvée "presque sans aucun ami" au Moyen-Orient, à
l'exception du Qatar et du gouvernement régional du Kurdistan irakien.
"J'ai l'impression que la mission du nouveau Premier ministre turc est
de lancer une offensive de charme pour réparer les dégâts diplomatiques
laissés derrière lui par le Premier ministre congédié Davutoglu", a-t-il
dit à l'AFP.
Binali Yildirim a envoyé la semaine dernière des signaux d'apaisement en
direction de plusieurs capitales avec lesquelles les relations se sont
tendues ces dernières années, traduisant un souci de retour à l'ancienne
politique turque de "zéro problèmes avec les voisins".
"Israël, la Russie, l'Egypte? Il ne peut pas y avoir d'inimitié
permanente entre ces pays qui bordent la Méditerranée (ou) la mer
Noire", a déclaré M. Yildirim.
Pour Aykan Erdemir, chercheur à la Fondation pour la défense des
démocraties, la "politique extérieure irresponsable" de la Turquie a
représenté un "échec embarrassant". Ankara, "réalisant l'effet
catastrophique de l'isolement" doit changer de pied pour "essayer
d'entrer dans des relations d'échange avec les pays voisins", dit-il à
l'AFP.
La liste des relations dégradées ou compliquées d'Ankara est longue, à
commencer par les Etats-Unis comme l'UE qui s'inquiètent de sa dérive
autoritaire et liberticide et de ses discours anti-occidentaux. Mais sur
au moins trois fronts, ce pays membre-clé de l'Otan essaie de faire des
progrès.
Avec Israël, six ans après l'assaut de commandos israéliens contre un
bateau d'aide humanitaire pour Gaza sous blocus qui ont tué dix Turcs,
Ankara s'apprête à normaliser ses relations.
Le chef de la diplomatie Mevlut Cavusoglu a évoqué cette semaine la
"forte possibilité" d'un round final avant la fin du mois, quand des
journaux turcs et israéliens parlaient d'une rencontre dès dimanche pour
annoncer la prochaine normalisation.
Avec l'Egypte, les relations se sont dégradées après la condamnation par
M. Erdogan du "coup d'Etat" des militaires ayant chassé du pouvoir son
allié des Frères musulmans Mohamed Morsi. Mais Ankara souhaiterait se
réconcilier, sous l'oeil bienveillant de l'Arabie saoudite, avec le
président Abdel Fattah al-Sissi.
M. Yildirim a expliqué que les divergences ne devaient pas empêcher les
relations économiques et commerciales, qui sont d'ailleurs une raison
majeure pour Ankara de renouer avec ses voisins -- hydrocarbures ou
tourisme en tête.
La crise avec la Russie, qui a entraîné une chute brutale des arrivées
de touristes russes en Turquie, pourrait s'apaiser après le message
envoyé par M. Erdogan à son homologue Vladimir Poutine à l'occasion de
la fête nationale russe. Il s'agissait du premier contact depuis que
deux F-16 turc ont abattu un avion russe ayant violé l'espace aérien
turc au-dessus de la frontière avec la Syrie fin 2015.
Mais Ankara a refusé de produire les excuses exigées par Moscou. "S'il y
a bien une chose qu'Erdogan est incapable de faire, c'est de
s'excuser", dit M. Cagaptay.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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