Un rappeur tunisien, condamné en première instance à de la prison
ferme, a été relaxé jeudi en appel d’accusations d’outrage à la police
et libéré, mettant fin à une saga judiciaire dénoncée comme une atteinte
à la liberté d’expression.
"Le tribunal de Grombalia (50 km au sud de Tunis) a décidé de relaxer
Weld El 15", de son vrai nom Ala Yacoubi, a indiqué son avocat, Me Ghazi
Mrabet, dont le client avait été condamné à quatre mois de prison ferme
en première instance début décembre.
Quelques heures après la décision du tribunal, le rappeur a été libéré,
a-t-on appris auprès de sa famille. "Ala a été libéré et s’est dirigé
directement à Sousse (140 km au sud de Tunis) pour se reposer", a dit sa
mère à l’AFP.
"Ce jugement prouve qu’une partie de la justice est indépendante, je
salue ce genre de verdicts", s’est réjoui l’avocat.
Weld El 15 était détenu depuis sa condamnation le 5 décembre à la prison de La Mornaguia, en banlieue de Tunis.
Les débuts de cette affaire remontent au mois d’août lorsque Weld El 15
et un autre rappeur, Klay BBJ, avaient été interpellés sans ménagement à
l’issue d’un concert dans la station balnéaire de Hammamet, au sud de
Tunis.
Les deux artistes avaient été condamnés quelques jours plus tard par
contumace à 21 mois de prison ferme alors qu’ils n’avaient été prévenus
ni du procès ni même de leur inculpation pour outrage à des
fonctionnaires et atteinte aux bonnes moeurs.
Klay BBJ s’était rendu quelques semaines plus tard. Condamné à six mois
de prison lors d’un deuxième procès, il a finalement été relaxé
mi-octobre en appel.
Après plusieurs mois de cavale, Weld El 15 s’était finalement rendu le 5
décembre, et avait été condamné le même jour à quatre mois de prison.
Les deux musiciens ont toujours nié avoir chanté des chansons insultant
la police et avoir adressé des gestes obscènes aux agents présents lors
de ce concert. Weld El 15 a une nouvelle fois clamé son innocence devant
le juge jeudi.
Il a aussi de nouveau accusé les forces de l’ordre de l’avoir brutalisé lors de son interpellation.
Neuf mois de poursuites
Les déboires judiciaires du chanteur avaient commencé en mars, avant le
concert d’Hammamet, lorsqu’il avait été condamné une première fois à
deux ans de prison notamment pour outrage à la police dans une chanson
diffusée en ligne intitulée "les policiers sont des chiens".
Après de multiples péripéties judiciaires et quelques semaines en
prison, il avait finalement vu sa peine réduite à six mois avec sursis
en juillet dernier.
La relaxe prononcée jeudi met fin à l’ensemble de cet imbroglio
judiciaire, qui avait été vivement dénoncé par les organisations de
défense des droits de l’Homme en Tunisie, mais aussi en Occident.
"C’est une bonne nouvelle, à travers ce verdict nous apprenons avec joie
que la lutte menée depuis neuf mois a amené la magistrature tunisienne à
réaliser l’enjeu que représente ce genre de procès", a souligné Thameur
Mekki, qui préside le comité de soutien aux rappeurs poursuivis en
justice.
Depuis la révolution de janvier 2011 qui a chassé le régime de Zine El
Abidine Ben Ali, la liberté d’expression a gagné un terrain considérable
en Tunisie.
Néanmoins, aucune réforme d’ampleur du système judiciaire ou des forces
de l’ordre n’a été entreprise et le code pénal, très répressif, n’a pas
non plus été amendé.
Dès lors, plusieurs artistes, blogueurs et journalistes ont été
poursuivis et certains emprisonnés pour des délits relevant, selon les
ONG, de la liberté artistique ou d’expression.
Un jeune chômeur de Mahdia, Jabeur Mejri purge ainsi depuis près de deux
ans une peine de sept ans et demi de prison pour avoir diffusé sur
internet des textes et dessins insultant l’Islam.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire