Dans une rue dévastée par l’attentat meurtrier ayant visé dans la
nuit un QG de police à Mansoura dans le nord de l’Egypte, les habitants
ne cachent pas leur colère : pour eux les coupables tout désignés sont
les Frères musulmans.
"Les Frères musulmans veulent revenir au pouvoir à tout prix, même par
le sang, la force et la destruction", lance Waël Hamdy, 50 ans, à l’AFP,
au milieu d’immeubles aux façades effondrées par le souffle de la
puissante explosion d’une voiture piégée.
Des bulldozers s’activaient mardi matin pour nettoyer le secteur ravagé.
Des rues entières sont recouvertes de débris et inondées en raison de
la rupture de canalisations. Barres de fer et blocs de béton y sont
entassés au milieu de carcasses de voitures calcinées, aux fauteuils
tachés de sang pour certaines.
Depuis début juillet, l’Egypte est profondément divisée entre partisans
du président islamiste Mohamed Morsi destitué par l’armée et des
nouvelles autorités dirigées de facto par les militaires qui mènent une
sanglante répression des islamistes qui s’est soldée par plus d’un
millier de morts et des milliers d’arrestations à ce jour.
Après la mort dans la nuit de lundi à mardi de 14 personnes, en majorité
des policiers, dans l’un des attentats les plus meurtriers en Egypte
depuis la destitution du chef d’Etat issu des Frères musulmans, les
habitants de Mansoura dans le delta du Nil ont clairement choisi leur
camp.
Près de Waël Hamdy, des dizaines de policiers se sont déployés, casqués,
bottés et brandissant d’imposants boucliers transparents. Ils forment
un infranchissable cordon de sécurité autour du QG de la police du
chef-lieu de la province de Daqahleya, à une centaine de kilomètres au
nord du Caire.
Autour d’eux, la foule continue ses imprécations vengeresses. "Le
peuple, l’armée et la police, tous ensemble !", crie-t-elle. "Le peuple
veut l’exécution des Frères musulmans !", entend-on encore.
’Ils sont nos ennemis’
"On va leur apprendre les bonnes manières, on va montrer aux Frères
musulmans ce que c’est que la vraie colère !", menace la foule alors que
derrière elle, les bâtiments du théâtre et du conseil municipal portent
les stigmates de l’attentat. Certains brandissent des photo-montages du
président destitué habillé de la tenue rouge des condamnés à mort en
scandant des slogans sur les 14 "martyrs".
Les Frères musulmans ont eu beau condamner l’attentat à la voiture
piégée, pour les résidents qui ont senti leurs maisons trembler à
l’aube, leur responsabilité ne fait pas de doute.
Pour Mervat Saïd, une avocate de 45 ans, "personne n’a intérêt à ce que
de tels actes se produisent, à part les Frères musulmans". "Ils se
vengent du peuple et de la police", dit-elle encore à l’AFP. "Que tous
ceux qui connaissent des Frères musulmans les dénoncent ! Ce sont des
terroristes ! Ils sont nos ennemis", s’époumone de son côté Hanem
Hassan, la voix étranglée par la colère.
Un peu plus loin, des commerçants contemplent, hagards, leurs magasins
détruits, l’intérieur totalement dévasté par le souffle de l’explosion
provoquée par une charge de plusieurs dizaines de kilogrammes
d’explosifs embarquée dans une voiture piégée.
Depuis l’éviction du seul président jamais élu démocratiquement du pays,
les nouvelles autorités dirigées de fait par l’armée mènent une
implacable répression des manifestants pro-Morsi qui continuent à
défiler quasi-quotidiennement, bravant une répression qui a fait à ce
jour plus d’un millier de morts et des milliers d’arrestations.
"A partir d’aujourd’hui, ils ne pourront plus faire aucune
manifestation !", prévient Mohamed Tag, un jeune habitant qui harangue
la foule. "On va s’occuper d’eux !", promet-il.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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