Une conférence des pays donateurs pour les réfugiés s'ouvrait jeudi à
Londres avec l'espoir de progresser au moins sur le plan humanitaire, au
lendemain de la suspension des pourparlers de paix sur la Syrie à
Genève.
Des dirigeants du monde entier, dont le Premier ministre britannique
David Cameron, la chancelière allemande Angela Merkel et le secrétaire
général de l'ONU Ban Ki-moon, devaient tenter dans la capitale
britannique de lever neuf milliards de dollars en faveur des 18 millions
de Syriens victimes de la guerre, avec l'ambition d'endiguer la crise
des réfugiés qui, du Moyen-Orient à l'Europe, pèse sur les pays
d'accueil.
Le gouvernement britannique a d'ores et déjà promis 1,2 milliard de
livres (1,74 milliard de dollars) supplémentaire d'ici 2020 pour aider
les victimes du conflit en Syrie.
"Nous avons besoin de plus d'argent pour répondre à cette crise et nous en avons besoin maintenant", a déclaré David Cameron.
Pour répondre au drame syrien, les donateurs devront se montrer plus
généreux que lors de la précédente conférence, en 2015, où seuls 3,3
milliards avaient été récoltés sur les 8,4 milliards réclamés.
"C'est inacceptable: réunir suffisamment de fonds pour assurer les
besoins vitaux des réfugiés est le minimum qu'on puisse attendre de
nous", a souligné M. Cameron.
La conférence, à laquelle doit également participer le secrétaire d'Etat
américain John Kerry, s'ouvrait quelques heures après la suspension par
l'ONU des pourparlers inter-syriens de paix à Genève, théoriquement
jusqu'au 25 février.
Sur le terrain, le régime de Damas, appuyé par les frappes de son allié
russe, effectuait au même moment une importante percée militaire à Alep
(nord), rendant vaines toutes discussions sur le front diplomatique
selon l'opposition.
Paris et Washington ont dénoncé ces frappes, et ont lié le naufrage du processus de Genève à la situation sur le terrain.
"La poursuite de l'assaut des forces du régime syrien -- renforcées par
les frappes russes -- contre des zones tenues par l'opposition (...) a
clairement montré le désir de chercher une solution militaire plutôt que
de permettre une solution politique", a accusé John Kerry.
La France a elle aussi condamné "l'offensive brutale menée par le régime
syrien, avec le soutien de la Russie". Son ministre des Affaires
étrangères Laurent Fabius a jugé que les "circonstances dramatiques" sur
le terrain "privaient de sens" les discussions de Genève "auxquelles ni
le régime de Bachar al-Assad ni ses soutiens ne souhaitent visiblement
contribuer de bonne foi, torpillant ainsi les efforts de paix".
L'armée syrienne a encore resserré l'étau jeudi autour des rebelles dans
la ville d'Alep, ex-capitale économique du pays, après avoir coupé leur
principale route d'approvisionnement, marquant un nouveau succès pour
le régime depuis l'intervention de Moscou dans le conflit fin septembre.
L'offensive des troupes, aidées par des miliciens et des combattants du
Hezbollah libanais, a été appuyée par d'intenses bombardements russes
--plus de 320 frappes depuis lundi, selon l'Observatoire syrien des
droits de l'Homme (OSDH). Et le chef de la diplomatie russe Serguei
Lavrov a martelé qu'il n'était pas question pour Moscou de cesser ses
bombardements avant d'avoir "réellement vaincu" les groupes
"terroristes".
Après six jours de discussions avec le régime d'une part, l'opposition
de l'autre, de tergiversations et de rendez-vous annulés ou reportés,
l'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura a annoncé une "pause" dans le
processus de discussions sur la Syrie, censé enclencher une solution
politique pour mettre un terme au conflit.
"J'ai conclu, après une première semaine de discussions préparatoires,
qu'il y a encore du travail à faire, non seulement par nous, mais par
toutes les parties prenantes" à la crise syrienne, a déclaré M. de
Mistura, renvoyant la balle dans le camp des grandes puissances du
Groupe international de soutien à la Syrie, qui doivent se réunir le 11
février à Munich.
Le diplomate onusien s'est refusé à parler "d'échec" et a déclaré avoir
fixé la date du 25 février pour une reprise des discussions.
Mais celle-ci semble tout sauf certaine.
L'opposition syrienne "ne reviendra pas à Genève tant que ses demandes
sur le volet humanitaire ne seront pas satisfaites", a déclaré son
coordinateur Riad Hijab lors d'une conférence de presse à Genève. Le
Haut comité des négociations (HCN), qui regroupe des politiques et des
représentants des groupes armés, réclame l'arrêt des bombardements
russes, la libération de détenus, et la levée des sièges d'une quinzaine
de villes en Syrie, où, selon l'ONU, près de 500.000 personnes vivent
coupées d'aide humanitaire et médicale.
De son côté, Damas a rejeté l'échec du processus sur l'opposition.
"Depuis son arrivée, la délégation de l'opposition a refusé de prendre
part à des discussions sérieuses avec l'émissaire de l'ONU", a déclaré
l'ambassadeur syrien à l'ONU Bachar al-Jaafari, qui dirigeait la
délégation du régime.
Lui aussi a également laissé entendre que la reprise des discussions le 25 février n'était pas acquise.
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