Sa maison ayant été détruite cet été dans les bombardements d'Israël
contre la bande de Gaza, c'est dans une tente dressée près des vestiges
du bâtiment que Thabet célèbre l'Aïd al-Adha, l'une des plus grandes
fêtes musulmanes.
Aux premières heures des célébrations, qui dureront jusqu'à mardi,
Thabet et son fils aîné Naïm distribuent des douceurs et échangent les
traditionnels voeux avec leurs voisins et proches du quartier de
Zeitoun, dans la ville de Gaza.
Les deux hommes tentent de mettre du baume au coeur aux habitants du
quartier malgré les 50 jours de guerre cet été qui ont fait plus de
2.100 morts côté palestinien, en large majorité des civils, et plus de
70 côté israélien, dont 66 soldats.
Mais pour les proches des victimes, la fête vient surtout raviver la
douleur. Dans le cimetière de Cheikh Radwan au nord de la ville de Gaza,
des dizaines de personnes sont venues déposer des fleurs sur les tombes
des disparus.
Parmi
eux, Majd al-Dhadouh, 9 ans, est assis près de la sépulture de son père
Charban, un chef militaire du Jihad islamique tué dans un raid aérien
contre une tour de Gaza.
"A l'occasion des fêtes, tout le monde se réjouit mais nous, notre père
est au paradis", sanglote l'enfant, se remémorant les célébrations des
années précédentes.
"Charban était tout dans notre vie, il était notre fierté", explique la
mère de Majd. "On essaye de se réjouir, mais cette fête est vraiment
difficile. Comment oublier sa mort ?".
"On ne sent pas que c'est l'Aïd (...) mais on essaye de mettre de la
joie dans le coeur des enfants", lance Mohamed Sakr, un habitant de
Chajaya, une banlieue à l'est de Gaza.
Installé sur une chaise en bois, Mohamed offre dates et café aux personnes venues le saluer.
Il reçoit près des ruines de sa maison, l'une des 20.000 à avoir été
rasées dans les bombardements dans l'enclave palestinienne selon l'ONU.
A Chajaya, quartier durement touché par les frappes, des centaines de
personnes ont prié sur les décombres d'une mosquée, tandis que des
enfants se rassemblaient dans une rue délabrée autour d'un boucher
pratiquant le rite du sacrifice sur une vache et deux moutons, offerts
par une association caritative.
Cette tradition reproduit, selon la coutume, le geste du patriarche
Abraham, qui avait reçu un mouton à sacrifier après avoir accepté la
demande divine de tuer son propre fils. La viande doit ensuite être
distribuée aux personnes dans le besoin.
Pour de nombreux habitants de la bande de Gaza, où s'entassent 1,8
million de Palestiniens coincés entre l'Egypte, Israël et la
Méditerranée, les repas de fête traditionnellement copieux sont devenus
inabordables.
"La situation économique est désespérée", raconte Karam Batsch qui
dirige une organisation ayant rassemblé des fonds pour acheter des
bêtes.
Plusieurs factions palestiniennes distribuent également de la nourriture
aux personnes ayant perdu des proches ou leur maison durant la guerre,
précise-t-il.
Les
célébrations de l'Aïd ont aussi été l'occasion de discours dont celui
d'Ismaïl Haniyeh, l'ex-Premier ministre du Hamas à Gaza, qui a insisté
sur l'importance de la reconstruction.
Selon l'estimation la plus optimiste, celle du Conseil économique
palestinien pour le développement et la reconstruction, il faudra au
moins cinq ans pour reconstruire Gaza, en cas de levée totale du blocus
imposé depuis 2006 par Israël.
"Nous allons continuer à développer notre force et les moyens de la
résistance afin de libérer notre terre", a également assuré M. Haniyeh
devant des milliers de Gazaouis rassemblés pour la prière dans un stade
de Gaza.
"Nous
célébrons (l'Aïd) malgré les destructions. L'ennemi ne pourra pas se
réjouir d'avoir gâché notre joie", a pour sa part insisté Khodr Habib,
un responsable du Jihad islamique, dans un autre discours.
(04-10-2014 - Assawra avec les agences de presse)
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