mercredi 3 février 2016

Syrie: L'ONU met en garde contre un "échec" du processus de Genève

L'émissaire spécial de l'ONU sur la Syrie, Staffan de Mistura, a mis en garde mardi soir contre un "échec" des discussions de Genève, après des débuts poussifs marqués par la difficulté de réunir les belligérants.
Alors que M. de Mistura avait déclaré officiellement lancées les discussions, la journée de mardi a offert une image de confusion totale, illustrant le fossé entre diplomatie et réalité sur le terrain.
D'un côté, le régime syrien affirme ne pas avoir de partenaire pour négocier, tandis que l'opposition exige des mesures immédiates en faveur des civils et accuse la communauté internationale d'être "aveugle" face à la tragédie.
Staffan de Mistura a fini par mettre en garde contre un "échec" à Genève, "toujours possible, particulièrement après cinq ans d'une guerre horrible". "Mais s'il y un échec cette fois-ci (...), il n'y aura plus d'espoir", a-t-il déclaré à la Radio télévision suisse.
La délégation du régime de Damas s'est entretenue plus de deux heures avec M. de Mistura, qui avait rencontré lundi l'opposition. Mais, à la sortie de l'entretien, l'ambassadeur syrien à l'ONU Bachar al-Jaafari, chef de la délégation, a douché les espoirs d'une entrée rapide dans la négociation.
"Nous sommes encore dans la phase préparatoire (...). Nous attendons toujours de savoir avec qui nous allons négocier et sur quel ordre du jour", a-t-il déclaré, répétant que la partie adverse n'était "pas sérieuse" et "ne traitait pas les questions comme des politiciens professionnels".
La délégation du Haut comité des négociations (HCN), qui comprend des politiques et des représentants de groupes armés, est fustigée par Damas et ses alliés, qui considèrent comme "terroristes" certains de ses membres.

'Nouveau massacre'
Le régime joue à Genève une partie plus confortable que l'opposition, écartelée entre sa volonté de ne pas apparaître comme celle qui ferait dérailler un processus de paix et son refus d'entrer dans une négociation sans amélioration concrète sur le terrain.
Un dilemme dont elle peine à sortir, alors que les bombardements se poursuivent sans relâche et que la situation humanitaire s'aggrave.
Les représentants du HCN ont d'ailleurs boudé la deuxième réunion prévue mardi avec M. de Mistura. "Nous avons présenté nos exigences (humanitaires). Il n'y a aucune raison de répéter la même chose", a déclaré une porte-parole, Farah Atassi.
Mais, selon le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Guennadi Gatilov, cette rencontre devrait avoir lieu mercredi ou jeudi et les membres de l'opposition pourront alors "expliquer leur position et annoncer la composition de leur délégation aux pourparlers".
Devant le Palais des Nations, où le sol avait été tapissé de photos insoutenables d'enfants syriens tués dans des bombardements ou disparus, l'opposition a accusé Damas et son allié russe de commettre un "nouveau massacre" à Alep (nord) et Homs (centre).
Les forces de Damas ont avancé mardi près d'Alep, appuyées par l'aviation russe qui a réalisé 270 frappes depuis lundi matin, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
"Un nouveau massacre est en train de se produire en Syrie et personne ne fait rien, ne dit rien, la communauté internationale est totalement aveugle", a accusé un autre porte-parole, Salem al-Meslet.
"Ce que les forces de Damas et leurs alliés sont en train de nous dire, c'est que le processus politique de Genève ne vaut pas un clou à leurs yeux", a renchéri une responsable de l'opposition, Bassma Kodmani, réitérant des exigences humanitaires avant toute négociation : levée des sièges, libération de détenus et arrêt des bombardements contre les civils.
De Rome, le secrétaire d'Etat américain John Kerry a appelé l'opposition à rester en dépit des bombardements russes intenses, affirmant qu'un cessez-le-feu pourrait être rapidement mis en oeuvre si toutes les parties acceptaient de négocier. "L'espoir, l'attente est que cela ne prenne pas trop de temps", a-t-il ajouté.
Les discussions intersyriennes, dont le cadre a été fixé par l'ONU en décembre, visent à mettre en place une autorité de transition avant l'organisation d'élections à la mi-2017.

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