Les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) se sont rapprochés vendredi
du joyau archéologique de Palmyre dans le désert syrien, suscitant
l'inquiétude de l'Unesco, et ont pris le contrôle de la majeure partie
de Ramadi, capitale provinciale dans l'ouest de l'Irak.
Les extrémistes sunnites se trouvent désormais à "un kilomètre" de
Palmyre, cité antique célèbre pour ses colonnades torsadées et ses tours
funéraires, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme
(OSDH), qui rapporte des combats autour de cette ville de la province de
Homs (centre).
L'ONG a indiqué vendredi soir à l'AFP que l'EI avait exécuté 23 civils,
dont neuf enfants, dans un village au nord de Palmyre, précisant que des
membres de la famille d'employés du gouvernement figuraient parmi les
personnes assassinées. La veille, l'EI avait exécuté 26 civils "pour
collaboration avec le régime".
A Beyrouth, la directrice générale de l'Unesco Irina Bokova s'est dit
"très inquiète" de l'avance jihadiste sur Palmyre, inscrit en 1980 sur
la liste du patrimoine mondial de l'Humanité. "Nous ne pouvons pas
rester silencieux (...) C'est notre responsabilité d'alerter le Conseil
de sécurité (de l'ONU) pour qu'il prenne des décisions fortes", a-t-elle
dit.
Mme Bokova a souligné l'importance de lutter "contre cette stratégie de
supprimer (...) notre mémoire commune" menée par le groupe extrémiste,
qui s'est vanté ces derniers mois d'avoir détruit ou endommagé de grands
sites archéologiques, notamment ceux de Nimroud et Hatra en Irak.
Le
directeur des Antiquités et des musées syriens, Maamoun Abdelkarim, a
appelé à une mobilisation internationale pour empêcher la "catastrophe
internationale" que serait la destruction de Palmyre alors que la
Coalition de l'opposition syrienne en exil a mis en garde contre le
"crime contre la civilisation" que pourrait y commettre l'EI, tout en
accusant le régime de ne pas assez protéger ce site vieux de plus de
2.000 ans.
L'armée syrienne a dépêché des renforts "et l'aviation bombarde les
environs de Tadmor", nom de la cité en arabe, a affirmé à l'AFP Rami
Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. Selon l'ONG, les combats ont fait
138 morts --73 soldats et 65 jihadistes-- depuis que l'EI a pris
mercredi une série de postes de l'armée à l'extérieur de la ville.
Dans le nord de la Syrie, l'explosion d'un réservoir de mazout visé lors
d'un raid de l'aviation du régime à Menbej a tué 14 personnes, dont
deux femmes et quatre enfants, selon l'OSDH.Le conflit syrien,
qui dure depuis quatre ans, a fait plus de 220.000 morts et a poussé 3,9
millions de personnes à fuir le pays.
Le président américain Barack Obama a réaffirmé vendredi sa conviction
qu'il n'y aurait pas de "solution militaire" à ce conflit.
"La situation en Syrie est déchirante mais elle est extrêmement
complexe", a déclaré M. Obama dans un entretien à la chaîne
d'information en continu Al-Arabiya. Interrogé sur la possibilité que le
conflit soit réglé avant la fin de son mandat, en janvier 2017, il a
répondu: "Probablement pas".
En visite au Liban, pays qui accueille 1,1 million de réfugiés syriens
selon l'ONU, le chef de la diplomatie allemande Frank-Walter Steinmeier a
assuré Beyrouth du soutien de l'Allemagne.
"Nous ne laisserons pas le Liban seul dans le pétrin", a-t-il dit selon
la traduction de ses propos en arabe, ajoutant que "60% des enfants
syriens scolarisés dans les écoles libanaises sont pris en charge par
l'Allemagne", pays "qui reçoit le plus grand nombre de réfugiés syriens
dans l'Union européenne".
Dans une tribune publiée vendredi dans le New York Times, deux
intellectuels américains ont proposé d'installer 50.000 réfugiés syriens
à Detroit pour repeupler cette ville du nord des Etats-Unis en perte de
vitesse.
A plusieurs centaines de kilomètres à l'est de Palmyre, l'EI s'est
emparé vendredi en Irak du principal complexe gouvernemental de Ramadi,
s'assurant ainsi le contrôle quasi-total de la capitale de la province
sunnite d'Al-Anbar.
"Daech (un acronyme en arabe de l'EI) occupe à présent le complexe
gouvernemental à Ramadi et a hissé son drapeau sur le QG de la police
pour Al-Anbar", a indiqué à l'AFP un haut responsable de la police sous
couvert de l'anonymat. Le groupe extrémiste sunnite EI a également
annoncé dans un communiqué la prise du QG.
Une chute de Ramadi, à 100 km de Bagdad, serait également un revers
majeur pour le gouvernement irakien qui avait promis que la reconquête
d'Al-Anbar serait le prochain objectif de ses forces.
Après une réunion d'urgence avec le ministre des la Défense et des hauts
responsables, le Premier ministre Haider al-Abadi a promis vendredi
soir lors d'une intervention à la télévision d'Etat de renverser la
situation. "Comme dans toute guerre, il y a des revers ça et là, mais
nous sommes déterminés à défaire Daech," a-t-il martelé. Dans la soirée,
le ministère de l'Intérieur a annoncé le début d'une contre-offensive à
Ramadi et l'envoi de renforts.
Dans ces circonstances, le vice-président américain Joe Biden a assuré
vendredi le Premier ministre irakien de l'intensification de
l'assistance des Etats-Unis à l'Irak dans le cadre de ses "efforts en
cours pour vaincre l'EI", a indiqué la Maison Blanche dans un
communiqué.
Lors d'une conversation téléphonique, "le vice-président a assuré le
Premier ministre de l'assistance sécuritaire continue et accélérée des
Etats-Unis pour affronter l'EI", a rapporté la Maison Blanche, une aide
qui inclut la livraison d'armes lourdes, de munitions et de vivres aux
forces irakiennes.
L'offensive jihadiste sur Ramadi a été lancée jeudi, le même jour que la
diffusion, pour la première fois depuis six mois, d'un enregistrement
audio du chef de l'EI, Abou Bakr al-Baghdadi.
Cet enregistrement a été diffusé alors que des informations de presse
ont récemment indiqué que Baghdadi avait été grièvement blessé en Irak
dans un raid de la coalition internationale menée par les Etats-Unis.
(16-05-2015
- Assawra)
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