vendredi 8 mai 2015

Israël/Palestine : Les témoignages accablants de soldats israéliens lors de l'agression sur Gaza

Une organisation israélienne donnant la parole à des soldats a publié lundi un document accusant l'armée israélienne d'avoir causé un nombre sans précédent de victimes civiles en recourant à la force sans discrimination pendant la guerre de Gaza en 2014.
L'armée israélienne a répondu avoir demandé à Briser le silence de lui fournir des preuves ou des informations sur les témoignages publiés sous le couvert de l'anonymat, pour qu'elle puisse enquêter. Mais l'organisation a refusé selon l'armée, qui a clairement remis en question ses intentions.
Dans le document compilant les témoignages de plus de soixante officiers et soldats ayant participé à la guerre de juillet-août 2014, Briser le silence dénonce l'hypothèse de travail de l'armée selon laquelle, à la suite de ses frappes préparatoires et de ses avertissements aux civils, les zones où se déployaient ses soldats avaient été désertées par les civils, "faisant de chacun se trouvant dans la zone une cible légitime". "Le principe directeur de l'armée qui prône le risque minimum pour nos troupes, y compris aux dépens de civils innocents, ainsi que les efforts déployés pour dissuader et intimider les Palestiniens ont causé de nombreuses victimes dans la population et des dégâts sans précédent aux infrastructures civiles", écrit Briser le silence, qui a déjà publié à l'occasion de précédents conflits des témoignages de soldats.
L'ONU vient pour sa part de publier un rapport affirmant qu'au moins 44 Palestiniens ont été tués dans des locaux onusiens du fait des agissements israéliens pendant la guerre à Gaza. Le conflit a coûté la vie à 2 200 Palestiniens, dont 1 500 civils selon l'ONU, et 73 personnes côté israélien, dont 67 soldats.
Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU est censé lui rendre en juin un rapport distinct, et les Palestiniens réclament que les dirigeants israéliens soient poursuivis devant la Cour pénale internationale. La justice militaire israélienne, qui mène ses propres enquêtes, vient de prononcer ses premières inculpations contre trois soldats soupçonnés de pillage.
Dans un témoignage recueilli par Briser le silence, un soldat d'infanterie affirme que "les règles d'engagement dispensées aux soldats sur le terrain consistaient à ouvrir le feu, ouvrir le feu partout [...]. Le postulat de départ était qu'à partir du moment où nous entrions [dans la bande de Gaza pour la phase terrestre de l'opération, NDLR], quiconque osait montrer sa tête était un terroriste".
Un soldat raconte que deux femmes marchant dans un verger avaient été repérées puis tuées simplement parce qu'elles étaient trop près des lignes israéliennes. Après inspection des corps, il s'est avéré qu'elles n'étaient pas armées. "Elles ont quand même été listées comme terroristes. On leur avait tiré dessus, alors évidemment elles devaient être des terroristes", affirme le soldat amer.
Le document pointe du doigt la responsabilité confiée à des commandants inexpérimentés confrontés à des instructions ambiguës ; il parle de maisons démolies simplement parce qu'elles présentaient un risque théorique. L'organisation fait aussi état d'agressions, de pillages, de racisme et de vandalisme aux dépens des civils palestiniens. Elle dit que les pratiques militaires ont évolué au cours du conflit, non pas en fonction de contraintes militaires mais "d'intérêts politiques et diplomatiques". La conduite de la guerre "suscite de graves doutes sur la morale" de l'armée israélienne, dit le document.
L'armée a réaffirmé son engagement à enquêter "de la manière la plus sérieuse possible" sur toutes informations "crédibles" relatives aux agissements de ses soldats. Mais, a-t-elle estimé, le refus de Briser le silence de partager ses informations rend "impossibles" des investigations sur les faits qu'elle évoque. Cette attitude "indique que, contrairement à ce qu'elle prétend, cette organisation n'est pas motivée par l'intention de corriger les méfaits qu'elle dit avoir découverts, nous ne sommes donc pas en mesure de répondre à ses allégations", poursuit-elle.

(07-05-2015)

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