Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a accusé dimanche les
États-Unis de faire du chantage à la Russie pour qu’elle soutienne une
résolution contraignante à l’ONU contre la Syrie, et reproché à
l’Occident d’être aveuglé par l’idée d’un changement de régime dans ce
pays. Dans une interview à la chaîne russe Pervyi Kanal, le ministre des
Affaires étrangères a vertement critiqué l’attitude des Occidentaux, au
moment où les tractations diplomatiques s’intensifient en vue d’une
résolution à l’ONU sur le désarmement chimique de Damas.
L’adoption de cette résolution bute sur l’inscription ou non du texte
sous le chapitre VII de la Charte des Nations unies qui prévoit des
mesures coercitives allant de sanctions économiques à l’usage de la
force, en cas de non-respect par la Syrie de ses engagements. "Nos
partenaires américains commencent à nous faire du chantage en disant :
si la Russie ne soutient pas une résolution en vertu du chapitre VII au
Conseil de sécurité de l’ONU, nous arrêterons de travailler à
l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques" (OIAC), a
déclaré Sergueï Lavrov dans cette interview qui doit être diffusée
dimanche soir à Moscou et dont le script est disponible sur le site du
ministère des Affaires étrangères.
Selon lui, l’OIAC est "sur le point de prendre une décision" sur la
Syrie, mais le processus est menacé par la "position arrogante de
certains partenaires occidentaux". "Ils ont besoin du Chapitre VII, qui
prévoit en cas de violation des lois internationales des mesures
coercitives, y compris des sanctions et la possibilité de recourir à la
force", a-t-il dit. Le chef de la diplomatie russe estime que
Washington, Paris et Londres ont une démarche contraire à l’accord sur
le désarmement chimique de la Syrie, obtenu avec son homologue américain
John Kerry à Genève le 14 septembre.
"Nos partenaires sont désormais aveuglés par leur objectif idéologique
de changement de régime (en Syrie)", a-t-il estimé. "Tout ce qu’ils
disent, c’est que Bashar el-Assad doit partir." "Ils ne veulent pas
reconnaître qu’ils se sont encore une fois trompés : comme ils se sont
trompés en Libye en bombardant le pays et en le laissant au bord du
chaos ; comme ils se sont trompés en Irak en faisant la même chose et en
menant en plus une opération terrestre, laissant le pays dans une
situation extrêmement difficile, où des dizaines de personnes meurent
chaque jour dans des attentats", a-t-il énuméré.
"Le seul intérêt pour eux est de prouver leur supériorité", a-t-il
encore fustigé. Or, si le régime syrien tombe et que les rebelles
arrivent au pouvoir, "il n’y aura plus d’État laïque" en Syrie, a averti
Sergueï Lavrov, affirmant qu’"entre deux tiers et trois quarts" des
rebelles étaient des "djihadistes". Il a ajouté que la Russie était
prête à envoyer des troupes en Syrie dans le cadre d’une présence
internationale pour sécuriser le travail des experts sur les sites
d’armes chimiques : "Nous sommes prêts à affecter nos militaires, la
police militaire, pour participer à ces efforts."
Le ministre russe a également contesté l’affirmation du président Assad
selon laquelle le programme de désarmement coûterait un milliard de
dollars. "À Genève, nous avons discuté du coût éventuel de ce programme.
Les chiffres étaient beaucoup moins importants", a-t-il ajouté. Il a
enfin rejeté l’idée selon laquelle la Russie était désormais responsable
du programme de démantèlement de l’arsenal chimique syrien.
"Je voudrais préciser que nous ne sommes pas le garant du désarmement
chimique en Syrie", a-t-il dit, ajoutant que Moscou avait seulement
permis que Damas accepte d’adhérer à la convention sur l’interdiction
des armes chimiques sans aucune clause. "Maintenant la Syrie est l’un
des signataires de ce document juridiquement contraignant. C’est la
raison pour laquelle, désormais, c’est toute la communauté
internationale qui est garante du respect par la Syrie de ses
obligations", a-t-il souligné.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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