Après des semaines d’intenses tractations, la Russie et les Etats-Unis
sont parvenus jeudi à l’ONU à un accord sur un texte encadrant la
destruction de l’arsenal chimique du régime syrien de Bachar al-Assad.
Cette résolution, qui pourrait être adoptée dès vendredi soir, constitue
une percée diplomatique majeure. Depuis le début du conflit syrien en
mars 2011, le Conseil de sécurité n’a jamais réussi à se mettre d’accord
sur un texte, Moscou et Pékin ayant opposé leur veto à trois reprises.
"Il s’agit d’une avancée très significative avec un Conseil de sécurité
qui agit, de façon unie, pour imposer des obligations légales et
contraignantes à la Syrie pour la première fois", a réagi Samantha
Power, ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU.
Le projet de résolution, dont l’AFP a obtenu une copie, prévoit la
possibilité pour le Conseil de prononcer des sanctions à l’encontre du
régime Assad si le plan de désarmement chimique n’est pas respecté.
Cependant, le texte ne précise pas quelles sont les mesures envisagées
et n’impose pas de sanctions automatiques. En cas de violation des
engagements, il faudrait une deuxième résolution, ce qui laisse à
Moscou, allié de Damas, un droit de regard et une possibilité de
blocage.
Ce texte a été débattu jeudi soir lors d’une réunion des 15 membres du
Conseil de sécurité. Le vote, à un niveau ministériel, est prévu
vendredi à 20H00 (00H00 GMT), a indiqué la mission de la France auprès
de l’ONU sur son compte Twitter.
"J’espère que ce message sera entendu et compris à Damas", a déclaré Mark Lyall Grant, ambassadeur britannique à l’ONU.
Avant un vote vendredi soir, il faudra obtenir un feu vert de
l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) au plan de
démantèlement mis au point le 14 septembre à Genève par les Russes et
les Américains.
Pour le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, ce texte "marque
un pas en avant" et "reprend les exigences" formulées par la France.
De son côté, M. Assad a réaffirmé dans un entretien à la chaîne
vénézuélienne Télésur que son régime ne poserait "pas d’obstacles" au
démantèlement de son arsenal chimique, soulignant que son pays se
considérait "généralement comme engagé par toutes les conventions" qu’il
signait.
La Russie s’est dite prête à se joindre aux efforts internationaux pour surveiller les sites où seront détruites ces armes.
Sur le terrain, des experts de l’ONU ont commencé de nouvelles enquêtes
sur des allégations d’utilisation d’armes chimiques, après celle du mois
dernier qui avait conclu à l’utilisation de gaz sarin à une large
échelle près de Damas, sans pointer du doigt les responsables.
Washington, qui avait fait état de 1.500 morts, a accusé le régime
d’être derrière cette attaque.
Six experts de l’ONU "ont commencé à travailler aujourd’hui", a indiqué à
l’AFP un responsable de l’ONU, sans préciser où s’était rendue
l’équipe, dirigée par Aake Sellström. Ce responsable a affirmé que les
experts seraient en Syrie "pour quelques jours".
Mais selon un rapport confidentiel américano-russe cité jeudi soir par
le Washington Post et présenté à la Maison Blanche par des experts en
armement, l’arsenal chimique syrien est en grande partie "inutilisable"
en l’état et pourrait être détruit plus rapidement que prévu. Pour ces
experts, cet arsenal comprend plus de 1.000 tonnes d’armes chimiques,
dont 300 de gaz moutarde.
L’attaque chimique du 21 août s’était produite dans la région de la
Ghouta où, selon l’opposition, sont actuellement bloqués "1,7 million
d’habitants, dont plus de la moitié sont des enfants".
"Il n’y a ni électricité, ni eau et les produits alimentaires de base
sont rares (...) Il s’agit d’une politique de punition collective menée
par le régime", a dénoncé la Coalition de l’opposition dans un
communiqué.
La Ghouta est un des principaux bastions de la rébellion dans la région de Damas.
Les troupes du régime continuent de bombarder quotidiennement les
bastions rebelles à travers le pays. Jeudi, après un mois relativement
calme, les violents raids ont repris sur les quartiers du Vieux Homs
(centre), assiégé depuis plus d’un an par l’armée, selon des militants.
A Raqa, des combattants de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL,
jihadistes), qui contrôle la majorité de cette ville du Nord, ont
incendié jeudi des statues et des croix dans deux églises, et détruit la
croix du clocher de l’une d’elles, selon l’Observatoire syrien des
droits de l’Homme.
Plusieurs lieux de culte chrétiens et musulmans ont été attaqués depuis
le début de la révolte contre le régime en mars 2011, qui s’est
transformée au fil des mois en guerre civile ayant fait plus de 110.000
morts et plus de deux millions de réfugiés.
Selon le bureau de coordination humanitaire de l’ONU (OCHA), la
situation sanitaire continue de se dégrader en Syrie, avec la
destruction des hôpitaux, la raréfaction des médecins et le manque de
médicaments.
Plus de deux millions de Syriens ont fui dans les pays limitrophes et
environ six millions d’entre eux ont été déplacés à l’intérieur du pays,
toujours selon l’ONU.
Les ministres des cinq grandes puissances (Etats-Unis, France, Royaume
uni, Chine, Russie) doivent se retrouver vendredi soir à New York avec
le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon et son médiateur en Syrie
Lakhdar Brahimi.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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