Dimanche en début d'après-midi, la présidence a fait savoir que BCE
s'exprimerait sur toutes les chaînes de télévision à 20 h 45. Six jours
après l'attentat qui a tué douze membres de la garde présidentielle, six
jours après l'entrée d'un couvre-feu drastique qui court de 21 heures à
5 heures dans le Grand Tunis (2,6 millions d'habitants répartis sur
quatre gouvernorats), six jours après l'instauration de l'état d'urgence
dans tout le pays pour une durée de trente jours, six jours enfin après
que le terrorisme a frappé au cœur de la capitale, la parole
présidentielle était attendue. Si la nouvelle Constitution a donné le
pouvoir à l'Assemblée des représentants du peuple, le symbole de
Carthage demeure puissant. Et c'est BCE qui au soir de l'acte revendiqué
par Daech était intervenu pour annoncer la batterie de mesures
sécuritaires. À 20 h 45, l'homme a surpris en évoquant la situation au
sein de son ancien parti (il en a démissionné après sa victoire
électorale, se devant d'être le président de tous les Tunisiens). La
crise d'adolescence que vit Nidaa Tounes fragilise l'action politique
depuis la rentrée. "La patrie avant le parti", a lancé, façon coup de
semonces à l'égard des 32 députés frondeurs, le vieux briscard de la vie
politique tunisienne. La scission en cours du bloc parlementaire a
mobilisé toutes les ressources humaines au pouvoir, du président de
l'ARP Mohamed Ennaceur au ministre-chef de cabinet d'Essebsi, Ridha
Belhaj. Sans succès. Son intervention a duré 17 minutes. Onze ont été
dédiées à Nidaa Tounes, cinq à la paix sociale, une minute quarante-sept
au terrorisme.
Une paix sociale pour le Nobel de la paix
Le propos présidentiel a tenu en trois points : besoin d'un parti uni,
nécessité d'une paix sociale (de grandes grèves étaient prévues faute
d'un accord sur les salaires du secteur privé) entre l'Ugtt et l'Utica
et ce afin de pouvoir lutter contre le terrorisme. La date du 10
décembre hante les esprits. À Oslo, on remettra le prix Nobel de la paix
aux quatre organisations qui ont mené le dialogue national au deuxième
semestre 2013 afin de mettre sur pieds un gouvernement de technocrates.
Parmi le quatuor : le syndicat Ugtt et le patronat réuni sous le sigle
Utica. Les deux partenaires se sont violemment heurtés lors des
négociations salariales dans le secteur privé. Au point qu'un
secrétaire-général adjoint de l'Ugtt évoque de faire Nobel à part depuis
le 20 octobre, date du limogeage de Mohamed Salah Ben Aissa. L'intérim
est effectué par le ministre de la Défense qui a fort à faire sur le
front du terrorisme et de la frontière avec la Libye. Les discussions
sont en cours avec les partis alliés (les islamistes d'Ennahda au
premier rang, les libéraux d'Afek Tounes et l'UPL de l'homme d'affaires
Slim Riahi). Un processus qui peut prendre du temps, il avait fallu
plusieurs semaines à Habib Essid pour former son équipe. La Tunisie vit
son septième jour d'état urgence. Et le Grand Tunis a connu sa sixième
nuit de couvre-feu. Huit heures durant lesquelles tout déplacement est
interdit. La mesure est appliquée avec fermeté. Des contrevenants ont
été placés en garde à vue.
(30-11-2015 - Benoît Delmas)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire