Israéliens et Palestiniens enterraient leurs morts vendredi au lendemain
d'une des journées les plus meurtrières de la vague de violences qui
déjoue les schémas sécuritaires israéliens et semble s'installer dans la
durée.
Trois Israéliens, un Américain et un Palestinien ont été tués jeudi dans
deux attentats anti-israéliens commis par des Palestiniens à Tel-Aviv,
en Israël, et en Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par
Israël depuis 1967.
Les deux auteurs des attaques ont été arrêtés.
Depuis le 1er octobre, les attentats anti-israéliens, les heurts entre
jeunes Palestiniens et soldats de l'État hébreu et les agressions
mutuelles entre Palestiniens et colons israéliens ont fait 103 morts,
selon un décompte de l'AFP: 86 côté palestinien (dont un Arabe
israélien), 15 côté israélien ainsi qu'un Américain et un Ethiopien.
Après quelques jours d'apparent apaisement, la journée de jeudi a fait
voler en éclats ce que le quotidien Israel Hayom appelle "l'illusion
d'un calme tendu".
Les responsables israéliens de la sécurité disent depuis un moment se préparer à des mois de violences.
Les analystes trouvent dans les évènements de jeudi des motifs
d'inquiétude supplémentaires. Tel-Aviv, la capitale économique et
socialement libérale d'Israël, relativement distante des foyers de
tension, n'avait pas connu d'attaque depuis le 8 octobre.
Les dizaines de milliers de Palestiniens qui vont quotidiennement
travailler en Israël avec un permis en bonne et due forme passaient pour
représenter un danger mineur. Or, Israël a été frappé de découvrir que
le Palestinien qui a mortellement poignardé à Tel-Aviv le rabbin Aharon
Yesayev, 32 ans, et Reuven Aviram, 51 ans, possédait un tel
laissez-passer, qu'il est marié et père de cinq enfants.
- "Lutte acharnée" -
L'écrasante majorité des dizaines d'attaques a jusqu'alors été menée à
l'arme blanche, avec des dommages humains relativement limités.
Mais, jeudi, pour la deuxième fois en une semaine, un Palestinien a
ouvert le feu sur ses victimes avec un fusil automatique en Cisjordanie
occupée, tuant Ezra Schwartz, étudiant américain d'une école talmudique
âgé de 18 ans, et Yaakov Don, 49 ans. Un Palestinien de 40 ans, Shadi
Arafa, a également péri dans la fusillade.
L'enquête devra dire si Shadi Arafa a succombé à des tirs de
l'assaillant ou à la riposte des forces israéliennes, a dit la police
israélienne.
Reflet de la suspicion à nouveau exacerbée entre Israéliens et
Palestiniens, le frère de Shadi Arafa, Baha Arafa, a dit tenir les
soldats israéliens pour responsables de sa mort, en marge des
funérailles du défunt, suivies par environ 2.000 personnes à Hébron,
dans le sud de la Cisjordanie.
Les obsèques des autres victimes ont eu lieu entre jeudi soir et
vendredi. Le corps de l'étudiant américain devait, lui, être rapatrié
aux États-Unis.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a promis "une lutte
acharnée" contre les "terroristes": "nous leur ferons payer leurs actes,
leurs familles paieront, nous détruirons leurs maisons et nous
révoquerons leur (permis de) résidence", a-t-il dit sur Facebook.
"Les démons seront lâchés"
Les attentats de jeudi ont soulevé la question de nouveaux moyens à
mettre en oeuvre: un contrôle encore plus strict des permis de travail
et des déplacements des Palestiniens, une ségrégation encore accrue
entre les routes ouvertes aux Palestiniens ou aux Israéliens en
Cisjordanie, voire une fermeture de ce territoire palestinien qu'Israël
occupe.
Les experts soulignent la quasi-impossibilité d'empêcher des attentats
commis par des individus isolés, de tous les âges et des deux sexes.
Yoram Schweitzer, ex-responsable du contre-terrorisme à l'armée, ne
croit pas "qu'il faille changer de politique à chaque fois qu'il y a une
opération". "Il n'y a aucun signe que les choses se calment dans un
futur proche", dit-il à l'AFP, "nous devons procéder aux ajustements
nécessaires pour essayer d'empêcher que cela n'arrive et pour minimiser
les dommages tout en conservant le juste milieu".
Benedetta Berti, experte à l'Institut pour les études de sécurité
nationale, note que s'il est "inexact de parler d'intifada (soulèvement
palestinien contre l'occupation israélienne) à part entière", il est
"tout à fait exact de parler d'inquiétante tendance à la détérioration".
Selon elle, le gouvernement israélien se contente de "gérer" la
situation alors que le coeur de la confrontation reste l'absence de
toute perspective de résolution politique du conflit
israélo-palestinien.
Elle souligne le risque que des groupes comme le Hamas ou le Jihad
islamique, jusqu'alors restés à l'écart, s'en mêlent. Alors "les démons
seront lâchés".
(20-11-2015)
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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