L'Iran a accusé jeudi l'aviation saoudienne d'avoir bombardé son
ambassade au Yémen et a interdit l'entrée de tous les produits
saoudiens, nouvel épisode dans la flambée de tensions entre les deux
pays après l'exécution par Riyad d'un religieux chiite saoudien. Selon
Téhéran, le bombardement de son ambassade au Yémen est « une action
délibérée de l'Arabie Saoudite » et viole « les conventions
internationales pour protéger les missions diplomatiques (...) ».
L'Arabie Saoudite est à la tête d'une coalition arabe qui intervient au Yémen en
soutien au président Mansour Abd Rabbo Mansour Hadi contre des rebelles
chiites soutenus par l'Iran. « Le gouvernement saoudien est responsable
des dégâts causés et de la situation des membres du personnel qui ont
été blessés », a accusé le porte-parole du ministère iranien des
Affaires étrangères, Hossein Jaber Ansari, cité par la télévision
d'État.
« La République islamique d'Iran se réserve le droit de défendre ses
droits dans cette affaire », a-t-il ajouté. L'Iran a dans le même temps
annoncé l'interdiction de l'entrée de tous les produits saoudiens ou en
transit depuis l'Arabie saoudite, selon le site du gouvernement.
L'interdiction du petit pèlerinage de La Mecque (omra), auquel se
rendaient d'habitude quelque 500 000 pèlerins iraniens et parfois
jusqu'à 850 000, est également « maintenue jusqu'à nouvel ordre ». Déjà
tendues, les relations entre l'Iran chiite et l'Arabie Saoudite sunnite
se sont encore détériorées début janvier. Riyad a rompu dimanche ses
relations avec l'Iran à la suite de l'attaque de ses missions
diplomatiques samedi à Téhéran et à Machhad par des manifestants en
colère qui protestaient contre l'exécution du dignitaire religieux
chiite saoudien, cheikh Nimr al-Baqer al-Nimr.
« Ne pas entraîner la région dans une guerre qui ne pourrait avoir de vainqueur »
L'exécution de ce critique du régime saoudien a provoqué l'indignation
au sein des communautés chiites dans plusieurs pays de la région. Le
gouvernement iranien a condamné l'attaque de l'ambassade et du consulat
saoudiens et plus de 40 personnes ont été arrêtées, mais ceci n'a pas
suffi pour calmer la colère de l'Arabie Saoudite. La décision de Riyad
de rompre ses relations avec l'Iran a été suivie par Bahreïn, le Soudan
puis Djibouti mercredi. Les Émirats arabes unis ont, eux, décidé de
réduire leurs relations diplomatiques avec Téhéran, et le Koweït, tout
comme le Qatar, ont rappelé leur ambassadeur en Iran. La Jordanie a de
son côté convoqué l'ambassadeur iranien à Amman. Ces tensions inquiètent
la communauté internationale. Elle tente d'apaiser la crise ouverte
entre les deux poids lourds de la région qui s'opposent depuis des
années sur de nombreux dossiers, de l'Irak au Liban en passant par les
guerres au Yémen et en Syrie.
L'Irak majoritairement chiite comme l'Iran a proposé d'œuvrer à faire
baisser la tension afin de ne « pas entraîner la région dans une guerre
qui ne pourrait avoir de vainqueur ». Le président iranien Hassan Rohani
a pourtant une nouvelle fois déploré mercredi que « les positions et
les récentes actions de l'Arabie Saoudite accentuent les divergences et
les fossés dans la région ». De nouvelles manifestations contre
l'exécution du cheikh Nimr ont été annoncées en Iran à l'occasion de la
prière du vendredi. Les tensions entre Téhéran et Riyad affectent aussi
les cours du pétrole. Le WTI, le pétrole échangé à New York, a atteint
jeudi son niveau le plus bas en douze ans (32,10 dollars) dans un marché
asphyxié par l'excédent d'offres que les tensions croissantes au
Moyen-Orient, les derniers chiffres sur les stocks américains de brut et
les mauvaises données chinoises ont plombé.
Sur le plan économique, l'interdiction des importations saoudiennes ou
ayant transité par l'Arabie Saoudite pourrait avoir un impact de
plusieurs millions d'euros. Les importations en Iran en provenance
d'Arabie Saoudite se sont élevées à 40 millions de dollars (36,8
millions d'euros) au cours des huit premiers mois de l'année iranienne
(qui a débuté le 20 mars), selon des chiffres officiels, contre 132
millions de dollars d'exportations (121 millions d'euros). Les pèlerins
iraniens dépensaient eux entre un et deux milliards de dollars (920
millions et 1,84 milliard d'euros) en Arabie Saoudite et leur absence
pourrait constituer une perte financière pour Riyad.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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