Un gouvernement d'union nationale a été formé mardi en Libye, une étape
prévue par l'accord parrainé par l'ONU qui constitue un timide premier
pas vers une solution politique à la crise traversée par ce pays divisé
où la menace djihadiste est grandissante.
En attente d'une reconnaissance du Parlement de l'Est
32 ministres représentant les différentes parties et régions composent
ce gouvernement d'union dirigé par l'homme d'affaires tripolitain Fayez
el-Sarraj. Ils ont été nommés par le Conseil présidentiel, une instance
présidée par M. Sarraj et créée après la signature en décembre au Maroc
de l'accord politique sous l'égide de l'ONU. Cet accord avait été signé
par des membres des deux Parlements libyens rivaux mais n'a depuis été
ratifié par aucune des deux chambres législatives. L'émissaire de l'ONU
pour la Libye, Martin Kobler, a toutefois exhorté mardi la Chambre des
représentants, le Parlement reconnu par la communauté internationale qui
siège dans l'est du pays, à "se réunir rapidement pour approuver" le
gouvernement d'union. Pour que ce nouveau cabinet devienne opérationnel,
il doit en effet être approuvé par une majorité des deux tiers par ce
Parlement dans les dix jours.
Mettre fin à l'avancée du groupe État islamique
La chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini a elle aussi
appelé mardi la Chambre des représentants à approuver rapidement le
nouveau cabinet. "Seul un gouvernement libyen unifié, soutenu par tous
les citoyens, sera capable d'en finir avec les divisions politiques, de
vaincre le terrorisme et gérer les défis sécuritaires, humanitaires et
économiques" du pays, a-t-elle ajouté. La Libye est plongée dans le
chaos et livrée à des groupes armés depuis la chute de Muammar Khadafi
en 2011 et les deux autorités s'y disputent le pouvoir depuis la prise
de la capitale Tripoli par des milices en partie islamistes à l'été
2014. La mise en place d'un gouvernement d'union est ardemment soutenue
par les Occidentaux qui souhaitent voir s'installer une autorité à même
de lutter contre le groupe État islamique (EI). Ce dernier n'a cessé de
renforcer sa présence ces derniers mois en Libye où il compte environ 3
000 combattants selon Paris. Le groupe djihadiste a notamment revendiqué
au début du mois deux attentats meurtriers (plus de 56 morts) et lancé
des attaques visant le "croissant pétrolier", situé dans le nord de ce
pays qui dispose des réserves pétrolières les plus importantes
d'Afrique, estimées à 48 milliards de barils.
Qui est Fayaz el-Sarraj ? Le nouveau chef du gouvernement
La tâche de diriger le nouveau gouvernement revient à Fayez el-Sarraj,
quinquagénaire originaire de Tripoli, membre de la Chambre des
représentants. Diplômé en gestion des affaires et en architecture, il a
été membre de l'Autorité préparatoire pour le dialogue qui a tenté de
rassembler les différents acteurs de la société en vue de mettre fin à
la crise. Il se trouve actuellement à l'étranger. Les portefeuilles ont
été répartis selon les trois régions libyennes : neuf pour l'Ouest
(Tripolitaine), huit pour l'Est (Cyrénaïque) et sept pour le Sud
(Fezzan). L'annonce de sa formation était attendue dimanche, mais des
divergences ont ralenti le processus, notamment au sujet du "partage
géographique" des portefeuilles. La répartition des ministères régaliens
a traditionnellement suscité des frictions entre les trois régions.
Deux membres du Conseil présidentiel se sont ainsi abstenus d'approuver
ce gouvernement. L'un des vice-Premiers ministres, Ali al-Gatrani, et
l'un des ministres d'État, Omar al-Aswad, se sont retirés
"temporairement" du conseil, invoquant "des divergences au sujet de la
répartition des ministères", a dit M. Gatrani. Le portefeuille de la
Défense a été confié à Al-Mahdi al-Barghathi (Est), l'Intérieur à
Al-Aref al-Khoja (Ouest), la Justice à Abdel Salam Genedi (Sud) et les
Affaires étrangères à Marwan Abousrewil (Ouest). Une seule femme - à la
Culture - fait partie de ce gouvernement et le controversé général
Khalifa Haftar, commandant des forces loyales au pouvoir reconnu
internationalement, n'y figure pas. "Si Haftar ne soutient pas ce
nouveau gouvernement, ce qui devrait pas être le cas vu le nom du
ministre de la Défense (ndlr : rival de Haftar), alors je vois mal le
président de ce Parlement prêter son concours à une approbation rapide",
assure Mattia Toaldo, chercheur au European Council on Foreign
Relations. "Mais l'identité du ministre de la Défense pourrait changer
la donne auprès de certains à Tripoli", poursuit-il. "C'est pour ça que
s'il est approuvé, le gouvernement d'union pourrait avoir un chemin plus
calme. En tout cas, s'il ne contrôle pas Tripoli, ce gouvernement sera
complètement inefficace."
19-01-2016 - Par Idriss Elram
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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