mercredi 4 mai 2016

Liban : Affaire du père Labaky, "Mon client fait face à de la présomption de culpabilité"

Depuis 2012, Mansour Labaky, prêtre chrétien maronite libanais, est soupçonné d'actes pédophiles sur des mineures. Les faits remonteraient aux années 1990 lorsque le père Labaky ouvre à Douvres-la-Délivrande, dans le Calvados, le foyer Notre-Dame-Enfant du Liban, dédié aux orphelins libanais. Condamné par le Vatican en juin 2013 pour « abus sexuels sur mineures et crime de sollicitation (sexuelle) à l'occasion de la confession », Mansour Labaky fait aujourd'hui l'objet d'un mandat d'arrêt international, lancé par un juge d'instruction du tribunal de Caen. Cette décision fait suite aux multiples refus du prêtre libanais de se rendre en Normandie afin d'être entendu par le magistrat. Seul problème pour la justice, il n'existe pas d'accord d'extradition entre la France et le pays du Cèdre. L'avocat de Mansour Labaky, Me Antoine Korkmaz, s'explique.

Depuis l'ouverture d'une information judiciaire en 2013, le père Labaky n'a jamais été entendu par le juge d'instruction, malgré quatre convocations. Pourquoi ce silence ?

Me Antoine Korkmaz : Mon client a répondu qu'il était à disposition du juge d'instruction. Il est absolument prêt à répondre à toutes les questions. Mais Mgr Labaky est gravement malade, et sa condition physique ne lui permet pas de se déplacer jusqu'en France. Cependant, Mgr Labaky peut tout à fait être entendu au Liban, via une commission rogatoire, délivrée aux autorités libanaises par la justice française.

L'émission d'un mandat d'arrêt international à son encontre l'obligera-t-elle à revenir en France, malgré tout ?

Je ne vois pas l'intérêt d'une telle décision. On lance un mandat d'arrêt international pour les personnes qui sont en fuite. Or, la justice possède son adresse, puisque mon client a même correspondu avec le juge d'instruction. Il faut savoir également que Mgr Labaky n'a jamais été mis en examen dans cette affaire. De ce fait, je n'ai pas accès au dossier. Nous ne savons pas, à ce jour, qui a porté plainte contre mon client. Lui qui a pourtant demandé à rencontrer les victimes présumées. On lui a refusé ce droit d'être confronté à elles.

Il n'est pas rare que les victimes présumées dans ce genre d'affaires refusent de rencontrer leur agresseur présumé…

Mettez-vous à la place de mon client. Comme moi, il n'a pas accès au dossier monté contre lui. Il ne sait même pas quels sont les faits dont on l'accuse. Mgr Labaky aimerait simplement discuter avec ces personnes. Comprendre ce qu'on lui reproche.

Quid de la condamnation de la Congrégation de la doctrine de la foi, en 2013 ?
La condamnation du Vatican a été prise dans des conditions cavalières. Mgr Labaky a été victime d'une manipulation, où se sont mêlés chantage et faux témoignages.

Pour l'avocate de l'une des victimes présumées, Me Doumic, l'affaire doit être « renvoyée aux assises » et Mansour Labaky, « jugé en son absence ». Redoutez-vous une telle décision ?
Je le répète, le juge d'instruction peut requérir une commission rogatoire s'il possède des preuves graves. On assiste actuellement dans les médias à la propagation d'informations complètement fausses, hors des règles procédurales. La justice doit opérer en dehors de toute pression médiatique, et je trouve choquant qu'on salisse, qu'on étale dans la presse des allégations qui ne respectent aucune règle, à commencer par la présomption d'innocence. Je condamne évidemment tout acte de pédophilie. Mais, aujourd'hui, mon client fait face à de la présomption de culpabilité.

Dans quel état d'esprit se trouve Mansour Labaky actuellement ?
Le père Labaky est un homme serein, qui croit en Dieu. Il a fait énormément pour les orphelins. Il est confiant dans la justice. Il a la conscience plus que tranquille.

(04-05-2016 - Rand A. Khalek)

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