Les autorités irakiennes ont annoncé samedi que les forces de sécurité
avaient tué au moins deux personnes en dispersant la veille des
manifestants qui avaient pénétré de force dans la Zone verte de Bagdad,
des violences qui laissent craindre une possible escalade.
Ces deux victimes sont les premières d'un mouvement de protestation qui
dure depuis plusieurs mois, mené par le dignitaire chiite Moqtada Sadr
qui jouit d'une forte popularité auprès de milliers d'Irakiens excédés
par la classe politique.
Leurs funérailles ont eu lieu dans la ville sainte de Najaf où reposent des millions de chiites irakiens.
"Les victimes ont été enterrées au cimetière de Wadi al-Salam (vallée de
la paix, en arabe, l'un des plus grands cimetières du monde)", a
indiqué cheikh Imad al-Kaabi, un responsable du mouvement sadriste.
"Des manifestants pacifiques ont été exposés à des tirs à balles
réelles, en caoutchouc et des grenades lacrymogènes", s'est révolté Abou
Mohammed, parent d'une des victimes.
Selon des responsable des services de sécurité et médicaux, 57 personnes
ont été blessées dans la confrontation qui a opposé les partisans de M.
Sadr aux services de sécurité qui essayaient de les empêcher de
pénétrer dans la Zone verte, secteur ultra-sécurisé de Bagdad où se
trouvent les principales institutions de l'Etat. Certains protestataires
ont riposté en jetant des pierres et d'autres projectiles.
Faisant fi des grenades lacrymogènes, des bombes assourdissantes et des
canons à eau, les manifestants avaient arraché les barbelés installés
sur un des principaux ponts du Tigre, forçant l'entrée de la Zone verte
et prenant brièvement d'assaut le bureau du Premier ministre Haider
al-Abadi.
Les forces de sécurité ont également tiré à balles réelles lors de la manifestation, la plupart du temps en l'air.
Les responsables irakiens ont affirmé que les victimes avaient été tuées par balles.
Il s'agit de la seconde intrusion des partisans de Moqtada Sadr dans la
Zone verte en trois semaines. Ils avaient occupé le Parlement fin avril.
Le Premier ministre irakien, auquel les manifestants réclament la mise
en oeuvre des réformes promises durant l'été 2015, a critiqué l'assaut
des protestataires tout en se disant solidaires de leurs revendications.
"Prendre d'assaut des institutions de l'Etat (...) ne peut être
accepté", a-t-il déclaré.
Moqtada Sadr a pour sa part mis en garde contre toute tentative de bloquer des "manifestations pacifiques".
"Aucune partie n'a le droit d'empêcher ça. Sinon, la révolution prendra
une autre forme", a averti le chef chiite, qui réclame depuis des
semaines des réformes visant à lutter contre la corruption, le népotisme
et le clientélisme.
M. Abadi a tenté à plusieurs reprises de mettre en oeuvre le train de
réformes qui, selon lui, permettrait de lutter efficacement contre la
corruption.
Sa dernière tentative est la formation d'un nouveau gouvernement de
technocrates. Mais de nombreux politiciens s'y opposent, redoutant la
fin d'une attribution des ministères sur une base politique et
confessionnelle qui leur assure des privilèges.
M. Abadi n'a pas les coudées franches à l'heure où les divisions entre
groupes chiites armés s'accentuent et que ses forces sont engagées dans
une opération militaire pour reprendre la deuxième ville du pays,
Mossoul, fief de Daesh.
"Restaurer le calme est fondamental pour que l'Irak soit capable de
trouver une solution politique fondée sur des discussions ouvertes" à
tous, estime l'envoyé spécial de l'ONU pour l'Irak, Jan Kubis.
Kimberley Kagan, à la tête du Institute for the Study of War, est elle
plus pessimiste, estimant que la crise est si profonde que chaque partie
ne peut plus se contenter de sauver les apparences.
"Ce conflit va durer", dit-elle, "et il y aura des gagnants et des perdants".
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire