lundi 16 mai 2016

Israël/Palestine : Netanyahu met en doute l'impartialité française devant Ayrault

Le chef de la diplomatie française Jean-Marc Ayrault reçu le 15 mai 2016 par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à Jérusalem (Afp)

Les relations entre la France et Israël sont fraîches. En visite à Jérusalem, le ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault s'est vu reprocher par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu "l'impartialité" de la conférence voulue par la France pour relancer le processus de paix dans la région. "J'ai dit (à Jean-Marc Ayrault) que la décision scandaleuse prise à l'Unesco avec le soutien de la France et qui ne reconnaît pas le lien millénaire entre le peuple juif et le mont du Temple jette une ombre sur l'impartialité du forum que la France tente de réunir", a dit Benjamin Netanyahu.
Il s'exprimait après avoir reçu le ministre français des Affaires étrangères, venu lui présenter de vive voix le projet français de conférence internationale de paix, qui aurait lieu avant la fin de l'année mais à laquelle le gouvernement israélien est opposé. Un manque d'impartialité réfuté par Jean-Marc Ayrault. "La France est désintéressée, mais elle est profondément convaincue que si on ne veut pas laisser prospérer, ici dans cette région, les idées de Daesh  il faut faire quelque chose", a-t-il affirmé devant les journalistes à l'aéroport, à son départ d'Israël après des rencontres dans la matinée.
Benjamin Netanyahu a indiqué avoir redit au chef du Quai d'Orsay que "la seule voie pour parvenir à une paix véritable entre nous et les Palestiniens, ce sont des négociations directes sans condition préalable". Le chef du gouvernement israélien s'est emparé ces dernières semaines du vote par la France en avril en faveur d'une décision de l'Unesco sur le patrimoine culturel palestinien et Jérusalem-Est, partie palestinienne de Jérusalem occupée et annexée par Israël. Il s'est indigné que le texte ne fasse jamais référence à l'esplanade des Mosquées comme mont du Temple, l'appellation sous laquelle les juifs révèrent le lieu, ou ne cite le mur des Lamentations qu'entre guillemets. Selon lui, ce texte nie le "lien historique" entre les juifs et Jérusalem.
Cette controverse a parasité la visite du ministre français et les responsables français se sont succédé pour tenter de dissiper le trouble causé à l'initiative française. Jean-Marc Ayrault s'y est à nouveau employé dimanche. "Des formulations malencontreuses et blessantes, qui auraient pu et dû être évitées, ont créé des malentendus. La France le regrette", a dit Jean-Marc Ayrault à Benjamin Netanyahu selon son entourage. "La position de la France sur Jérusalem n'a pas changé : Jérusalem est une ville fondamentale pour les trois grandes religions monothéistes et appartient à tous les croyants, juifs, chrétiens et musulmans", lui a-t-il dit selon les mêmes sources.
À la mi-journée, Jean-Marc Ayrault a rencontré à Ramallah le président palestinien Mahmud Abbas et son chef de la diplomatie Riyad al-Malki, qui a dénoncé devant la presse les refus opposés "depuis le début" par Benjamin Netanyahu. "Nous souhaitons le succès des efforts français parce qu'ils sont les seuls sur le terrain et qu'ils pourraient donner un élan au processus politique", a-t-il ajouté, le jour même où les Palestiniens commémorent la "Nakba", la "catastrophe" (en arabe) qu'a constitué pour eux la création d'Israël en 1948.
Pour préparer la conférence internationale de paix, la France prévoit le 30 mai une réunion ministérielle avec une vingtaine de pays, l'Union européenne et l'ONU, mais sans Israéliens ni Palestiniens pour ne pas condamner d'emblée cet effort à l'échec. Jean-Marc Ayrault sait pouvoir compter sur le soutien palestinien dans son ambition de redonner vie à la vieille entreprise visant à résoudre l'un des plus vieux conflits de la planète, alors que la dernière initiative de paix, d'origine américaine, a échoué en 2014.
Au-delà de la querelle sur l'Unesco, Jean-Marc Ayrault a dit à Benjamin Netanyahu que la France ne cherchait pas à "préempter ni à contourner les négociations directes entre les deux parties, seule voie pour résoudre le conflit", selon son entourage. "Le problème, c'est qu'il n'y a, actuellement, aucune négociation", lui a-t-il dit selon les mêmes sources. Alors que les Israéliens viennent de célébrer le 68e anniversaire de leur État, les Palestiniens sous occupation attendent toujours le leur.
Mais la communauté internationale s'inquiète de devoir prononcer la mort de "la solution à deux États", c'est-à-dire la création d'un État palestinien qui coexisterait en paix avec Israël. Malgré les autres crises dans la région, la France dit vouloir remettre ce vieux conflit à l'agenda et espère mobiliser la communauté internationale en changeant de méthode. Paris dit vouloir regrouper les incitations pour aider Israéliens et Palestiniens à reprendre des négociations crédibles et, idéalement, les mener à bien avec un encadrement international et dans un délai imparti, dit-on de sources diplomatiques. Les Français se montrent toutefois très prudents quant aux chances de succès de leur initiative. L'adhésion américaine reste une des grandes inconnues du projet, le secrétaire d'État John Kerry n'ayant toujours pas dit s'il participerait à la réunion du 30 mai.

(15-05-2016)

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