Allocution de BHL sur la place Tahrir de Benghazi.
(Photo: Marc Roussel)
(Photo: Marc Roussel)
Dévoilés dans le cadre d'une enquête sur un attentat anti-américain en Libye, les emails de l'ex-secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton apportent un autre éclairage sur la position de la France au printemps 2011.
Les emails de l'ancienne secrétaire d'Etat rendus publics par le département d'Etat dans le cadre de l'enquête sur l'attentat anti-américain de 2012 en Libye contre le consulat de Benghazi réservent des surprises. A en croire le conseiller d'Hillary Clinton qui les a envoyés, les services secrets français auraient organisé et financé la rébellion contre Mouammar Kadhafi.
Plusieurs milliers de courriers électroniques envoyés ou reçus par Hillary Clinton, lorsqu'elle dirigeait la diplomatie américaine, ont été rendus publics sur internet, par le département d'Etat, sous le coup d'une ordonnance judiciaire.
Parmi ces documents, une série de mémos transmis à la chef de la diplomatie par un ami et homme d'affaires, Sidney Blumenthal, conseiller informel sur la Libye, qui se targuait de disposer de "sources" au sein du régime de Tripoli de l'époque. Ces missives auraient été écrites, selon le site Al Monitor qui couvre l'actualité du monde arabe et du Moyen-Orient, par une tierce personne, un ancien agent de la CIA, Tyler Drumheller. Ces documents mettent en cause le récit fait par la France du déroulement des événements en Libye en 2011.
La version officielle de la France est que Paris a choisi d'intervenir à l'appel d'opposants libyens pour éviter un bain de sang causé par la répression du dictateur libyen contre les mouvements contestataires lancés à la fin de l'hiver 2011. Al Monitor, basé à Washington, rappelle que Bernard-Henri Levy, aurait, selon la version officielle, rencontré le chef du Conseil national de transition Moustapha Abdel Jalil, le 4 mars 2011, appelé aussitôt Nicolas Sarkozy qui aurait invité l'opposant à l'Elysée, et reconnu le CNT le 10 mars.
Mais selon un mail daté du 22 mars, des agents de la DGSE ont entamé des rencontres secrètes avec Jalil et le général Abdelfattah Younès -qui venaient de quitter le gouvernement de Kadhafi- dès la fin février à Benghazi. Paris aurait fourni argent et conseils pour la formation du CNT. "En échange de ce soutien, indique la note, la France attendait que les nouvelles autorités favorisent les entreprises françaises, en particulier dans le secteur pétrolier." La France a été le premier pays à reconnaitre le CNT.
Al-Monitor souligne l'existence d' un autre mémo, daté du 5 mai, qui évoque des vols humanitaires organisés mi-avril de la même année, qui auraient compté parmi les passagers des cadres de Total, de Vinci, et de l'EADS. Le site a également consulté un mémo datant du mois de septembre selon lequel la France demanderait que 35% des contrats pétroliers soient attribués à des entreprises françaises.
Dans un autre email, au début de l'année 2012, selon Mediapart, Blumenthal évoque la potentielle partition de la Libye, dans laquelle il voit la main de la France. "Une source extrêmement sensible indique que la DGSE et le SIS (les services secrets britanniques) entendent organiser le mouvement vers un État semi-autonome dans un système fédéral." Mais, précise, Mediapart, Hillary Clinton qui, en transmettant ce message à ses équipes, ajoute un mot: "Cela me paraît difficilement crédible d'après ce que je sais".
L'auteur des mails, Sidney Blumenthal, souligne Le Temps, n'est pas précisément neutre. Il avait des intérêts en Libye où "il conseillait la société américaine Constallations Group avec deux associés dont Tyler Drumheller, l'agent de la CIA et présumé auteur des notes envoyées à Hillary Clinton".
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