Pris à la gorge par le blocus d’Israël contre Gaza et la fermeture de
la frontière avec l’Egypte, le Hamas a accepté la réconciliation aux
conditions du président Mahmoud Abbas afin d’assurer sa survie à terme,
quitte à céder le pouvoir, selon des analystes.
Lors d’une rare rencontre après la conclusion d’un nouvel accord de
réconciliation le 23 avril, Mahmoud Abbas et le chef du mouvement
islamiste, Khaled Mechaal, ont réitéré lundi à Doha "leur volonté
sérieuse d’ouvrir une nouvelle page fondée sur le partenariat national",
selon le Hamas.
Contrairement aux épisodes précédents du feuilleton de la réconciliation
depuis 2011, le Hamas n’a émis aucune réserve sur la composition du
futur gouvernement transitoire de personnalités indépendantes, ni sur
les assurances de M. Abbas que celui-ci suivrait sa seule politique.
Et le quotidien Al-Qods, publié en Cisjordanie contrôlée par l’Autorité
palestinienne et à Jérusalem-Est, a recommencé mercredi à être distribué
à Gaza gouverné par le Hamas depuis 2007, une mesure annoncée il y a
trois ans mais restée lettre morte.
"La chute des Frères musulmans en Egypte et ses conséquences sur Gaza
concernant la fermeture des tunnels et le terminal frontalier, ainsi que
les difficultés financières, ont contraint le Hamas à rechercher une
issue", explique Naji Charab, professeur de science politique, en
référence aux tunnels de contrebande qui atténuaient l’impact du blocus
israélien.
Grâce à son intégration au système politique palestinien, "la relation
du Hamas avec l’Egypte va s’améliorer, et c’est un énorme bénéfice pour
lui", poursuit M. Charab, enseignant à l’Université Al-Azhar de Gaza.
Interrogé mardi soir sur le fait de savoir si le Hamas était "l’ennemi"
de l’Egypte, l’homme fort du pays, le maréchal Abdel Fattah al-Sissi,
qui a destitué le 3 juillet le président islamiste Mohamed Morsi, s’est
borné à appeler ses compatriotes à ne pas laisser leurs "sentiments
contre le Hamas affecter notre (...) défense de la cause palestinienne".
"La série de revers des Frères musulmans dans la région, en particulier
en Egypte, a aidé les dirigeants pragmatiques, tels que Mechaal, Moussa
Abou Marzouk (numéro 2 du mouvement, NDLR) et (le chef du gouvernement
du Hamas) Ismaïl Haniyeh, à faire accepter au courant radical la relance
de la réconciliation", précise l’analyste politique Hani Habib.
Le mouvement s’est résolu à "confier les affaires à l’Organisation de
libération de la Palestine et à l’Autorité palestinienne pour
transformer le Hamas en partenaire politique reconnu et accepté
régionalement et internationalement sans devoir faire de concession
politique, comme reconnaître Israël", ajoute-t-il.
Dans une tribune, Ephraïm Halévy, un ancien chef du Mossad, le service
de renseignements israélien, conseille au "gouvernement israélien
d’envisager sérieusement d’éradiquer le Hamas par surprise" ou bien,
comme il le préconise, de "lui parler justement au moment où il est en
position d’infériorité".
Le Hamas envisage de "renoncer au gouvernement à Gaza, encouragé par
l’expérience du mouvement islamiste en Tunisie", qui a cédé en janvier
les rênes du gouvernement, confirme un responsable du mouvement, Ahmad
Youssef.
L’expérience du pouvoir s’est avérée "un fardeau qui épuise les énergies et sape la popularité du Hamas", souligne-t-il.
Selon Walid al-Moudallal professeur de science politique à l’Université
islamique de Gaza, "le Hamas s’est rendu compte qu’il ne pouvait pas
combiner son statut de mouvement de libération et de résistance avec
l’action politique".
"La tendance au sein du mouvement est qu’il est préférable de quitter le
pouvoir et de préserver les positions du Hamas, ses forces militaires
et de sécurité sur le terrain", indique-t-il.
Moussa Abou Marzouk a d’ailleurs souligné samedi qu’il n’avait "pas été
question" d’un éventuel désarmement de la branche militaire du
mouvement.
Le gouvernement du Hamas a en revanche annoncé la prochaine intégration
aux forces de sécurité à Gaza de 3.000 hommes de l’Autorité
palestinienne, après la constitution d’un exécutif transitoire.
Hani Habib prédit cependant que "le courant radical du Hamas va
reprendre des forces en gagnant du temps sur des dossiers importants,
comme la sécurité et les finances, qui constituent des champs de mines
sur le chemin de la réconciliation".
Adnane Abou Amr, professeur de science politique à l’Université Oumma à
Gaza, juge un nouvel échec "possible", mais met en garde contre "une
rechute de la réconciliation qui aurait des conséquences désastreuses
pour les deux parties".
(07-05-2014 - Assawra)
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