mercredi 10 juillet 2013

Égypte : le nouveau Premier ministre offre aux Frères musulmans d’entrer au gouvernement

Le nouveau Premier ministre égyptien Hazem Beblawi va offrir aux Frères musulmans des postes au sein du gouvernement de transition qu’il a été chargé mardi de former, six jours après que l’armée eut déposé le président islamiste Mohamed Morsi, a annoncé l’agence de presse officielle Mena citant un porte-parole de la présidence.
"Quelques postes au gouvernement seront offerts au Parti de la Liberté et de la Justice" (PLJ), le bras politique des Frères musulmans, a déclaré ce porte-parole, Ahmed al-Muslimani.
Un temps pressenti pour devenir Premier ministre, le Prix Nobel de la Paix Mohamed ElBaradei, figure de l’opposition laïque, devient, quant à lui, vice-président chargé des relations internationales, a précisé le porte-parole de la présidence.
Ces annonces sont survenues le jour-même où les Frères musulmans enterraient les dizaines de manifestants tués lundi au cours d’un rassemblement en faveur de M. Morsi au Caire. Si les Frères ont appelé au "soulèvement" après ce "massacre", aucun incident n’a été rapporté.
Le nouveau Premier ministre est un économiste de tendance libérale âgé de 76 ans qui a fait une longue carrière dans des institutions égyptiennes et internationales.
Hazem Beblawi a été vice-Premier ministre et ministre des Finances en 2011, pendant la période de transition sous la direction militaire ayant suivi la chute de Hosni Moubarak.
Il aura la lourde tâche de redresser une économie en particulier en proie à la chute du tourisme, à un effondrement des investissements étrangers et à une baisse importante de ses réserves en devises.
Peu après cette nomination, l’armée a mis en garde contre toute perturbation du "délicat et complexe" processus de transition, dans une déclaration publique.
Le choix de M. Beblawi intervient après plusieurs jours de discussions et le retrait du principal parti salafiste, al-Nour -qui avait soutenu le coup de force militaire aux côtés de mouvements majoritairement laïques- en raison des violences ayant fait des dizaines de morts parmi les partisans de M. Morsi au Caire.
Dans une tentative de relance de la transition, le président par intérim, Adly Mansour, a émis dans la nuit de lundi à mardi un communiqué dans lequel est prévue une révision de la Constitution de 2012.
La loi fondamentale amendée devra être validée par référendum avant l’organisation d’élections législatives d’ici au début de 2014.
Mais un haut responsable des Frères musulmans a rejeté cette déclaration de M. Mansour : "Un décret constitutionnel par un homme nommé par des putschistes (...) ramène le pays à la case départ", a commenté Essam al-Erian, sur son compte Facebook.
Le groupe Tamarrod, à l’origine de la contestation contre M. Morsi, a de son côté exprimé des réserves, et déclaré préparer avec des experts une série d’améliorations.
Dans le même temps, des funérailles des victimes de lundi se déroulaient dans le climat d’extrême tension prévalant depuis la destitution par l’armée le 3 juillet du président islamiste, trois jours après des manifestations monstres de l’opposition.
Les violences de lundi matin au cours d’une manifestation en faveur de Mohamed Morsi devant le siège de la Garde républicaine au Caire ont fait au moins 51 morts et 435 blessés, selon les services des urgences.
Les Frères musulmans ont publié une liste avec les noms de leurs 42 partisans tués, tandis que police et armée ont fait état de trois morts dans leurs rangs.
Selon la confrérie, des soldats et des policiers ont ouvert le feu sans aucune raison sur les manifestants. Leur bras politique, le PLJ, a appelé au "soulèvement" et mis en garde contre "l’apparition d’une nouvelle Syrie", une allusion au confit qui ravage ce pays.
L’armée a dit avoir répliqué après une attaque de "terroristes armés".
"Cela n’était pas une manifestation pacifique", les partisans de M. Morsi ont utilisé "des mitraillettes et des pistolets", a affirmé le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Badr Abdelatty.
Le président par intérim a ordonné l’ouverture d’une enquête.
Mardi, une source judiciaire a indiqué à l’AFP que 650 personnes soupçonnées d’avoir voulu entrer de force dans le bâtiment de la Garde républicaine étaient interrogées.
Dès lundi, les autorités avaient décidé de fermer le siège du PLJ au Caire en raison de la découverte "de liquides inflammables, de couteaux et d’armes", selon un haut responsable de sécurité.
Malgré un appel de l’armée à lever les sit-in, des islamistes ont manifesté lundi soir dans plusieurs villes et, mardi matin, des milliers de partisans de M. Morsi étaient encore devant la mosquée Rabaa al-Adawiya, où le rassemblement dure depuis près de deux semaines.
Les pays étrangers ont manifesté leur vive inquiétude après les dernières effusions de sang, les heurts en Egypte ayant fait une centaine de morts en moins d’une semaine.
Mardi, les Etats-Unis, qui avaient exprimé leurs craintes face aux violences, ont toutefois affirmé être "prudemment encouragés" par le calendrier des élections.
L’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont pour leur part devenus les premiers pays à apporter une aide financière, à hauteur respectivement de cinq et trois milliards de dollars.

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