Des familles irakiennes près du village d'al-Sejar après avoir fui les combats le 27 mai 2016 à Fallouja (Afp)
Des dizaines de milliers de civils étaient pris au piège des combats
samedi dans des régions de Syrie et d'Irak, des ONG et des militants
tirant la sonnette d'alarme et appelant la communauté internationale à
agir d'urgence.
Dans la province syrienne d'Alep, près de la frontière turque, des
déplacés, au nombre de quelque 165 000 selon l'ONU, sont menacés par une
offensive du groupe Daesh autoproclamé Etat islamique (EI) qui a réussi à
progresser et à s'emparer de localités rebelles.
Cette avancée de Daesh intervient alors que le groupe terroriste est la
cible depuis mardi d'une offensive des forces arabo-kurdes appuyées par
les Etats-Unis dans la province voisine syrienne de Raqa, où les civils
cherchent eux aussi à se rendre dans des lieux sûrs.
De l'autre côté de la frontière, en Irak, des dizaines de milliers de
civils sont coincés dans la ville de Fallouja contrôlée par l'EI, que
les forces irakiennes, avec l'appui aérien crucial des Etats-Unis,
cherchent à reprendre depuis lundi.
Dans ce contexte de violence accrue, le Haut commissariat de l'ONU pour
les réfugiés (HCR), les ONG Human Rights Watch et Médecins sans
Frontières, ainsi que l'opposition et les militants syriens ont exprimé
leurs craintes notamment pour les déplacés dans la région d'Azaz, dans
le nord de la province d'Alep.
C'est cette ville ainsi que celle proche de Marea que Daesh veut prendre
aux rebelles syriens. Les jihadistes sont déjà parvenus aux abords de
Marea, à 30 km au sud-est d'Azaz, où les violents combats se
poursuivent, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
"Ils y sont arrivés à bord de chars", a dit à l'AFP le militant Maamoun
Khateeb opposé au régime de Bashar al-Assad. Quinze mille habitants y
résident encore.
"La situation dans les camps des déplacés dans Azaz est très mauvaise.
Leurs souffrances ne cesseront pas tant que la frontière turque restera
fermée et que les combats auront lieu à proximité", a-t-il poursuivi.
Le HCR s'est déclaré inquiet pour "les milliers de civils vulnérables
affectés par les combats" en mentionnant les 165.000 déplacés d'Azaz. Il
a dit avoir alerté les autorités turques, qui refusent depuis des mois
d'ouvrir la frontière, sur leur situation et souligné leur droit à "un
passage sûr".
La province d'Alep est morcelée entre les différents protagonistes de la
guerre en Syrie, avec des régions contrôlées par le régime, d'autres
par les rebelles syriens ou encore par Daesh ou par les jihadistes rivaux
du Front al-Nosra (branche syrienne d'Al-Qaïda).
Les grandes puissances, la Russie et les Etats-Unis, sont elles aussi
impliquées dans le conflit, la première combattant au côté du régime
syrien et les seconds aidant avec leur aviation et expertise les
rebelles syriens dits "modérés" et les forces kurdes.
Au cinquième jour de l'offensive lancée par les Forces démocratiques
syriennes (FDS) pour déloger Daesh du nord de la province de Raqa, la
coalition internationale dirigée par les Etats-Unis a mené des raids sur
les positions jihadistes, selon l'OSDH qui a fait état de 45 jihadistes
tués depuis mardi.
Les FDS, selon l'OSDH, ont pris quelques villages mais n'ont pas
enregistré "d'avancée stratégique" face à l'EI, un groupe responsable de
terribles exactions dans les régions sous son contrôle en Syrie et en
Irak, et d'attentats meurtriers au Moyen-Orient, en Afrique et en
Europe.
Dans les régions sous son contrôle dans la province de Raqa, dont le
chef-lieu éponyme, Daesh interdit aux civils de partir, et depuis la
dernière offensive il a renforcé ces restrictions. Mais des civils ont
tenté de fuir à travers le désert en payant des passeurs.
"La violence, la peur et le dénuement forcent les Syriens à faire des
choix impossibles", a déploré le patron des opérations humanitaires
Stephen O'Brien, alors que le conflit en Syrie a fait plus de 280.000
morts et jeté hors de leurs foyers des millions de personnes depuis
2011.
Face à l'aide fournie au sol -entraînement et expertise- aux forces
kurdes par les forces américaines dans le nord syrien, la Turquie est
revenue à la charge en condamnant ce soutien à des combattants qu'elle
considère comme "terroristes". Le président Recep Tayyip Erdogan a aussi
accusé les Etats-Unis de manquer d'"honnêteté".
En Irak voisin, la situation dans Fallouja, à 50 km à l'ouest de Bagdad,
"devient plus critique chaque jour" pour les civils, selon le Conseil
norvégien pour les réfugiés pour l'Irak.
Les habitants de "quartiers entiers ont été déplacés dans la zone même
des combats sans aucune issue sûre pour s'échapper", a-t-il ajouté,
après la fuite de centaines de civiles des zones périphériques.
L'ONU a jugé dramatiques les conditions des quelque 50.000 civils
coincés à Fallouja, qui manquent de nourriture, d'eau potable et de
médicaments.