Le territoire désormais contrôlé par l’organisation Etat islamique
s’étend sur une partie de l’Irak et de la Syrie et correspond à une
partie de l’ancienne Mésopotamie, berceau de la civilisation et à ce
titre site archéologique primordial. Or l’organisation, qu’on sait peu
sensible aux vestiges de l’antiquité et qui a déjà détruit des sites
archéologiques, revend de nombreuses pièces qui envahissent le marché
international.
C’est le cas notamment à Londres, écrit le Guardian, dont la journaliste
s’est embarquée avec l’archéologue spécialiste du Moyen-Orient Mark
Altaweel dans un tour des antiquaires de la ville pour le vérifier.
Officiellement, personne n’a jamais acheté de statuettes, de poteries ou
de pièces en provenance des sites contrôlés par Daech, mais pour le
spécialiste plusieurs articles sont suspects. Il existe de nombreuses
manières de camoufler le contexte dans lequel les antiquités ont été
acquises, et les acheteurs gardent rarement de traces écrites des
transactions. Et si on peut dater assez précisément les œuvres et
identifier leur provenance, en revanche il est très difficile de savoir
si elles ont été vendues pendant la période de conflit. D’autant que les
acheteurs peuvent attendre plusieurs années avant de remettre les
pièces sur le marché.
Selon l’Unesco qui s’en est inquiété récemment, le pillage d’antiquités
en Irak et en Syrie a lieu à une échelle industrielle. Comme l’explique
l’archéologue syrien Amr al-Azm interrogé par le Guardian, les pratiques
de fouille et de revente illégales avait déjà cours dans la région, et
«quand Daech est arrivée, elle a repris le pillage et l’a
institutionnalisé».
Car l’organisation mène une guerre et, si le pétrole lui assure
l’essentiel de son financement, le business des antiquités constitue une
source de revenus non négligeable. Daech a donc organisé l’activité sur
son territoire, en prélevant d’abord une taxe de 20% sur les fouilles
qu’elle autorisait, puis en recrutant carrément ses propres archéologues
et en s’impliquant directement dans l’activité commerciale. Les pièces
transitent par la Turquie ou le Liban, et finissent sur les places de
marché européennes. Personne ne peut assurer la traçabilité des objets.
On les appelle les antiquités du sang, comme on parlait de «diamants du
sang» à propos des marchandises vendues par des groupes armés lors de
conflits pour se financer. Mais ce n’est pas la préoccupation de la
plupart des acheteurs, bien que les maisons les plus réputées commencent
à faire attention à la provenance des objets.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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