mardi 9 juillet 2013

Égypte : les autorités promettent des élections rapides

Les nouvelles autorités égyptiennes ont promis dans la nuit de lundi à mardi des législatives au plus tard début 2014, quelques heures après la mort de plus de 50 personnes au Caire lors d’une manifestation de soutien à Mohamed Morsi, le président renversé mercredi par l’armée. Le président par intérim, Adly Mansour, a décrété dans la nuit que l’organisation des élections législatives serait lancée avant la fin de l’année, relançant la transition politique, un temps bloquée par de difficiles tractations qui se poursuivent sur la nomination d’un Premier ministre faisant consensus.
La déclaration constitutionnelle, diffusée par l’agence officielle Mena, prévoit le lancement de l’organisation des législatives avant fin 2013 et sa fin avant début février 2014. Une présidentielle sera ensuite annoncée. Avant cela, une nouvelle Constitution sera soumise à référendum. Cette annonce a été immédiatement dénoncée par un haut responsable des Frères musulmans. "Un décret constitutionnel par un homme nommé par des putschistes... ramène le pays à la case départ", a commenté Essam al-Erian sur son compte Facebook.
Adly Mansour avait auparavant ordonné l’ouverture d’une enquête sur les violences qui ont fait tôt lundi au moins 51 morts et 435 blessés, d’après les urgences, qui n’ont pas précisé s’il s’agissait exclusivement de manifestants islamistes. Les Frères musulmans ont diffusé une liste comportant les noms de 42 de leurs partisans tués, tandis que la police et l’armée ont fait état de trois morts dans leurs rangs.
Ces nouvelles violences aggravent le climat d’extrême tension qui prévaut en Égypte depuis la destitution par l’armée du président islamiste à l’issue de manifestations monstres réclamant son départ. Washington a condamné l’appel à la violence de la puissante confrérie et a demandé aux militaires le "maximum de retenue", affirmant néanmoins ne pas envisager de couper son aide financière à l’armée, alors que Barack Obama avait fait peser cette menace.
L’armée a appelé les partisans de Mohamed Morsi à lever leurs sit-in, en assurant qu’elle ne tolérerait aucune "menace à la sécurité nationale". Lundi à l’aube, une foule de partisans de Mohamed Morsi priait devant le siège de la Garde républicaine quand "des soldats" et "des policiers" ont ouvert le feu, selon les Frères musulmans. Des manifestants ont fait état de tirs à balles réelles et de grenades lacrymogènes, dans des circonstances qui restent confuses. D’autres témoins ont raconté que les forces de l’ordre avaient tiré en l’air et que les tirs directs venaient "d’hommes de main" en civil.
L’armée, citée par le journal gouvernemental Al-Ahram, a déclaré de son côté que des "terroristes armés" avaient attaqué le siège de la Garde républicaine, tuant un officier et laissant six conscrits dans un état critique. Depuis sa destitution et l’arrestation de Mohamed Morsi mercredi par l’armée, la tension ne cesse de monter entre ses partisans et ses opposants et des heurts ont fait une centaine de morts.
Le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), bras politique des Frères musulmans dont est issu Mohamed Morsi, a appelé au "soulèvement (...) contre ceux qui sont en train d’essayer de (...) voler la révolution avec des chars" et a mis en garde contre "l’apparition d’une nouvelle Syrie". Quelques heures après cette déclaration, les autorités ont décidé de fermer le siège du PLJ au Caire en raison de la découverte "de liquides inflammables, de couteaux et d’armes", a annoncé à un haut responsable de sécurité.
En soirée, les islamistes ont manifesté dans plusieurs villes du pays, selon l’agence officielle Mena. À Port-Saïd, sur le canal de Suez, des hommes armés circulant sur une moto ont ouvert le feu contre une église, blessant un homme, selon un témoin. Le principal parti salafiste, al-Nour, qui a soutenu au sein d’une coalition majoritairement laïque le coup d’État militaire, a annoncé son retrait des discussions sur le choix d’un gouvernement de transition.
Le Prix Nobel de la paix Mohamed El Baradei, un temps pressenti pour prendre la tête de ce gouvernement, a condamné "avec fermeté" les violences de l’aube et a réclamé une enquête indépendante. La nomination de Mohamed El Baradei s’était heurtée à l’opposition d’al-Nour, qui avait également émis des réserves sur le choix d’un économiste de centre gauche, Ziad Bahaa Eldin, estimant que ces hommes n’étaient pas assez consensuels. L’Union européenne a appelé toutes les parties à "éviter les provocations", pressant les nouvelles autorités à "avancer rapidement vers la réconciliation".
De son côté, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a "condamné" les violences et demandé une enquête impartiale. La Turquie, l’Iran, le Qatar et le mouvement islamiste palestinien Hamas ont également condamné les violences, l’Allemagne exprimant sa "grande inquiétude". Human Rights Watch (HRW) a pour sa part réclamé la fin des "actions arbitraires" contre les Frères musulmans et les médias qui leur sont proches.

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