Le ministre tunisien des Affaires religieuses, Abdeljalil Ben Salem, a
été limogé vendredi pour « atteinte aux fondamentaux de la diplomatie »,
moins de 24 heures après avoir dénoncé le wahhabisme saoudien comme
cause principale du « terrorisme ». « Le chef du gouvernement (Youssef
Chahed) a relevé de ses fonctions le ministre des Affaires religieuses
Abdeljalil Ben Salem », a indiqué dans un communiqué la présidence du
gouvernement. Ses déclarations « ont porté atteinte aux fondamentaux et
principes de la diplomatie tunisienne », a estimé la même source,
précisant que son portefeuille était confié par intérim au ministre de
la Justice, Ghazi Jribi.
Abdeljalil Ben Salem avait affirmé jeudi au Parlement avoir interpellé
deux hauts responsables saoudiens, dont l'ambassadeur du royaume à
Tunis, sur l'influence néfaste du wahhabisme en tant que moteur du
« terrorisme ». « J'ai dit aux Saoudiens, avec audace : Réformez votre
école, car le terrorisme historiquement vient de là. Je vous dis cela
avec amour et modestie », avait rapporté le ministre, selon un
enregistrement diffusé par la radio Mosaïque FM. « Ce qu'on voit dans le
monde islamique comme extrémisme et terrorisme provient de cette école
(wahhabite), que ce soit de bonne ou mauvaise foi. (...) Ce genre de
pensée et cette école ne peuvent qu'engendrer de l'extrémisme »,
avait-il avancé. Entré en fonction fin août dans le gouvernement d'union
de Youssef Chahed, ce ministre était interrogé par un député du Front
populaire (FP, gauche, opposition), Aymen Aloui, sur sa volonté de
« combattre la propagande wahhabite en Tunisie ».
Le soir même, Abdeljalil Ben Salem avait tenté d'éteindre le début de
polémique en affirmant dans un communiqué que la relation avec Riyad
était « pleinement harmonieuse ». « Sa solidité est telle que rien ne
peut la troubler », avait-il clamé. Plusieurs quotidiens ont toutefois
fait leur une vendredi sur ces déclarations sur le wahhabisme saoudien,
une des versions les plus rigoristes de l'Islam. « Le ministre attaque
le wahhabisme incubateur de terrorisme », a titré Ecchourouk, tandis que
Al-Maghreb a avancé qu'il s'agissait du « premier ministre tunisien à
dire (publiquement) : Le wahhabisme est source de terrorisme ».
La décision de limoger Abdeljalil Ben Salem a été soutenue par la
présidence de la République, son chef de cabinet Slim Azzabi qualifiant
la déclaration du ministre de « grave erreur ». Un responsable
parlementaire du parti islamiste Ennahda (au gouvernement), Noureddine
Bhiri, a argué que les relations avec Riyad relevaient de la « sécurité
nationale ».
Le wahhabisme est « un danger pour l'Islam, pour l'humanité et pour la
vie des gens », a pour sa part affirmé à l'Agence France-Presse le
député FP Aymen Aloui. « Je comprends la logique de la diplomatie, mais
il y a des choses où il faut trancher. (...) La pensée wahhabite est un
virus qui s'est propagé en Tunisie », a déclaré l'écrivain Mazen Cherif,
expert des questions religieuses. Le combat contre l'extrémisme
religieux est l'une des priorités de la Tunisie, confrontée après sa
révolution de 2011 à l'essor d'une mouvance djihadiste responsable de la
mort de dizaines de soldats, de policiers mais aussi de civils et de
touristes étrangers. Le pays compte des milliers de ressortissants dans
les rangs d'organisations extrémistes comme Daesh.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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