dimanche 20 novembre 2016

Syrie : Des bombes toujours plus violentes à Alep

Après plusieurs mois de siège, les quartiers rebelles d'Alep, dans le nord de la Syrie, subissent les plus violents bombardements d'artillerie depuis deux ans. Les forces de Bashar el-Assad manifestent ainsi la volonté du régime syrien de reprendre le contrôle de toute la ville. Au moins 27 civils ont été tués samedi dans des frappes aériennes et des bombardements du régime, au 5e jour de l'offensive de l'armée, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
L'actuelle offensive sur Alep-Est a commencé mardi 15 novembre et les forces progouvernementales ont pilonné plusieurs quartiers vendredi, pour la quatrième journée consécutive. À Berlin, les principaux dirigeants européens et le président américain Barack Obama ont appelé à « l'arrêt immédiat » des attaques contre le secteur rebelle d'Alep, qui échappe depuis 2012 au contrôle du régime de Bashar el-Assad.
Selon le correspondant de l'Agence France-Presse en secteur rebelle, jamais depuis deux ans l'artillerie gouvernementale n'avait pilonné ces quartiers avec une telle intensité, avec des roquettes s'abattant dans un bruit terrifiant et des explosions faisant trembler le sol. « Quasiment aucun quartier d'Alep-Est n'a été épargné par les bombardements du régime aujourd'hui », lui a indiqué Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. Les écoles d'Alep-Est ont annoncé dans un communiqué qu'elles suspendaient les cours samedi et dimanche, « pour la sécurité des élèves et des enseignants après les frappes aériennes barbares ».
Les structures de secours ont aussi été durement affectées par cette pluie de bombes, plongeant les 250 000 habitants qui résideraient encore dans les quartiers est dans une situation de plus en plus dramatique. Vendredi, un hôpital du quartier de Maadi a été bombardé et mis hors service par le régime, selon l'OSDH. Selon une source médicale, « l'hôpital a été en partie détruit et deux patients ont été tués ». D'autres ont été blessés ainsi que du personnel médical.
Plus tôt, des bombardements avaient complètement détruit le QG de la défense civile à Bab al-Nairab, un autre quartier du secteur rebelle, a rapporté un secouriste. Par ailleurs, le dernier hôpital pédiatrique encore en fonction a été évacué vendredi après avoir été endommagé deux jours plus tôt par des barils d'explosifs, a indiqué l'ONG Association des docteurs indépendants (ADI), qui gère l'établissement.
Dans la journée, des hélicoptères avaient largué des barils d'explosifs sur plusieurs quartiers rebelles de l'ancienne capitale économique de Syrie, devenue le principal front d'un conflit qui a fait plus de 300 000 morts depuis 2011. Les habitants d'Alep-Est restent terrés chez eux, tandis que les insurgés ont pour leur part tiré une quinzaine de roquettes sur la partie d'Alep tenue par les forces gouvernementales, faisant cinq morts, dont deux fillettes, d'après les médias officiels.
Depuis la reprise des bombardements mardi dans l'ex-capitale économique de Syrie, après une suspension d'un mois, au moins 98 civils ont péri, dont 33 samedi, selon l'OSDH. Cela participe au calvaire des habitants d'Alep-Est, assiégée depuis quatre mois, qui ne peuvent plus recevoir aucune aide humanitaire. Les dépôts des ONG locales sont vides et des habitants affamés ont attaqué cette semaine des dépôts de vivres du conseil municipal rebelle.
Les forces du régime « entendent combiner bombardements aériens et famine résultant du siège pour obtenir une reddition des rebelles », estime Thomas Pierret, spécialiste de la Syrie et professeur à l'université d'Édimbourg. La Russie, qui intervient en Syrie depuis plus d'un an pour soutenir le régime, ne participe pas aux bombardements aériens sur Alep-Est, mais elle mène depuis mardi des frappes sur la province voisine d'Idleb, contrôlée par une alliance de rebelles et de djihadistes.
Selon des analystes, Damas et ses alliés veulent aller vite avant la prise de fonction de Donald Trump à la présidence américaine le 20 janvier. « Il est clair que la Russie, Damas et Téhéran veulent reprendre l'est d'Alep rapidement. Les États-Unis sont paralysés, il faut [pour eux, NDLR] mettre Trump devant le fait accompli en janvier prochain », a déclaré Fabrice Balanche, expert de la Syrie au Washington Institute.
À l'est de la capitale Damas, au moins 22 civils, dont 10 enfants, ont péri en 24 heures dans des bombardements sur plusieurs villes de la Ghouta orientale, autre fief des rebelles, selon l'OSDH. Par ailleurs, une coalition arabo-kurde a lancé le 5 novembre une offensive en vue de reprendre Raqqa à l'organisation État islamique, qui a fait de cette ville de l'est sa « capitale » en Syrie. L'alliance arabo-kurde tente actuellement de déloger Daesh d'une hauteur stratégique qui lui ouvrirait la route de Raqqa. Un haut responsable des Forces démocratiques syriennes (FDS), qui réunissent ces combattants arabes et kurdes, a déclaré que non seulement la coalition internationale dirigée par les États-Unis avait livré de nouvelles armes aux FDS, mais qu'elle participait aussi directement aux combats sur le terrain.

(19-11-2016)

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