"J’ai toujours voté pour Bouteflika, je sais qu’il va gagner..." Ahmed,
68 ans, est l’un des 815 000 Algériens de France appelés aux urnes dès
samedi pour élire leur futur président, cinq jours avant le scrutin en
Algérie.
Jusqu’à jeudi, les Algériens, première communauté immigrée en France,
vont devoir choisir entre six candidats, dont une femme. Le chef de
l’État sortant Abdelaziz Bouteflika, qui brigue un quatrième mandat
malgré un sévère accident vasculaire cérébral, est donné favori.
Au consulat d’Algérie de Seine-Saint-Denis, où 91.632 Algériens, le plus
fort corps électoral de France, sont appelés aux urnes, c’est
l’effervescence dès 8 heures du matin.
"Je suis venu voter dès le premier jour pour montrer l’exemple, surtout
aux jeunes", déclare à l’AFP Stili, 78 ans, en montrant son doigt taché
de l’encre indélébile qui scelle son vote. Cet Algérien vote depuis
toujours pour le président Bouteflika. "Même s’il est vieux et malade,
il apaise et fait du bien au pays", affirme cet ancien ouvrier du BTP
arrivé en France à 18 ans.
Au consulat de Nanterre, Hamed, un cariste de 60 ans, veut lui aussi
garder "son président". "Il est malade, mais il bouge encore",
assure-t-il à la sortie des urnes.
"Il est trop vieux, mais est-ce qu’on a trouvé mieux que lui ?",
interroge de son côté Halima, 51 ans. "Depuis qu’il est là, la situation
du pays n’a fait que s’améliorer".
A Nanterre, berceau dans les années 30 du mouvement nationaliste
algérien, les Chibanis (travailleurs retraités), certains très âgés et
boitillants, ont été les tout premiers à se présenter aux urnes. "Ils
sont ici, mais leur coeur est là-bas", sourit le consul d’Algérie à
Nanterre, Abdelkader Dehendi, en soulignant "la mobilisation
habituellement forte" dans ce siège qui compte 43 969 votants.
A la sortie des isoloirs, la fierté, le sentiment du devoir accompli se
manifestent au cri de "Vive l’Algérie" ou au son des youyous.
A Nanterre comme à Bobigny, des observateurs vont scruter pendant six
jours la transparence des élections. Chérif Oualid, consul d’Algérie à
Bobigny, insiste auprès des assesseurs : "il ne faut pas bousculer les
bulletins. Ils doivent être disposés dans l’ordre de l’alphabet arabe".
"C’est le premier jour, tout le monde est un peu nerveux", glisse-t-il.
"On m’a traité de traître !", peste un homme avec un badge bleu
d’observateur pour le camp d’Ali Benflis, principal rival de Bouteflika.
"J’ai constaté qu’un bulletin était posé sur la mauvaise pile alors je
l’ai signalé", explique cet Algérien qui préfère taire son nom.
Ce quinquagénaire, investi "pour la première fois dans une élection", voit dans M. Benflis "un espoir de changement".
Le changement, Abed, 44 ans, qui a découvert l’ouverture du scrutin dans
la presse algérienne en buvant son café, l’attend aussi. Surtout pour
faciliter la vie des Algériens de France écrasés, selon lui, par "la
paperasse" consulaire et la cherté des billets d’avion pour le bled.
Patricia-Fatima Houiche, 64 ans, voudrait aussi "en finir avec les
vieilles recettes, le système clanique et le clientélisme". Cette
observatrice du scrutin pro-Benflis pour le bureau de Gennevilliers
(Hauts-de-Seine) veut croire que "la jeunesse française est derrière
Benflis" et contre "ce président handicapé et virtuel".
Mais devant les grilles du consulat de Nanterre, parmi une dizaine
d’Algériens qui patientent pour "les papiers", certains n’iront pas
voter. "Ca ne change rien, le match est joué dans les vestiaires", lâche
Karim 28 ans. Kamel, 37 ans, acquiesce, blasé lui aussi : "En trois
mandats, Bouteflika n’a rien fait. Regardez ce qu’a réussi à faire le
Premier ministre turc en 10 ans ! Il faut passer le flambeau aux
jeunes".
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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