Le grand imam Ahmed Al-Tayeb d’Al-Azhar, la principale autorité
sunnite d’Égypte, a annoncé lundi qu’il se plaçait "en retrait" jusqu’à
la fin des violences en Égypte, qui ont fait au moins 42 morts dans la
matinée. Dans un communiqué qu’il a lu à la télévision d’État, il a
annoncé sa décision de se mettre en réserve. L’imam avait apporté jeudi
sa caution à la mise en place d’une "feuille de route" présentée par
l’armée pour mener la transition après le coup militaire qui a renversé
le président islamiste Mohamed Morsi, à la suite de manifestations de
masse réclamant son départ. Le patriarche copte orthodoxe Tawadros II et
des responsables de l’opposition anti-Morsi ont également soutenu cette
feuille de route.
Alors qu’aucun délai n’a été donné pour la transition, l’imam Al-Tayeb a
réclamé lundi que soit "annoncée la durée de la transition" qui ne
devra pas excéder, selon lui, "six mois". Il a également appelé à créer
"sous deux jours maximum un comité de réconciliation nationale" dans le
pays où les violences liées à la polarisation politique ont fait plus
d’une centaine de morts depuis près de deux semaines de mobilisation des
pro et des anti-Morsi. Il a également demandé une "enquête immédiate"
sur les circonstances de la mort d’au moins 42 personnes tuées lundi
matin, selon un haut responsable des services d’urgences, durant une
manifestation de partisans du président déchu Morsi.
Les Frères musulmans ont dénoncé des tirs de l’armée et de la police
pendant la prière de l’aube, tandis que l’armée a assuré avoir répliqué à
une attaque de "terroristes" contre le bâtiment de la Garde
républicaine.
***
Enquête ouverte après des heurts meurtriers au Caire
Au moins 42 manifestants pro-Morsi ont été tués lundi au Caire par des
tirs dénoncés comme un "massacre" par les Frères musulmans, dans un
contexte de tensions croissantes après la destitution par l’armée du
président islamiste et une transition qui s’annonce difficile.
A l’aube, des partisans du président Mohamed Morsi priaientt devant le
site de la Garde républicaine quand des soldats et des policiers ont
ouvert le feu, ont rapporté les Frères musulmans dans un communiqué.
Ces violences ont également fait plus de 300 blessés, a indiqué à l’AFP
un haut responsable des services d’urgence sans préciser s’il s’agissait
exclusivement de manifestants islamistes.
Le président par intérim Adly Mansour a ordonné l’ouverture d’une enquête sur ces violences, a rapporté la télévision d’Etat.
"Le président de la République a chargé une commission juridique
d’enquêter sur les événements survenus devant (le siège) de la Garde
républicaine", a annoncé la télévision.
Le principal parti salafiste, al-Nour, qui a soutenu au sein d’une
coalition majoritairement laïque le coup militaire contre M. Morsi, a
annoncé son retrait des discussions sur le choix d’un Premier ministre
et d’un gouvernement de transition.
Depuis la destitution et l’arrestation de Mohamed Morsi mercredi par
l’armée, la tension ne cesse de monter en Egypte entre ses partisans et
ses opposants et des heurts sanglants ont fait plusieurs dizaines de
morts.
Lundi devant le site de la Garde républicaine, des manifestants ont fait
état de tirs à balles réelles et de grenades lacrymogènes, dans des
circonstances qui restent confuses. D’autres témoins ont raconté que les
forces de l’ordre avaient tiré en l’air et que les tirs directs
venaient "d’hommes de main" en civil.
L’armée a expliqué de son côté que des "terroristes armés" avaient
attaqué le siège de la Garde républicaine, provoquant la mort d’un
officier et laissant six conscrits dans un état critique, selon un
communiqué militaire cité par le journal gouvernemental al-Ahram.
Le quartier, survolé par des hélicoptères, était bouclé par des barrages des forces de l’ordre.
Parallèlement, le parti de la justice et de la liberté (PLJ), vitrine
politique de la confrérie, a appelé au "soulèvement du grand peuple
d’Egypte contre ceux qui sont en train d’essayer de lui voler sa
révolution avec des chars" et a mis en garde contre "l’apparition d’une
nouvelle Syrie dans le monde arabe".
Quelques heures après cette déclaration, les autorités ont décidé de
fermer le siège du PLJ au Caire après la découverte "de liquides
inflammables, de couteaux et d’armes", a annoncé à l’AFP un haut
responsable de sécurité.
Dans la matinée, des islamistes ont capturé deux soldats et les ont
obligés, en frappant violemment l’un d’eux, à prononcer une déclaration
hostile à l’armée, a rapporté un haut responsable de l’armée en
précisant que les deux soldats avaient réussi à s’enfuir.
Le prix Nobel de la paix Mohamed ElBaradei, un temps pressenti pour
prendre la tête du gouvernement de transition, a condamné "avec fermeté"
les violences de l’aube et a réclamé une enquête indépendante, dans un
message sur Twitter.
La nomination de M. ElBaradei s’était heurtée à l’opposition d’al-Nour,
qui a également émis des réserves sur le choix d’un économiste de
centre-gauche, Ziad Bahaa Eldin, estimant que ces hommes n’étaient pas
assez consensuels.
Le prochain Premier ministre aura la lourde tâche de redresser une
économie au bord de la banqueroute et de mener la réconciliation
nationale dans un pays fortement polarisé.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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