L'attentat contre un hôtel de Sousse vendredi compromet fortement
l'espoir pour la Tunisie de renouer cet été avec le tourisme en
provenance d'Europe, un poumon de l'économie, trois mois seulement après
l'attaque contre le musée du Bardo qui avait tué 21 touristes.
Trente-sept personnes ont été tuées vendredi lorsqu'un homme armé a
ouvert le feu dans l'hôtel Marhaba de la station balnéaire de Sousse
(sud de Tunis). Parmi elles figurent des touristes, majoritairement
Britanniques et d'Europe centrale, selon le groupe propriétaire de
l'hôtel.
Cet attentat intervient à quelques jours du lancement de la saison
estivale, dans un pays où le tourisme représente environ 7% du PIB et
quelque 400.000 emplois directs et indirects.
"L'attentat contre le musée du Bardo c'était déjà difficile, mais là,
les touristes ont été tués sur la plage. C'est ce que les gens vont voir
ce soir au 20H, et clairement ils ne vont pas vouloir aller en vacances
là-bas", résume à l'AFP un profesionnel français du tourisme.
En avril, le tourisme tunisien avait déjà enregistré un fort recul de
25,7% (sur un an) du nombre de touristes et de 26,3% des recettes
touristiques en devises, selon la Banque centrale du pays.
Si l'attentat contre le musée du Bardo, revendiqué par le groupe
jihadiste Etat islamique (EI), était encore dans les esprits, les
tour-opérateurs et les agences de voyage misaient beaucoup sur les
réservations de dernière minute et les prix imbattables de la Tunisie
pour sauver la saison.
Dans un communiqué, le Conseil mondial du voyage et du tourisme (WTTC) a
"condamné cette attaque brutale" qui a "frappé au coeur de l'industrie
du tourisme". Il a appelé les acteurs internationaux du tourisme à
"continuer d'apporter leur soutien à la Tunisie", et appelé le
gouvernement tunisien à "prendre les mesures de sécurité appropriées".
"Nous sommes atterrés par cet acte terroriste très ciblé, qui visait
spécifiquement des touristes", a réagi vendredi à l'AFP Jean-Pierre Mas,
président du Snav, organisation qui représente les agences de voyage
françaises, évoquant une situation "catastrophique" pour le pays, "alors
qu'on sentait que la destination repartait".
Le Snav et le Seto (tour-opérateurs français) ont recommandé vendredi
soir aux professionnels du tourisme de permettre les reports sans frais
pour les clients en partance pour la Tunisie qui ne souhaiteraient plus y
aller, ou y aller plus tard. Ces reports doivent cependant être
signifiés avant le 10 juillet, mais sont valables "pour les 12 prochains
mois", vers la Tunisie ou toute autre destination.
Les Français, premier contingent historique de touristes, affichent
depuis le début de l'année une nette frilosité pour la destination
tunisienne, au point de se faire dépasser pour la toute première fois
début 2015 par les Anglais en termes d'arrivées sur le territoire,
indiquait mercredi René-Marc Chikli, président du Seto, syndicat des
tour-opérateurs français.
Le voyagiste britannique Thomas Cook a annoncé dans l'après-midi qu'il
offrait la possibilité à ses clients "de changer sans frais leurs
réservations pour la Tunisie pour les départs prévus jusqu'au 24
juillet".
L'association des agents de voyage britanniques a conseillé aux
personnes devant partir "aujourd'hui ou demain" pour la Tunisie de
contacter leur tour-opérateur, mais a demandé aux autres "d'attendre"
pour le faire.
Du côté de l'Allemagne, le voyagiste TUI a indiqué à l'AFP compter
quelque 260 personnes dans la zone de l'attentat mais n'avoir pas
d'information sur d'éventuelles victimes parmi ses voyageurs. Il propose
aux touristes qui voudraient rentrer de les rapatrier par le prochain
vol, et l'annulation sans frais pour ceux qui ont des réservations
jusqu'au 15 septembre.
En France, si l'attentat du Bardo a joué, ceux de Paris au mois de
janvier ont également freiné les départs vers la Tunisie mais aussi vers
l'ensemble des pays musulmans, notamment le Maroc, la Turquie et
l'Indonésie.
Concernant juillet et août, les réservations pour la Tunisie depuis la
France affichaient déjà à fin mai un fort retard en termes de
réservations pour l'été, à -37,7% comparé à mai 2014, selon des chiffres
du Seto.
Du côté des agences de voyage françaises, les données n'étaient pas plus
réjouissantes: la Tunisie enregistrait déjà entre janvier et mai une
baisse cumulée de 40% des réservations en nombre de passagers, et de 42%
en volume d'affaires.
Quant à l'hôtellerie de chaîne dans le pays, elle a vu son revenu par
chambre disponible (RevPar, principal indicateur du secteur, NDLR)
diminuer de 15,8% en avril 2015 par rapport à avril 2014, puis de 12,9%
en mai par rapport à mai 2014, selon les derniers chiffres du cabinet
MKG.
Le taux d'occupation des hôtels de chaîne tunisiens est passé quant à
lui de 39,4% en avril à 44,9% en mai. A titre de comparaison, il était
72,6% en mai 2010.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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