Marwan
Barghouthi fait le V de la victoire après avoir été condamné par la
justice israélienne, le 29 septembre 2003, à Tel Aviv (Photo archives)
Etre emprisonné en Israël depuis 14 ans n'a pas empêché le dirigeant palestinien Marwan Barghouthi de triompher ce week-end à l'élection du Fatah et d'apparaître ainsi comme un successeur possible au président Mahmud Abbas.
A 57 ans, ce partisan de la lutte armée contre les Israéliens a pu vérifier dimanche sa forte popularité en étant réélu haut la main --avec plus de 70% des voix exprimées-- au Comité central du parti palestinien réuni en congrès à Ramallah.
"Après 14 ans en prison, Marwan a plus d'influence que jamais", s'est récemment félicité son épouse Fedwa, elle aussi cadre dirigeant du Fatah, dans un entretien à l'AFP. "Il a réussi à faire échouer le plan israélien pour le faire taire et l'isoler de la rue et de la politique palestinienne".
Cet homme de petite taille et au visage rond barré d'une moustache avait été propulsé sur le devant de la scène par la deuxième Intifada, le soulèvement palestinien de 2000 à 2005, dont il est considéré comme l'un des inspirateurs. Reconnu coupable par l'Etat hébreu d'implication dans des attentats, il avait été condamné en 2004 à cinq peines de prison à vie et reste considéré par beaucoup d'Israéliens comme un "terroriste".
Ce diplômé en sciences politiques, père de quatre enfants, n'a jamais caché son soutien à la lutte armée pour mettre fin à près d'un demi-siècle d'occupation israélienne des Territoires palestiniens, tout en se déclarant opposé à des attentats aveugles et en prêchant pour la solution à deux Etats, palestinien et israélien vivant en paix.
Lors de son procès, qu'il voulait celui de l'occupation, Marwan Barghouthi avait répondu à l'annonce de sa peine que l'Intifada se poursuivrait en faisant le "V" de la victoire.
Son portrait, poignets menottés mais ses doigts formant ce "V", s'étale aujourd'hui encore partout dans les Territoires occupés et notamment, symbole fort, sur le Mur construit par les Israéliens alors qu'il entrait en prison qui enserre la Cisjordanie.
Depuis les différentes prisons où il est régulièrement transféré, il publie des lettres ouvertes. "On nous a dit qu'en ayant recours aux moyens pacifiques et aux cadres diplomatiques et politiques, nous engrangerions le soutien de la communauté internationale pour mettre fin à l'occupation. Et pourtant (...) la communauté internationale n'a pas réussi à adopter une seule mesure significative", accuse-t-il dans l'une d'elles.
Il y dit "plaider pour une paix fondée sur le droit international et les résolutions de l'ONU" mais affirme avoir "vu Israël détruire méthodiquement cette perspective année après année".
Depuis son arrestation en 2002, M. Barghouthi a vu sa popularité monter en flèche, au point d'apparaître comme un successeur potentiel à Yasser Arafat avant même sa mort en 2004.
Aujourd'hui, M. Abbas, 81 ans, est de plus en plus contesté. Selon un récent sondage, plus de deux tiers des Palestiniens veulent sa démission.
En cas de présidentielle opposant Abbas, Barghouthi et le chef du Hamas à Gaza, Ismaïl Haniyeh, Barghouthi l'emporterait avec 41% des voix, contre 33% pour l'islamiste et 21% pour le président actuel, poursuit le sondage du Palestinian Center for Policy and Survey Research (PSR).
Marwan Barghouthi demeure avec sa fougue, son sens aigu de la formule et son humour décapant, capable de mobiliser les foules. Il est le seul, dit-on, qui puisse espérer mettre un terme à la division consacrée par la violente prise de pouvoir du Hamas à Gaza en 2007.
Il s'était porté candidat depuis sa prison à la présidentielle de 2005 pour défier la "vieille garde" du Fatah, avant de renoncer et de soutenir M. Abbas.
(04-12-2016)
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