L’histoire de l’entité coloniale sioniste est pavée par les
massacres des Palestiniens et autres Arabes du Liban, d’Egypte, de
Jordanie ou de Syrie. Mesurer la portée de ces massacres sur les
survivants est important, non seulement pour reconstruire une
histoire à une voix, celle des survivants, mais aussi et surtout
pour empêcher une solution basée sur la négation, l’oubli, la
négligence ou la minimisation du caractère foncièrement criminel de
l’entité coloniale, fondée sur la terre volée de la Palestine.
Rappeler les faits, tels que décrits par les survivants, ou
mentionnés dans les archives sionistes que des chercheurs
palestiniens décortiquent, sert avant tout à balayer les allégations
sionistes qui, bien que reconnaissant certains massacres, les
justifient par l’état de guerre, état qui aurait permis des
« dérives » car les sionistes, sous forme de bandes armées de colons
débarquant d’Europe, ou sous forme d’une armée ayant regroupé en son
sein ces bandes de colons, auraient été, d’après toute une
littérature coloniale et post-coloniale, européenne ou occidentale,
de gentils fermiers animés par l’enthousiasme des pionniers
colonisateurs des terres « vierges » et « en friche » mais menacés
par des sauvages autochtones ».
Ces pionniers colons n’ont jamais été pacifiques, ni par le passé
dans al-Jalil, ni à présent dans les territoires occupés de la
Cisjordanie. Ils sont venus pour s’emparer, par la force, des terres
et du pays qui ne leur appartiennent pas, mais que la communauté
internationale de l’époque, ou d’aujourd’hui, de gré ou de force,
leur a accordé le droit de s’y installer. Armés jusqu’aux dents,
hier comme aujourd’hui, hier par les occupants britanniques et les
tchèques, aujourd’hui par les Etats-Unis et l’Europe, ils ont mené
et mènent encore aujourd’hui une politique systématique de
destruction de la Palestine, sur les plans démographique (nettoyage
ethnique), sociologique, politique, religieux, culturel et
civilisationnel (judaïsation d’une terre arabo-musulmane, à partir
de mythes bibliques et d’une histoire forgée par l’occident
colonisateur).
Le massacre commis à Majd al-Kroum se situe dans le cadre de
l’opération Hiram, menée par l’armée sioniste en octobre 1948. La
« menace » arabe n’existait plus, il s’agissait pour les sionistes
de poursuivre leur occupation et par conséquent, le nettoyage
tehnico-religieux de la région d’al-Jalil. Des dizaines de villages
côtiers avaient déjà été détruits au début de 1948 et leur
population expulsée. Le 29 octobre 1948, l’armée de secours arabe,
qui était basée à Majd al-Kroum, rassemble la population pour lui
annoncer son départ, et lui demande de ne pas abandonner le village,
mais de rester pour ne pas tout perdre. Selon l’historien Adil
Manna, qui reprend dans son dernier ouvrage l’histoire des
Palestiniens demeurés en Palestine, après la Nakba, la même demande
avait été faite par les volontaires arabes, à la population de
Nasra, avant leur retrait de Palestine. Le 30 octobre, une unité de
l’armée sioniste, l’unité 123, pénètre à Majd al-Kroum, qui remet
les armes et accepte la reddition. Une centaine de personnes est
réquisitionnée par l’armée d’occupation pour nettoyer et dégager les
routes environnantes, ordre accepté par les Palestiniens en signe de
soumission. Au moment où le village de Majd al-Kroum remettait les
armes et signait sa défaite, l’armée sioniste commettait des
massacres dans des villages avoisinants et expulsait ses habitants,
comme dans le village de Ba’na, où l’armée de l’occupation a exécuté
4 de ses habitants avant d’expulser les autres vers le Liban, dans
les villages de Aylaboun, al-Rama, et a commis le massacre de la
population des Arabes d’al-Mawassi, le 1er novembre 1948, tuant de
sang-froid, après arrestation, de 12 Palestiniens, dont des enfants.
C’est également vers cette période (fin octobre, début novembre) que
les villages de la région de Safad furent décimés, comme celui
d’al-Safsaf, victime d’un horrible massacre accompagné de viol.
A la veille du massacre commis dans Majd al-Kroum, ce village
comptait 2000 habitants auxquels se sont ajoutés des réfugiés
d’autres villages décimés. Bien que le village ait été « pacifié »
et soumis, une unité de l’armée d’occupation y pénètre le 5
novembre, et impose le couvre-feu. Elle ordonne à la population de
se réunir dans la place al-Ayn, la principale place du village. Elle
réclame que les armes soient remis, mais le maire explique que
toutes les armes avaient déjà été remises le 29 octobre. L’officier
sioniste insiste et déclare qu’il compte exécuter, toutes les
demi-heure un jeune du village, si les armes ne sont pas remises.
Les soldats de l’occupation fouillent les maisons pendant ce temps.
5 Palestiniens furent ainsi exécutés, des réfugiés ou des jeunes du
village. Deux autres jeunes sont exécutés, alors qu’ils étaient en
route vers le village, deux femmes également, lors des fouilles. Le
massacre ne s’arrête que parce qu’un officier sioniste arrive sur
les lieux et affirme que le village avait été déjà « pacifié ».
De Majd al-Kroum à Kfar Qassem, la liste des massacres commis par
les sionistes pour fonder l’entité coloniale, est horriblement
longue. A Kfar Qassem, à la veille de la guerre tripartite menée par
la Grande-Bretagne, la France et l’entité sioniste contre l’Egypte
de Nasser, un couvre-feu est imposé le 29 octobre 1956, alors qu’une
partie de la population travaille hors du village. A son retour,
l’armée sioniste embusquée tire : 49 Palestiniens, hommes, femmes et
enfants sont froidement massacrés. Non seulement l’entité coloniale
a remercié les assassins ayant donné l’ordre de tirer et ceux qui
ont froidement exécuté des Palestiniens désarmés, c’est la
commémoration même du massacre par les survivants qui gêne à présent
les colonisateurs, qui cherchent à l’interdire depuis quelques
années.
Après le 15 mai 1948, date de la fondation officielle de la colonie
sioniste, ce ne sont plus des bandes armées anarchiques qui
commettent des massacres contre les Palestiniens, emportés par leur
enthousiasme colonial, mais bien une armée fortement équipée et
soutenue par l’occident impérialiste et l’Europe soviétique, qui
assassine et exécute froidement les Palestiniens, en vue d’expulser
un peuple hors de sa patrie. Le processus est toujours en cours, les
colons envahisseurs qui dévastent aujourd’hui al-Quds et la
Cisjordanie portent la même idéologie de ceux qui ont jadis dévasté
al-Jalil au nord, al-Naqab au sud et toute la zone intermédiaire,
dont les villes côtières de la Palestine et l’armée qui a jadis
commis les massacres dans al-Jalil, dans la région de Safad et dans
Kfar Qassem, commet aujourd’hui des massacres dans al-Quds, dans la
bande de Gaza, à Jénine ou al-Khalil. La seule différence gît dans
la légalisation par l’ONU et la « communauté internationale » des
crimes commis par les premiers, sous le prétexte fallacieux de
donner une terre à « un peuple sans terre ».
Le rapport de forces militaires ou le déséquilibre stratégique ne
saurait travestir les données ni être la base pour des solutions au
conflit. L’histoire nous apprend qu’ils peuvent être renversés,
sinon modifiés.
Fadwa Nassar
Mercredi, 07 Décembre 2016
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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