Des jihadistes ont pris le contrôle, ce mardi, de six secteurs de la
province de Kirkouk, après s’être emparés plus tôt dans la journée de
l’intégralité de celle de Ninive dans le nord de l’Irak. Les insurgés
contrôlent la ville de Hawija et des petites localités voisines de Zab,
Riyadh et Abbasi, à l’ouest de Kirkouk, chef-lieu de la province, ainsi
que Rashad et Yankaja au sud, selon le colonel Ahmed Taha. Les soldats
et la police ont abandonné leurs positions à Zab, a-t-il ajouté. Le chef
du conseil du district de Hawija, Hussein al-Joubouri, a de son côté
indiqué que des soldats auraient apparemment reçu l’ordre de partir,
permettant aux insurgés de prendre possession des lieux et de hisser
leurs drapeaux.
Face à cette avancée des rebelles sunnites, dont ceux de l’Etat
islamique en Irak et au Levant (EIIL), le gouvernement du chiite Nouri
al-Maliki a décidé d’armer les citoyens prêts à combattre les insurgés.
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, s’est dit "très inquiet" de
la "détérioration" de la situation, tandis que Washington qualifiait
l’EIIL de "menace pour la stabilité (...) de toute la région". "Toute la
province de Ninive est tombée aux mains des insurgés", a annoncé le
chef du Parlement Oussama al-Noujaïfi lors d’une conférence de presse,
appelant "à l’unité nationale (face) à une invasion de l’Irak par des
forces étrangères".
Avant l’aube, des centaines d’hommes armés ont lancé l’assaut contre
Mossoul et réussi, après des combats avec l’armée et la police, à
prendre le siège du gouvernorat, les prisons et les télévisions, selon
des responsables. Après que les insurgés eurent annoncé "via des
haut-parleurs être venus libérer" la ville et qu’ils combattraient
"seulement ceux qui les attaqueront", "des membres de l’armée et de la
police ont ôté leurs uniformes", a indiqué un responsable qui a requis
l’anonymat.
Il a ajouté que "les postes de l’armée et de la police étaient
désormais vides" et que les hommes armés avaient "libéré les détenus".
"Toutes les unités militaires ont quitté Mossoul et les habitants ont
commencé à fuir" par milliers vers la région autonome du Kurdistan, a
confirmé un officier de haut rang. L’EIIL a revendiqué sur Twitter les
attaques à Ninive, province pétrolière sunnite, et affirmé avoir saisi
des armes par milliers. L’EIIL contrôlait déjà Fallouja et plusieurs
autres secteurs de la province occidentale d’Al-Anbar, à majorité
sunnite et voisine de Ninive, alors que le pays, qui ne connaît pas de
répit depuis l’invasion menée par les Etats-Unis en 2003, est emporté
depuis un an et demi dans une spirale de violences.
Plus tard mardi, les jihadistes ont progressé dans une autre province
du nord du pays, celle multi-communautaire de Kirkouk où ils se sont
emparés de plusieurs secteurs, dont Hawija. Le chef du conseil du
district de Hawija, Hussein al-Joubouri, a indiqué que des soldats
auraient apparemment reçu l’ordre de partir, permettant aux insurgés de
prendre possession des lieux. Les insurgés ont ensuite pris le contrôle
de deux secteurs dans la province voisine de Salaheddine, après le
retrait des forces de sécurité, selon un général de l’armée et un
responsable local. Dans la province de Ninive, des centaines de familles
ont pris le chemin de l’exode, à pied ou en voiture. Un journaliste de
l’AFP fuyant lui-même avec sa famille a fait état de commerces fermés,
d’un commissariat incendié, de véhicules des forces de sécurité brûlés
ou abandonnés. Au Kurdistan, un autre journaliste de l’AFP a rapporté
l’afflux de milliers d’habitants fuyant Mossoul.
Plusieurs dizaines de voitures et camions attendaient devant le point
de contrôle à l’entrée de cette région, ainsi que des familles, à
pieds, chargées de sacs avec de jeunes enfants et des poussettes. Les
avancées des insurgés témoignent d’une situation chaotique sur le plan
sécuritaire, alimentée par les tensions confessionnelles
sunnites/chiites, le conflit en Syrie voisine, ainsi que les querelles
politiques, alors que les partis mènent depuis plusieurs semaines des
discussions pour former un nouveau gouvernement.
Le cabinet de Maliki, honni par les rebelles, a annoncé "une cellule
de crise pour superviser le volontariat et l’armement" des citoyens
prêts à combattre l’insurrection, et sa décision de "réorganiser" les
forces de sécurité. Le chef de la Ligue arabe Nabil al-Arabi a fait état
de sa "profonde inquiétude", appelant à "des efforts concertés de la
part de toutes forces politiques irakiennes pour faire face au
terrorisme".
Pour le professeur de sciences politiques Aziz Jabr, "la chute de
Ninive constitue une menace dangereuse". "Les commandants militaires ont
fui" les zones de combats, un geste signifiant selon lui que les forces
armées ont été "infiltrées" par les rebelles. Ninive et Al-Anbar sont
situées à la frontière poreuse avec la Syrie, le long de laquelle
gravite l’EIIL qui ambitionne d’installer un Etat islamique. L’EIIL,
aidé par des tribus hostiles au gouvernement, jouit d’un certain soutien
au sein de la minorité sunnite qui s’estime marginalisée par le pouvoir
dominé par les chiites.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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