Le secrétaire d’Etat américain John Kerry part samedi au
Proche-Orient et en Europe pour une nouvelle mission ultra-délicate,
voire impossible, au chevet de l’Irak, Washington s’alarmant de
l’offensive jihadiste sunnite tout en fustigeant le sectarisme du
Premier ministre chiite.
Du 22 au 27 juin, M. Kerry est attendu en Jordanie, en Belgique et en
France pour mener des "consultations avec des partenaires et alliés sur
la manière dont nous pouvons contribuer à la sécurité, à la stabilité et
à la formation d’un gouvernement rassembleur en Irak", a indiqué le
département d’Etat dans un bref communiqué.
Même s’ils n’ont pas formellement réclamé la démission de Nouri
al-Maliki, les Etats-Unis ne ménagent pas leurs critiques contre le chef
du gouvernement irakien, accusé de sectarisme confessionnel dans un
pays au bord du chaos depuis l’insurrection fulgurante des combattants
de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL).
"Nous avons donné à l’Irak la chance de mettre sur pied une démocratie
ouverte à toutes les parties. De travailler, en faisant fi des divisions
entre communautés, pour assurer un meilleur avenir à leurs enfants. Et
malheureusement, nous avons assisté à une dégradation de la confiance"
entre ces communautés, a relevé vendredi soir sur CNN le président
Barack Obama.
Après avoir rapatrié le dernier soldat américain d’Irak fin 2011,
M. Obama s’est dit prêt jeudi à renvoyer 300 conseillers militaires pour
appuyer les forces irakiennes. Mais il a insisté sur la nécessité pour
l’Irak de se doter d’un système politique ouvert à toutes les
communautés : sunnites, chiites, kurdes et chrétiens.
Bien que Washington soit également disposé à mener, si nécessaire, des
"frappes ciblées" contre l’EIIL, "aucun recours à la puissance de feu
américaine ne sera capable de maintenir le pays uni", a souligné le
président américain.
Il a affirmé sur CNN l’avoir "dit très clairement" à M. Maliki.
Le Premier ministre "Maliki devrait partir", tranche pour sa part
Michael Hanlon, directeur de recherches à la Brookings Institution à
Washington.
"La plupart des sunnites et des kurdes le considèrent comme un chiite
chauvin qui n’a plus à coeur de défendre leurs intérêts. Ils ont
probablement raison et il sera très difficile de les faire changer
d’avis après huit ans de pouvoir du Premier ministre", prévient
l’analyste.
Lors d’une conversation téléphonique vendredi soir, Barack Obama et son
homologue français François Hollande ont appelé à la formation d’un
gouvernement d’unité nationale. L’Irak n’a toujours pas de cabinet. Le
bloc de M. Maliki est arrivé en tête des législatives d’avril mais ne
parvient pas à former un gouvernement tant les divisions sont profondes.
L’administration Obama encourage donc la mise sur pied d’un gouvernement
irakien plus rassembleur, grâce à des négociations "sérieuses et
concertées" entre toutes les communautés, a insisté un haut responsable
américain.
C’est ce que devrait plaider M. Kerry, dépêché par le président Obama au
Proche-Orient et en Europe. Des sources parlementaires ont même parlé
d’un éventuel prochain voyage du secrétaire d’Etat en Irak, mais le
département d’Etat n’en a pas dit un mot.
A Amman d’abord, John Kerry verra une nouvelle fois son homologue
jordanien Nasser Judeh avec lequel il s’entretiendra des "défis que pose
la sécurité au Moyen-Orient", selon la diplomatie américaine.
John Kerry est attendu ensuite mardi à Bruxelles pour une réunion
ministérielle de l’Otan avant le sommet du mois de septembre. Les alliés
discuteront surtout de la crise en Ukraine.
Le chef de la diplomatie américaine se rendra enfin une nouvelle fois à
Paris, pour rencontrer "des partenaires régionaux et des alliés du Golfe
sur les défis sécuritaires au Moyen-Orient, notamment en Irak et en
Syrie", a ajouté le département d’Etat.
Les insurgés de l’EIIL, qui se sont aguerris en Syrie voisine, ont pris
le contrôle samedi d’un des trois postes-frontière avec ce pays en
guerre depuis plus trois ans.
(21-06-2014)
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