Colonie de Kfar Tapuach en Cisjordanie, le 8 février 2017 (Afp)
Deux organisations de défense des droits de l'Homme ont déposé mercredi
le premier recours pour faire annuler la loi sans précédent permettant à
Israël de s'approprier des centaines d'hectares de terres en
Cisjordanie occupée.
Le dépôt de ce recours devant la Cour suprême israélienne marque le
début d'une phase capitale pour l'avenir de cette loi qui scandalise les
Palestiniens et émeut la communauté internationale.
"Le Parlement israélien ne peut pas adopter une loi qui enfreint les
principes constitutionnels. Nous pensons que cette loi n'est pas
constitutionnelle", a déclaré Souhad Bishara, l'avocate d'Adalah.
Cette ONG qui apporte une assistance juridique aux Palestiniens a saisi
la Cour suprême aux côtés du Centre d'aide légale et des droits de
l'Homme de Jérusalem (JLAC). Ces deux organisations représentent 17
conseils locaux palestiniens de Cisjordanie sur les terres desquels ont
été construites des colonies concernées par la nouvelle loi, selon Mme
Bishara.
La loi adoptée lundi permet à Israël d'exproprier, contre compensation,
les propriétaires palestiniens de terrains privés situés en Cisjordanie
occupée et sur lesquels des colons israéliens ont construit sans
autorisation officielle israélienne.
Elle vise à légaliser au regard du droit israélien des colonies dites
sauvages, c'est-à-dire non-reconnues par Israël, et à leur épargner la
démolition sur décision des juges.
Ses promoteurs veulent éviter que ne se reproduise le psychodrame de la
semaine passée lorsque des centaines de policiers avaient évacué de
force les 200 ou 300 résidents de la colonie d'Amona et les centaines de
jeunes colons venus les soutenir.
Israël distingue entre colonies reconnues et "sauvages". Mais la
Cisjordanie est un territoire occupé par Israël depuis 1967 et au regard
du droit international, toutes les colonies sont illégales.
Les Palestiniens et les défenseurs de leur cause ont dénoncé la loi
comme poussant encore plus loin la colonisation en légalisant le "vol"
de terres.
Une grande partie de la communauté internationale considère la
colonisation comme un obstacle à la paix toujours insaisissable entre
Israéliens et Palestiniens.
Elle s'alarme qu'Israël ait étendu pour la première fois sa juridiction à
des terres palestiniennes. Il s'agit d'une "ligne rouge très épaisse"
sur la voie d'une annexion de la Cisjordanie, a dit le coordinateur de
l'ONU pour le processus de paix, Nickolay Mladenov. Une telle annexion
est ouvertement souhaitée par certains ministres israéliens.
L'administration américaine persiste dans son silence sur cette loi,
dernier acte en date d'une activité israélienne de colonisation débridée
depuis l'investiture de Donald Trump. Tandis que, de Londres au Caire,
s'élevaient les protestations, le porte-parole de la Maison Blanche Sean
Spicer s'est contenté d'évoquer la rencontre prévue le 15 février entre
le Premier ministre Benjamin Netanyahu et M. Trump.
Le gouvernement israélien et la droite voient dans l'élection de M.
Trump l'avènement d'une nouvelle époque après huit années
d'administration Obama, critique jusqu'au bout de la colonisation.
Face à la réprobation internationale, la ministre adjointe des Affaires
étrangères Tzipi Hotovely a réitéré la conviction de bon nombre des
partisans du texte, à savoir que la Cisjordanie est, par la Bible, terre
d'Israël.
"Le postulat de ces critiques contre Israël, c'est que nous sommes sur
une terre palestinienne. Ce postulat est incorrect. Israël a des droits
historiques et légaux sur cette terre", a-t-elle dit.
En protégeant les colons de l'éviction et en dédommageant les
propriétaires des terres, la loi "instaure une justice équitable entre
les Palestiniens et les familles juives", selon elle.
Malgré sa position, Mme Hotovely ne reflète pas nécessairement la pensée
du ministre des Affaires étrangères, qui est aussi le Premier ministre.
M. Netanyahu est passé de ses objections initiales au soutien à la loi.
Il est soumis à la surenchère du lobby des colons et de ses rivaux au
sein du gouvernement, qui lui disputent l'électorat de droite, avec
toujours à l'esprit la possibilité de législatives anticipées. Lui et sa
famille sont actuellement visés par deux enquêtes de police.
M. Netanyahu sait aussi que la loi aura du mal à passer l'écueil de la
Cour suprême. Plusieurs experts, y compris le procureur général Avichai
Mandelblit dont l'une des tâches est de conseiller le gouvernement, ont
prévenu que le texte ne résisterait probablement pas à l'examen
constitutionnel.
(08-02-2017 )
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire