Un tribunal militaire israélien a déclaré mercredi coupable d'homicide
un soldat franco-israélien accusé d'avoir achevé un assaillant
palestinien blessé, après des mois d'un procès exceptionnel qui divise
profondément ses compatriotes.
Les trois juges devraient prendre plusieurs semaines avant de prononcer
leur peine à l'encontre du sergent Elor Azaria, 20 ans, qui encourt 20
ans de prison.
Le jeune soldat est jugé depuis mai 2016 pour avoir tiré une balle dans
la tête d'un Palestinien gisant au sol et apparemment hors d'état de
nuire après avoir attaqué au couteau des soldats israéliens.
Le jugement, attendu en direct par les grandes chaînes de télévision, a
continué à mettre en lumière les profondes lignes de fracture causées
dans l'opinion par l'affaire Azaria, entre ceux qui plaident pour le
strict respect par l'armée de valeurs éthiques et ceux qui invoquent le
soutien dû aux soldats confrontés aux attaques palestiniennes.
Des accrochages ont éclaté entre des dizaines de jeunes supporteurs du
soldat et les forces de l'ordre à l'extérieur du quartier général de
l'armée où le tribunal statuait. Deux personnes ont été arrêtées, selon
la police. "Le peuple d'Israël n'abandonne pas l'un de ses soldats sur
le champ de bataille", proclamait une pancarte.
Le dossier Azaria a opposé l'état-major, qui s'est posé en garant de
certains idéaux militaires et a poussé à ce qu'il soit jugé, à une
grande partie de la droite et des personnalités politiques de premier
plan.
Ce procès n'aurait jamais dû avoir lieu", a déclaré la ministre de la
Culture Miri Regev. Elor Azaria est "notre fils, notre enfant", a-t-elle
ajouté, et il aurait dû faire l'objet de mesures disciplinaires au sein
de son unité.
Avant de devenir ministre de la Défense, Avigdor Lieberman avait
signifié son soutien au soldat en assistant au début de son procès.
Désormais détenteur de l'un des plus importants portefeuilles
gouvernementaux, il a indiqué ne pas aimer le jugement, tout en appelant
à le respecter et "à faire preuve de retenue". "J'appelle le monde
politique à cesser de s'en prendre aux responsables des services de
sécurité, à l'armée et à son chef d'état-major", a-t-il dit.
Dans un pays régulièrement confronté aux attaques palestiniennes et où
l'armée est une institution incontournable, des milliers d'Israéliens
ont pris fait et cause pour le soldat, lors de manifestations ou sur les
réseaux sociaux.
Elor Azaria a été salué par des applaudissements et des accolades
chaleureuses lorsqu'il est arrivé en uniforme, un large sourire crispé
sur son visage, dans le prétoire exigu où avaient pris place ses
proches, dont sa mère tremblotant, visiblement très éprouvée.
Il s'est montré tendu au fil des presque trois heures de lecture du
jugement par la présidente de la cour, le colonel Maya Heller.
Le soldat avait été filmé le 24 mars 2016 par un activiste
pro-palestinien alors qu'il tirait une balle dans la tête d'Abdel Fattah
al-Sharif à Hébron en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par
l'armée israélienne.
Ce jeune homme de 21 ans venait, avec un autre Palestinien, d'attaquer
des soldats au couteau. Atteint par balles, il gisait à terre grièvement
blessé et ne posait apparemment plus aucun danger. Son complice était
apparemment déjà mort.
Les Territoires palestiniens, Jérusalem et Israël étaient alors en proie à une vague de violences quasiment quotidiennes.
L'affaire semble être l'un des cas les plus flagrants d'usage excessif
de la force dont sont régulièrement accusées les forces israéliennes
vis-à-vis des Palestiniens.
Le jeune soldat, constamment entouré des siens au cours des mois de
débats, plaide non-coupable. Il pensait que le Palestinien dissimulait
sous ses vêtements une ceinture d'explosifs, ont expliqué ses avocats.
Ces derniers ont aussi argué, contre les conclusions de l'autopsie, que
le Palestinien était déjà mort quand le sergent avait tiré.
La présidente de la cour a cependant mis à bas une à une les lignes de
défense des avocats d'Elor Azaria. Elle a retenu les témoignages selon
lesquels le soldat avait déclaré sur place que le Palestinien méritait
de mourir. Elor Azaria savait ce qu'il faisait, a-t-elle dit, ajoutant
que le Palestinien était mort "inutilement".
(04-01-2017 )
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